Question écrite n° 07739 de M. Louis Nègre (Alpes-Maritimes – UMP) publiée dans le JO Sénat du 01/08/2013 – page 2244
M. Louis Nègre attire l’attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur les nombreuses manifestations de pères célibataires au sujet de leur droit de garde.
L’amplification des demandes pour une garde alternée résulte de l’augmentation croissante des divorces depuis les années 70 et ne peut rester sans réponse. Seulement 20 % des divorces terminent par une garde alternée et 72,1 % par une garde accordée à la mère uniquement.
La justice française se doit d’être en adéquation avec l’évolution des mœurs de notre société. Les revendications de ces pères célibataires qui ont un ressenti de rejet de leur droit de père de la part de la justice, et d’injustice face aux mères, met en lumière que l’article 373-2-11 modifié par l’article 8 de la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants n’est pas assez égalitaire.
Aujourd’hui, un père doit prouver qu’il est un bon père, tandis qu’il n’en est pas tant demandé aux mères. Cette justice inégalitaire, du fait de la non clarté de nos lois, rend le travail de nos juges de plus en plus complexe.
Il souhaite savoir ce que propose le Gouvernement pour faciliter l’exercice d’une justice plus égalitaire dans notre pays sur ce sujet.
Transmise au Ministère de la justice
Réponse du Ministère de la justice publiée dans le JO Sénat du 20/11/2014 – page 2592
Afin de disposer d’une analyse précise sur la résidence des enfants dont les parents sont séparés, la Chancellerie a initié, au cours du mois de juin 2012, une étude portant sur l’ensemble des décisions rendues par tous les juges aux affaires familiales sur une période de quinze jours.
Cette étude, réalisée à partir de 6 042 décisions et publiée au mois de novembre 2013, laisse apparaître que, dans 80 % des situations, les parents sont en accord sur la résidence des enfants, dans 10 %, ils sont en désaccord et, dans 10 % des cas, l’un des deux parents ne forme aucune demande.
Quelle que soit la situation, les juges ont prononcé une résidence alternée pour 17 % des enfants.
Pour les seules procédures de divorce, l’exploitation du répertoire général civil montre que la part d’enfants mineurs pour lesquels une résidence alternée a été prononcée est passée de 11,5 % en 2004 à 22,8 % en 2013.
La proportion d’enfants pour lesquels une résidence alternée est prononcée est plus importante dans les procédures de divorce en raison du nombre important de divorce par consentement mutuel dans lequel la résidence alternée est plus fréquemment choisie par les parents.
Lorsque les parents sont en désaccord, l’étude précitée laisse apparaître que la résidence alternée est prononcée pour 12 % des enfants.
Le taux de rejet de la résidence alternée est de 75 % lorsque le père la demande et la mère la refuse et de 60 % lorsque la mère la demande et le père la refuse.
Le taux de rejet de la résidence alternée est donc relativement important en cas de désaccord entre parents quelle que soit l’origine de la demande.
Il ressort donc de cette étude que le principal frein au développement de la résidence alternée provient du choix des parents, la résidence chez la mère étant le mode de résidence le plus sollicité par les parents séparés.
En effet, lorsque les parents sont d’accord sur le mode de résidence de l’enfant, ce qui représente 8 % des situations, ils demandent, pour 71 % des enfants, une résidence chez la mère, pour 10 %, une résidence chez le père et, pour 19 %, des enfants, une résidence alternée.
Tout en maintenant le pouvoir d’appréciation du juge afin qu’il statue en fonction des éléments particuliers et concrets de chaque situation familiale et ce, dans l’intérêt de l’enfant, la proposition de loi n° 1856, relative à l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant, adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture le 27 juin 2014, modifie les règles relatives à la fixation de la résidence de l’enfant en prévoyant qu’elle est fixée au domicile des deux parents selon les modalités déterminées d’un commun accord par les parents ou, à défaut, par le juge.
Sans imposer de résidence alternée paritaire, il est proposé que l’enfant bénéficie d’un double rattachement au domicile de chacun des parents.
Le rythme et la durée des séjours de l’enfant chez chacun de ses parents resteront déterminés par les parents ou, en cas de désaccord, par le juge, conformément à son intérêt.
La rédaction proposée permet, sans imposer de règle prédéterminée, de valoriser la place des deux parents en supprimant le terme de « droits de visite et d’hébergement » qui est souvent mal vécu par le parent qui en bénéficie.
L’examen exhaustif de la situation familiale particulière de chaque enfant reste toutefois au cœur du dispositif proposé.
Source: JO Sénat du 20/11/2014 – page 2592