Contraventions pour non-désignation de conducteur

Question écrite n° 02901 de Mme Marie Mercier (Saône-et-Loire – Les Républicains) publiée dans le JO Sénat du 25/01/2018 – page 268

Mme Marie Mercier attire l’attention de M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur, sur les avis de contraventions pour non-désignation de conducteur destinés aux personnes morales propriétaires de véhicules de société.

Depuis le 1er janvier 2017, l’article L. 121-6 du code de la route prévoit l’imputation d’une infraction au code de la route, en l’espèce l’excès de vitesse, au représentant légal d’une personne morale, si ce dernier ne parvient à rapporter la preuve de l’identité de la personne qui conduisait le véhicule lors de la commission des faits.

En effet, avant de payer la contravention, le représentant légal doit indiquer l’identité et l’adresse de la personne physique qui conduisait le véhicule lors de l’infraction sous un délai de 45 jours. En cas de non-dénonciation de l’utilisateur du véhicule, le représentant légal doit s’acquitter d’une amende pénale forfaitaire de 450 à 675 €. Il engage donc sa responsabilité pécuniaire.

Or, de nombreux citoyens se sont retrouvés victimes de ce fonctionnement. Le représentant de la personne morale a deux possibilités : payer la contravention et reconnaître l’infraction, ou dénoncer la personne physique qui a commis l’infraction.

En conséquence, si la personne physique paie la contravention sans indiquer l’identité du conducteur, une amende pour non-désignation de conducteur sera par la suite envoyée. Les principales victimes sont donc les professionnels libéraux et chefs de petites sociétés.

Aussi, elle l’interroge sur la pertinence de ce dispositif.

Réponse du Ministère de l’intérieur publiée dans le JO Sénat du 12/04/2018 – page 1788

Depuis le 1er janvier 2017, les personnes morales dont le représentant légal ne désigne pas la personne physique qui a commis une infraction au volant d’un véhicule leur appartenant ou qu’elles détiennent reçoivent un avis de contravention pour non désignation. L’envoi de ce nouvel avis de contravention doit mettre fin à la situation qui voit certains contrevenants ayant commis une infraction au volant d’un véhicule professionnel échapper au retrait de points. Il arrivait même, dans certains cas, que la personne morale, en lieu et place du contrevenant, paie directement l’amende. De tels procédés sont déresponsabilisants pour les auteurs d’infraction et contraires aux objectifs de sécurité routière. Le représentant légal d’une personne morale doit donc, à la suite de la réception d’un avis de contravention, désigner le conducteur ayant commis l’infraction ou se désigner personnellement s’il a lui-même commis l’infraction, en communiquant notamment la référence de son permis de conduire. En effet, s’il ne le fait pas, son permis de conduire ne pourra pas faire l’objet du retrait du nombre de points correspondant à l’infraction commise. Aussi, lorsqu’il reçoit un avis de contravention en tant que représentant légal, il doit d’abord se désigner en tant que personne physique auprès de l’officier du ministère public, par voie papier ou électronique. Il reçoit par la suite un avis de contravention qui lui est personnellement adressé, par voie postale ou par voie électronique (e-ACO), et peut alors régler l’amende associée à l’infraction qu’il a commise. Afin de faciliter les démarches des représentants légaux et préciser les procédures à suivre, l’agence nationale de traitement automatisé des infractions a procédé à l’adaptation des documents qu’elle leur envoie dans le cadre du contrôle automatisé. L’ensemble des informations utiles aux représentants légaux ressort ainsi de la lecture combinée de l’avis de contravention et du document « notice de paiement » qui y est joint. En outre, ces documents prennent en compte les recommandations formulées récemment par le Défenseur des droits. À partir du moment où un véhicule est enregistré dans le système d’immatriculation des véhicules au nom d’une personne morale, entraînant l’établissement d’un certificat d’immatriculation à son nom, son représentant légal a l’obligation de désigner le conducteur qui commet une infraction au volant de ce véhicule. En effet, dans ce cas de figure, les informations relatives à la personne morale ne mentionnent ni sa taille, ni ses effectifs, ni son objet social ni encore l’identité du conducteur effectif du véhicule ou celle de son représentant légal. D’ailleurs, les avis de contravention envoyés aux représentants légaux ne leur sont pas nommément adressés. Ils se limitent à la mention de la qualité de représentant légal du destinataire de l’avis, celle de la raison sociale de la personne morale qu’il représente, ainsi que l’adresse de cette dernière. Si dans certaines situations professionnelles, la distinction entre les actes relevant de l’activité professionnelle et ceux relevant de la vie personnelle est difficile, la démarche d’immatriculer un véhicule au titre de la personne morale est toujours un choix, matérialisé par les informations inscrites dans le CERFA de demande d’immatriculation, ou communiquées dans le cadre des téléprocédures, et par les pièces justificatives produites à l’appui de cette démarche. Ce choix confère aux représentants légaux des droits et des avantages, mais aussi des obligations. Parmi ces obligations, figurent notamment celle d’être en mesure d’identifier et de désigner le conducteur qui commet des infractions au volant du véhicule et celle de se désigner en tant que conducteur lorsque le représentant légal commet lui-même une infraction au volant du véhicule. Il y a lieu de préciser que les dispositions de l’article L. 121-6 du code de la route, prévoyant le dispositif de contravention en cas de non-désignation, ont été soumises à la chambre criminelle de la Cour de cassation (arrêt du 7 février 2018 n°  17-90023) dans le cadre d’une demande de transmission au Conseil constitutionnel d’une question prioritaire de constitutionnalité. La chambre criminelle a notamment indiqué que les dispositions de l’article L. 121-6 du code de la route étaient dépourvues d’ambiguïté, qu’elles assuraient un juste équilibre entre les nécessités de la lutte contre l’insécurité routière et le droit de ne pas s’auto-incriminer, qu’elles ne méconnaissaient pas les droits de la défense et ne portaient aucune atteinte au principe d’égalité entre les justiciables.

Source: JO Sénat du 12/04/2018 – page 1788

À lire également