Prestation compensatoire. Réglementation. Réforme. Perspectives

M. François Baroin appelle l’attention de Mme la ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille, sur les situations dans lesquelles la prestation compensatoire, dans son état actuel, plonge de trop nombreux Françaises et Français.

En effet, la prestation compensatoire a rendu le service attendu à de nombreuses mères de famille ayant été sans profession durant la durée de leur mariage. Cette situation générale appartient au passé.

Aujourd’hui, la majorité des femmes travaillent et les situations des personnes divorcées sont plus complexes et variées.

Parfois, le recours à la prestation compensatoire peut créer de grandes iniquités.

Ainsi, la prestation compensatoire ne prend pas toujours en compte les évolutions professionnelles, sociales, maritales…, des individus dans la période post divorce : des adultes se retrouvent parfois dans des situations de vie très douloureuses du fait du paiement d’une prestation compensatoire alors que l’ex-époux a retrouvé une situation sociale confortable et devrait ne plus en avoir besoin.

Conçue sur un modèle qui ne devrait plus exister comme tel, la prestation compensatoire doit pouvoir redevenir une mesure de protection du plus faible des ex-conjoints, dans un cadre évolutif.

Il semble donc qu’une remise en cause de la prestation compensatoire, dans son contenu actuel, est nécessaire et urgente, étant donné le nombre croissant de divorces et le contexte économique fragile des foyers aujourd’hui.

Il souhaite connaître la position du Gouvernement sur ce sujet.

Texte de la réponse

Créée par la loi n° 75-617 du 11 juillet 1975 portant réforme du divorce, la prestation compensatoire a été modifiée ensuite par les lois n° 2000-596 du 30 juin 2000 relative à la prestation compensatoire et n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce. Elle est destinée à « compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives » des époux et peut être accordée quel que soit le type de divorce prononcé.

Par ailleurs, afin de permettre un règlement définitif des conséquences du divorce et atténuer les risques de contentieux postérieurs, la loi du 30 juin 2000 a posé le principe de la fixation de la prestation compensatoire sous forme de capital, en prévoyant diverses modalités d’exécution. De ce fait, la prestation compensatoire sous forme de rente viagère a été cantonnée à des situations exceptionnelles, correspondant à celles dans lesquelles l’âge ou l’état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins.

Ces lois ont en outre profondément assoupli les conditions de révision des prestations compensatoires versées sous forme de rente fixées avant l’entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000.

Ainsi, sous l’empire de la loi du 11 juillet 1975, la prestation compensatoire fixée sous forme de rente viagère n’était révisable que si l’absence de révision avait des conséquences d’une exceptionnelle gravité pour l’un des conjoints.

Désormais, la révision, la suspension ou la suppression peuvent être demandées, d’une part, pour toutes rentes, sur le fondement de l’article 276-3 du code civil, en cas de changement important dans la situation de l’une ou l’autre des parties, sans toutefois que la révision puisse avoir pour effet de porter la rente à un montant supérieur à celui fixé initialement et, d’autre part, pour les rentes fixées avant l’année 2000, en application de l’article 33-VI de la loi du 26 mai 2004, lorsque le maintien en l’état de la rente serait de nature à procurer au créancier un avantage manifestement excessif au regard des critères posés à l’article 276 du code civil.

Pour l’application de l’article 276-3, la jurisprudence est venue préciser la notion de « changement important » dont la réalité relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.

C’est ainsi que sont notamment pris en compte la nouvelle situation matrimoniale et familiale des parties, tels que le remariage du débiteur ou la naissance d’un nouvel enfant dans son foyer mais aussi le remariage, le pacs ou le concubinage du créancier.

Elle a également admis que la durée et le montant des sommes déjà versées puissent être pris en compte, parmi d’autres éléments relatifs aux patrimoines des ex-époux, pour caractériser un avantage manifestement excessif.

Le régime actuel de la prestation compensatoire est donc satisfaisant et adapté aux évolutions de la société.

S’agissant plus particulièrement des prestations compensatoires sous forme de rente viagère fixées avant la loi du 30 juin 2000, il pourrait être envisagé, afin de rendre le dispositif plus lisible, de consacrer dans la loi la jurisprudence relative à la prise en compte de la durée et du montant des sommes déjà versées.

Source: JO du 30/07/2013 page : 8227

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