Infections nosocomiales. Le Conseil d’État précise la notion d’infection nosocomiale au sens du second alinéa de I de l’article L. 1142-2 du code de la santé publique. CE, Section, 23 mars 2018, Mme B. C., n° 402237, A

Infections nosocomiales

Le Conseil d’État précise la notion d’infection nosocomiale au sens du second alinéa de I de l’article L. 1142-2 du code de la santé publique.

CE, Section, 23 mars 2018, Mme B. C., n° 402237, A

 

Le Conseil d’État était saisi d’un pourvoi dans le cadre d’un litige portant sur la mise en jeu de la responsabilité du centre hospitalier intercommunal (CHI) d’Elbeuf-Louviers-Val de Reuil et la réparation des préjudices liés à des infections nosocomiales qui auraient été contractées dans cet établissement par une patiente. Dans cette affaire, la patiente avait été admise en 2003 au service des urgences de ce centre hospitalier où lui a été diagnostiqué un accident vasculaire cérébral. Elle a ensuite été transférée au service de réanimation en raison d’une détresse respiratoire liée à une inhalation broncho-pulmonaire puis a, par la suite, fait l’objet de plusieurs hospitalisations au cours desquelles elle a présenté plusieurs complications infectieuses jusqu’en 2005. Mme D. sa fille, a saisi le tribunal administratif de Rouen d’une demande indemnitaire dirigée contre le centre hospitalier et contre l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM). Par un jugement du 19 mars 2015, le tribunal a retenu que la patiente avait été victime d’une infection nosocomiale engageant la responsabilité du centre hospitalier, qui n’était pas à l’origine de son décès mais avait entraîné des souffrances et un déficit fonctionnel temporaire, et l’a condamné à verser à la requérante, en sa qualité d’ayant droit de sa mère, une somme de 5 508,80 euros destinée à réparer ces préjudices. Le tribunal administratif a par ailleurs mis l’ONIAM hors de cause. Ce jugement a fait l’objet d’un appel de Mme D. et d’un appel incident du centre hospitalier. Par un arrêt du 21 juin 2016, la cour administrative d’appel de Douai, faisant droit à cet appel incident, a annulé le jugement du tribunal en tant qu’il condamnait l’établissement à verser une indemnité à Mme D. et rejeté les conclusions de cette dernière. Mme D. s’est alors pourvue en cassation.

Le Conseil d’État précise tout d’abord qu’aux termes du second alinéa du I de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique, les professionnels de santé et les établissement, services ou organismes dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins « sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère » et que doit être regardée, au sens de ces dispositions, comme présentant un caractère nosocomial une infection survenant au cours ou au décours de la prise en charge d’un patient et qui n’était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci, sauf s’il est établi qu’elle a une autre origine que la prise en charge.

Le Conseil d’État relève ensuite que la cour administrative d’appel a souverainement retenu, conformément aux conclusions du rapport d’expertise, que l’infection contractée par Mme C. en janvier 2003, au cours de son séjour au centre hospitalier, avait été causée par la régurgitation de liquide gastrique, qui avait pénétré dans ses bronches en raison d’un trouble de la déglutition consécutif à l’accident vasculaire cérébral dont elle avait été victime. Le Conseil d’État juge que la cour n’a pas commis d’erreur de droit en déduisant de ces constatations, dont il résultait que l’infection était la conséquence non des actes pratiqués dans le cadre de la prise en charge de la patiente ni de son séjour dans l’environnement hospitalier mais de la pathologie qui avait nécessité son hospitalisation, que le dommage n’était pas dû à une infection nosocomiale au sens des dispositions citées ci-dessus du code de la santé publique.

Le Conseil d’État juge en revanche que la Cour a commis une erreur de droit en rejetant la demande de Mme D. tendant à l’indemnisation des préjudices subis par sa mère du fait des autres épisodes infectieux survenus au cours de ses différentes périodes d’hospitalisation en 2003 et 2005 aux motifs que si ces infections présentaient un caractère nosocomial, elles n’étaient pas d’une particulière gravité, avaient été traitées efficacement et n’avaient engendré aucune séquelle. Le Conseil d’État estime que la cour se devait de rechercher si ces infections répétées avaient entraîné pour la victime des troubles et des souffrances lui ouvrant droit à réparation.

Source: Lettre de la justice administrative n° 52 du 12 avril 2018

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