M. le président. La parole est à M. Alain Suguenot, pour le groupe Les Républicains.
M. Alain Suguenot. Monsieur le ministre de la défense, un grand quotidien national titrait ce week-end : « Nous bombardons Daech en Irak et en Syrie, mais nous sommes incapables de contrôler nos banlieues ». Au-delà de la question de l’opportunité, est-il raisonnable, voire efficace, de se lancer dans des offensives comme à Mossoul, lorsque nous sommes incapables d’assurer la sécurité sur notre territoire ? (« Oh ! » sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.) Il faut bien sûr combattre Daech par tous les moyens, mais nous savons pertinemment que ce n’est pas la France qui libérera Mossoul.
Monsieur le ministre, les renforts venus de Mossoul ne risquent-ils pas de relancer, depuis la Syrie, la campagne d’Europe, au cœur de la stratégie transnationale de Daech ? Vous le savez bien : ce n’est pas vraiment en Irak que le terrorisme se développe : c’est à partir de la Syrie que le djihadisme prolifère. C’est en Syrie qu’il doit être terrassé avant qu’il ne soit trop tard.
Monsieur le ministre, nous ne pouvons plus nous permettre d’attendre le prochain attentat ni de défiler en condamnant le terrorisme. Selon les experts, la bataille de Mossoul sera longue, l’issue en sera incertaine et le drame humain qui s’ensuivra risque de créer d’autres difficultés dont nous n’imaginons pas encore les conséquences.
Notre priorité, au-delà du symbole de notre présence aux côtés des vainqueurs potentiels de Mossoul, doit être de protéger notre territoire. Quand on fait la guerre, on doit en assumer les conséquences. Si les djihadistes ne se posent pas cette question, nous devons, nous, être garants de la sécurité de nos concitoyens. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous rassurer sur ce point ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la défense.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. Monsieur le député, le Premier ministre irakien, M. Haïdar Al-Abadi, a décidé il y a deux jours le lancement de l’offensive contre la capitale de Daech, Mossoul. Car cette ville est bien la capitale de Daech et donc le lieu où ont été fomentés, décidés et organisés les attentats commis en France. Mossoul est la capitale de notre ennemi.
Nous appuyons donc les forces irakiennes et les forces peshmergas dans leur détermination à reconquérir Mossoul. C’est une question de sécurité pour notre territoire, raison pour laquelle nous sommes actifs et déterminés à les accompagner jusqu’à l’éradication de Daech dans ce territoire. Il est vrai que cela ne règle pas tout, mais il faut d’abord éliminer le centre pour pouvoir ensuite s’attaquer aux métastases.
Cette bataille sera longue, pour trois raisons : d’abord, parce que c’est la capitale de Daech et qu’ils se sont organisés en lignes de défense rigoureuses, en creusant des souterrains et en piégeant les entrées de la ville ; ensuite, parce que la population y est importante – 1,5 million d’habitants – ; enfin, parce que nous avons des règles d’engagement extrêmement précises pour éviter les dégâts collatéraux, et ces règles seront scrupuleusement respectées pendant toute la bataille.
Par ailleurs, nous avons mis les moyens nécessaires pour assurer les conditions humanitaires minimales : 750 000 places pour les réfugiés sont prévues aux alentours de Mossoul.
Monsieur le député, la bataille contre le terrorisme commence là-bas. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement sur des sujets européens.
Source: Assemblée nationale. Compte rendu intégral .Première séance du mercredi 19 octobre 2016