Retour d’Afghanistan : « Bombe le torse et sois fort » (Enquête réalisée avec Marion Guérin)

Dossier diplomatique prioritaire pour Hollande, l’« Afgha » est aussi un enjeu humain : les soldats en rentrent cassés et la réacclimatation est difficile.

Adam est sergent-chef dans l’armée française. A son retour d’Afghanistan à l’été 2010, sa mère, Anna, le trouve changé :

« Il était blanc, amaigri, impatient. Même les chansons de son petit garçon l’agaçaient. »

Parents et conjoints sont déboussolés. Adam a fait plusieurs missions à Kaboul. Au retour de la dernière, il sombre dans l’alcool et les idées noires. Son couple explose. Quelques semaines après son arrivée en France, on le ramasse sur une plage près d’Arcachon. Dans le coma. Bourré de médicaments.

Alors que son fils est interné en psychiatrie, Anna épuise ses insomnies sur Internet. Elle pense comprendre que son garçon a subi un stress post-traumatique. Les symptômes : angoisse, violence, dépression. Un syndrome qui affecte de nombreux autres soldats revenus d’« Afgha ».

« Rambo qui se croit de retour dans la jungle vietnamienne »

Pour rassembler les proches vivants au « Suicidistan », du nom d’un documentaire sur la vague de suicides dans l’armée américaine, Anna crée au début de l’année l’association Terre et Paix :

« Certains soldats retournent écorchés vifs dans leurs familles. Ce sont des Cocotte-Minute. Un silence et puis tout explose. »

Cette Cocotte-Minute sera bientôt au calendrier du prochain gouvernement. 83 soldats français tués et près de deux milliards d’euros depuis 2008. François Hollande a promis que le contingent français – plus de 3 000 soldats – serait de retour au pays avant la fin de l’année. Des études américaines disent qu’environ 20% des GI’s rentrent (d’Irak) avec un stress post-traumatique. Aucune statistique de ce type en France. Pourtant, pour Anna :

« Plusieurs centaines de familles vont accueillir un proche traumatisé, violent et suicidaire. »

Le syndrome du stress post-traumatique – ou PTSD dans son acronyme anglais – nourrit beaucoup de fantasmes. La faute à des films tels que « Taxi Driver » (1976) ou plus récemment « Brothers » (2009), qui véhiculent l’image du vétéran alcoolique et « péteur de plombs ».

Le traumatisme se décompose en trois phases :

  • l’évènement traumatisant : en Afghanistan, c’est bien souvent un camarade qui saute sur un IED, ces explosifs artisanaux déclenchés à distance ;
  • la période de latence : de quelques jours à plusieurs mois ;
  • la résurgence : le soldat revit l’horreur. Il cauchemarde éveillé. L’odeur, le son… Tout y est.

Un psychiatre militaire, qui préfère taire son nom (n’étant pas « philosophiquement du même côté » que la ligne éditoriale de Rue89 »), concède une métaphore hollywoodienne :

« On appelle cela la “réminiscence diurne”. C’est Rambo qui se croit de retour dans la jungle vietnamienne. »

La « Grande Muette » à l’écoute

Pour désamorcer le mal-être et atténuer le décalage du retour, l’armée a mis en place à partir de décembre 2009 un « SAS de décompression » à Paphos, sur l’île de Chypre. Trois jours dans un hôtel cinq-étoiles. Piscine, buffet, tables de massage. Une seule mission : « Se reposer ». Et digérer six mois de crapahutage dans la poussière et la caillasse. Techniques de relaxation, relâchement musculaire et sensibilisation au traumatisme sont au programme……

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