Pendant des années, comme tout chef qui se respecte et respecte les lois de son pays, je n’ai cessé de répéter à nos soldats qui partaient en opération et avec lesquels je suis parti en opération : « Vous partez avec, collé à la semelle de vos chaussures, les règles du droit national, celles du droit international et nos règles de comportement si bien synthétisées dans ce code du soldat que vous devez porter sur vous en permanence ! Où que vous alliez, quoi que vous fassiez, elles ne devront jamais vous quitter »
A force d’entendre des élucubrations en tout genre sur la façon dont il conviendra de réinsérer les djihadistes revenant au pays une fois commis leurs forfaits, j’ai pensé qu’il était temps de rappeler que nous vivons dans un état de droit et que la moindre des choses c’est que ce droit s’applique avec la même rigueur à tous. Il serait stupéfiant que ceux qui mènent, avec une sauvagerie qui n’épargne ni les enfants, ni les femmes ni même les œuvres d’art, le même combat que ceux qui nous tuent des soldats et sont allés jusqu’à égorger nos blessés, puissent rentrer au pays comme si de rien n’était. Pour moi ce ne sont que des criminels de guerre. D’où cet article paru dans le courrier des lecteurs de Valeurs actuelles.
Je suis particulièrement décontenancé par les commentaires que j’entends sur les jeunes partant faire le djihad comme d’autres vont au foot ou à la pêche à la ligne…pour le fun plus que par convictions bien ancrées : Mais que va-t-on en faire lorsqu’ils vont rentrer au pays… comme d’autres rentrent de vacances avec le sentiment d’avoir passé un bon moment ? Dans un pays qui s’est fait le champion de la judiciarisation des opérations dans lesquelles il engage ses soldats pour la sécurité élargie de la patrie et la défense des intérêts supérieurs de la nation, la réponse tombe sous le sens : combattants irréguliers de bandes armées qui se rendent coupables de crimes contre l’humanité, ce sont tous des criminels de guerre.
Qu’ils soient donc jugés sans faiblesse comme tels et châtiés en conséquence avec toute la rigueur du droit national et international que nos soldats et leurs chefs se font un honneur de respecter partout où ils sont engagés.
A ce titre, il est intéressant de noter la différence entre Article L224-1 de la loi « antiterroriste » et le projet de loi adopté par l’Assemblée nationale en première lecture lors de la seconde session extraordinaire de 2013-2014 du 18 septembre 2014 :
Le projet est le suivant : « Tout ressortissant français peut faire l’objet d’une interdiction de sortie du territoire lorsqu’il existe des raisons sérieuses de croire qu’il projette : 1° Des déplacements à l’étranger ayant pour objet la participation à des activités terroristes, des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité (…). »
La mouture définitive de la LOI n°2014-1353 du 13 novembre 2014 – art. 1 est un peu différente : « Tout Français peut faire l’objet d’une interdiction de sortie du territoire lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser qu’il projette : 1° Des déplacements à l’étranger ayant pour objet la participation à des activités terroristes (…). »
Exit les crimes de guerre ou les crimes contre l’humanité … et sans doute les poursuites contre ceux qui reviendraient du djihad alors que l’arsenal juridique nécessaire existe par ailleurs…
Tartuffe est toujours bien vivant comme le soulignait Valeurs Actuelles en couverture.
Il est vrai que j’aurais pu regarder tout ce petit monde « comme des insectes bizarres » parler de « maladie mentale », de « folie »de cheminements, de « sociopathes et de psychopathes » et clamer qu’ « il faut arrêter les délires mentaux, les excès (…) éliminer les poisons ».
Ce n’est plus la peine. Le Recteur Dalil Boubakeur s’en est chargé au Club de la presse de Montpellier le 26 février.
Source : Le Midi Libre du 27 février 2015