Question N° : 74864 de M. Claude Bartolone (Socialiste, radical, citoyen et divers gauche – Seine-Saint-Denis)
Texte de la question
M. Claude Bartolone attire l’attention de M. le secrétaire d’État à la défense et aux anciens combattants sur l’annonce qu’il a faite, le 5 décembre 2009, du projet visant à faire inscrire les noms des victimes du drame de la rue d’Isly, le 26 mars 1962, sur la colonne centrale du mémorial national de la guerre d’Algérie situé quai Branly à Paris.
La fédération nationale des anciens combattants en Algérie, Maroc et Tunisie (FNACA), et singulièrement le comité départemental de la Seine-Saint-Denis fort de 5 500 adhérents, considère ce projet comme une véritable insulte à l’armée française restée loyale à la République.
La manifestation qui s’est déroulée le 26 mars 1962 a en effet été organisée par un groupe affilié à l’OAS.
Si l’on peut regretter fortement que la force publique ait été obligée de riposter à des tirs dirigés contre elle, faisant ainsi plusieurs victimes parmi les manifestants, il paraît très peu opportun d’inscrire le nom de ces victimes aux côtés de citoyens « morts pour la France » entre 1952 et 1962.
Il lui demande donc quelles justifications le Gouvernement apporte à cette annonce et ce qu’il entend faire pour prendre en compte les légitimes observations des anciens combattants.
Texte de la réponse
Dès son inauguration le 5 décembre 2002 par le Président de la République, le mémorial du quai Branly, à Paris, a été dédié aux combattants morts pour la France et aux supplétifs tués après le cessez-le-feu.
Le décret n° 2003-925 du 26 septembre 2003 a institué une journée nationale d’hommage aux « morts pour la France » pendant la guerre d’Algérie et les combats du Maroc et de la Tunisie, le 5 décembre de chaque année.
La loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés associe à cet hommage les personnes disparues et les populations civiles victimes de massacres ou d’exactions commis durant la guerre d’Algérie et après le 19 mars 1962 en violation des accords d’Évian, ainsi que les victimes civiles des combats du Maroc et de la Tunisie.
La plaque alors apposée à côté de la colonne bleue du mémorial rappelle la volonté du législateur.
La décision que le secrétaire d’État à la défense et aux anciens combattants a prise consiste à ce que les noms des civils français, victimes innocentes de la guerre d’Algérie, puissent être affichés sur le monument au lieu de faire l’objet d’une seule mention collective sur cette plaque.
Pour qu’elles ne soient pas confondues avec les combattants morts pour la France, leurs noms apparaîtront sur la colonne blanche du monument, les colonnes bleue et rouge restant, comme aujourd’hui, dédiées aux morts pour la France.
La dédicace du mémorial, qui défile sur la colonne blanche, a été complétée en ce sens.
L’inscription de noms de victimes civiles innocentes se fera sur demande des familles ou d’associations représentatives, et après instruction par les services du ministère qui s’assureront qu’elles n’étaient des activistes, ni du FLN, ni de l’OAS.
C’est dans ce cadre que les noms des victimes de la manifestation qui s’est déroulée le 26 mars 1962 dans la rue d’Isly à Alger ont été inscrits sur la colonne centrale du mémorial.
S’il ne fait aucun doute que ces manifestants algérois ont été manipulés dans le contexte très particulier des événements du moment, les recherches effectuées ont permis d’établir que ces victimes étaient simplement des personnes défilant selon leurs convictions et dans le cadre d’une manifestation qui a tourné à la tragédie.
Près de 50 ans après, il apparaît utile au travail de réconciliation des mémoires d’écrire les noms des victimes civiles innocentes aux côtés de ceux des morts pour la France, sans mélange ni confusion, afin de parfaire la vocation du mémorial et de répondre pleinement à l’intention du législateur.
Cette démarche permettra ainsi de préparer le rendez-vous mémoriel de 2012, pour le 50e anniversaire de la fin de la guerre d’Algérie.
Source : JO du 11/05/2010 page : 5245