Plongée sous-marine du GIGN en absurdie gendarmique. ( Jacques BESSY )

Les faits.

Un arrêté  du 21 février 1997 fixe les conditions d’attribution de l’indemnité spéciale des plongeurs d’armes de la marine nationale, des nageurs de combat de l’armée de terre et des plongeurs d’intervention de la gendarmerie nationale.

Le dernier alinéa de l’article 1er de cet arrêté prévoit la condition d’obtention d’un certificat de nageur de combat pour prétendre à la qualité de plongeur d’intervention de la gendarmerie nationale.

Or, la formation de nageur de combat, qui seule permet d’obtenir un certificat de nageur de combat, est destinée à acquérir des compétences offensives ne correspondant à aucune nécessité opérationnelle pour la gendarmerie nationale. En conséquence, elle n’est pas ouverte aux militaires de l’institution.

Plus d’une quinzaine de militaires de la gendarmerie affectés au GIGN, ont donc demandé au ministre de l’Intérieur d’abroger cette disposition pour le moins absurde, en espérant sans doute que la réglementation modifiée fixerait une condition de diplôme accessible aux gendarmes du GIGN.

A cet égard, rappelons que l’article 16-1 dans la loi nº 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations dispose que :

« L’autorité administrative est tenue, d’office ou à la demande d’une personne intéressée, d’abroger expressément tout règlement illégal ou sans objet, que cette situation existe depuis la publication du règlement ou qu’elle résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date. »

La démarche de l’ensemble des militaires du GIGN était donc tout à fait fondée  en droit.

Par une décision du 7 mai 2013, le ministre de l’intérieur a rejeté leur demande tendant à l’abrogation du dernier alinéa de l’article 1er de l’arrêté du 21 février 1997.

S’agissant d’un texte réglementaire, l’affaire a été portée directement devant le Conseil d’Etat, car dans cette hypothèse, le passage devant la commission des recours des militaires est exclu.

La décision.

Le Conseil d’Etat fait logiquement droit aux requêtes groupées des gendarmes en relevant : « le dernier alinéa de l’article 1er de l’arrêté du 21 février 1997, pris en application du décret précité du 21 février 1997 pour permettre le versement d’une indemnité spéciale de plongée aux plongeurs d’intervention de la gendarmerie est entaché d’erreur de droit dès lors qu’il subordonne ce versement à la détention du certificat de nageur de combat délivré après une formation qui n’est pas ouverte aux gendarmes ; que le refus d’abrogation de cette disposition doit, en conséquence, et sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen de la requête, être annulé ; »

 

Commentaires de l’Adefdromil.

 

Ce contentieux a été initié, semble t’il, alors que le général, Jacques Mignaux était à la tête de l’institution. Peut-être a-t-il suivi ce dossier au Conseil d’Etat où il officie désormais ? Il reste que dans le cadre d’un dialogue social rénové, cette affaire n’aurait jamais dû être réglée par la plus haute juridiction administrative. L’illégalité était flagrante et l’absurdité de la situation ne l’était pas moins. Le général Denis Favier, ancien commandant du GIGN, sans doute au courant du dossier, aurait peut-être pu s’épargner l’inconvénient d’une annulation publique du refus d’abroger une disposition aberrante, puisqu’il a été nommé à la tête de la Gendarmerie le 10 avril 2013, soit près d’un mois avant le rejet du ministre de l’Intérieur. Mais, non, la machine administrative a poursuivi sur sa lancée.

Cette issue juridique est d’autant plus surprenante que l’abrogation de la disposition illégale ne préjuge en rien de l’ouverture éventuelle d’un droit à l’indemnité spéciale des plongeurs d’intervention.

L’enjeu du litige reste limité. Mais, la nécessité d’avoir eu recours à justice pour les militaires du GIGN, bien conseillés, montre le chemin considérable à parcourir pour mettre en place un véritable dialogue social dans les armées, fondé d’abord sur le droit d’association des militaires en activité de service et sur l’acceptation d’une forme de paritarisme dans la gestion des personnels et dans la rédaction des textes réglementaires qui les encadrent.

 

 Jacques BESSY

Président de l’Adefdromil

Commandant du GSIGN.  1987-1989

Juin 2014

 

Pour lire la décision du Conseil d’Etat  n°370152 du 4 juin 2014 cliquez [ICI]

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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