Commentaires sur le dialogue social dans les armées (Par François CHAUVANCY)

Ce rapport d’information parlementaire de 116 pages sur le dialogue social auquel  je me suis déjà référé dans un post précédent, a été publié le 13 décembre 2011. Il conclut à 16 propositions. Il reste cependant surprenant de voir le  peu d’échos qu’il a eu, hormis l’association ADEFDROMIL qui a publié une analyse peu nuancée mais intéressante. Je ne sais si le conseil supérieur de la fonction militaire ou si l’un des conseils d’armée évoqueront ce rapport lors de leurs réunions, il n’en reste pas moins que ce document, peut-être insuffisant si je me réfère toujours à ADEFDROMIL… reste d’un réel intérêt à moins que le travail parlementaire n’ait aucune valeur pour nos armées.

L’introduction du rapport rappelle que la mission d’information a été créée pour répondre aux inquiétudes éventuelles des militaires suite aux réformes. Elle spécifie que les organismes de concertation actuels ne répondent pas aux attentes notamment dans le cadre de la restriction des libertés individuelles des militaires et que le risque serait à terme « des formes de contestation plus radicales ».  Cela commence assez fort ! Pourtant pour celui qui s’intéresse à la condition militaire, ce rapport des députés Le Bris (PS) et Mourrut (UMP) est riche avant  tout d’informations sur le fonctionnement de notre institution dans ce domaine.

Une synthèse de ce rapport d’information

Il y est rappelé que le dialogue social au sein des armées est organisé suivant des règles et au sein d’institutions  spécifiques, « définies de façon dérogatoire au droit commun afin de tenir compte des droits et des sujétions spécifiques à la fonction militaire ». En effet, ce «cantonnement juridique » a pour but d’assurer « la  suprématie du pouvoir civil sur le pouvoir militaire », « condition de la démocratie », ainsi que « le respect du principe hiérarchique, condition de l’efficacité de l’armée ». Il restreint donc les possibilités d’expression collective dans les armées qui institueraient un cadre légal incompatible dans leur application aux militaires, y compris en matière de dialogue social. Finalement, le débat tel qu’il est présenté par ce rapport est plutôt celui de l’expression collective des revendications sociales des militaires.

Des dispositifs de dialogue social adaptés au statut des militaires ont donc été progressivement mis en place, ce qui est reconnu dans le rapport mais celui-ci constate un système de plus  en plus déconnecté des attentes des personnels et des  évolutions de la société. Cette déconnection est aggravée par la méconnaissance par les militaires des instances nationales, de leurs membres, par une représentativité peu satisfaisante en raison du seul tirage au sort des  volontaires entraînant notamment une décroissance des volontaires. Un sentiment  grandissant d’impuissance est souligné alors que l’usage d’internet (blogs),  des forums (CF. Le mamouth, sur les réseaux sociaux et les familles) se  développent. A terme, le rapport évoque à terme des risques de « ruptures » sur  les relations entre l’armée et la nation, entre la hiérarchie et le militaire.

Les annexes sont aussi intéressantes avec cette circulaire du ministre de la défense et des anciens combattants du 25 mars 2011 portant une charte de la concertation. Document de référence définissant la nature et le champ de la concertation dans les forces armées, ainsi que les instances qui en sont chargées et leurs modalités de fonctionnement, il définit surtout dans son article 2 ce qu’est la condition militaire :

« La condition militaire recouvre l’ensemble des obligations et des sujétions propres à l’exercice du métier militaire, ainsi que les garanties et les compensations que la Nation estime nécessaire d’apporter aux militaires et à leur famille.

Contribuant de manière déterminante au moral du personnel et, par conséquent, à l’efficacité opérationnelle des forces armées, elle prend notamment en compte les aspects juridiques, économiques, sociaux et culturels susceptibles d’avoir une influence sur, entre autres, l’attractivité du métier des armes et des parcours  professionnels, et les conditions de vie, d’organisation du travail et de  départ des armées. »

Je relèverai cependant une certaine contradiction entre les deux paragraphes. Lorsqu’il est écrit que les garanties et les compensations dépendent de « ce que la Nation estime nécessaire », donc du parlement, je me demande si l’on oserait écrire cela pour les autres catégories  de la fonction publique. Imaginez-vous l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement peu favorable aux militaires, bien sûr un cas d’école, et ses conséquences sur la condition militaire. La hiérarchie militaire serait-elle en mesure de défendre les intérêts de la communauté militaire ?

Une évaluation mitigée des propositions du rapport

Les parlementaires font donc 16 propositions qui m’incitent à réagir. Pour répondre au manque de représentativité, de connaissance du fonctionnement des conseils, au manque aussi d’informations sur les travaux donnés par les membres des conseils, il est donc recommandé de faire…

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Cette publication a un commentaire

  1. Stressé de la souris

    « d’autant que la limitation des opérations extérieures et donc des indemnités dues à ce titre auront sans aucun doute un effet sur la condition militaire »

    Le colonel François Chauvancy, du Centre Interarmées de Concepts, de Doctrines et d’Expérimentations (CICDE) de l’Etat-Major des Armées, est au parfum des réalités.

    PLUS d’OPEX DU TOUT, la France est raide fauchée. Quel que soit le résultat des présidentielles.

    Gageons qu’à la grand’messe du CICDE demain mercredi à l’Ecole Militaire, il faudra lire entre les diapos, nonobstant la note récente du Major Général des Armées relative à l’usage abusif du PauvrePoint, la confection immodérée de diapositives n’ayant apparemment même plus le mérite de meubler le temps des brevetés d’Etat-Major.
    Merci Mon Général de Villiers d’avoir constaté par écrit cette triste réalité.

    Le Mamouth et quelques autres vont bien se glisser dans l’amphi du CICDE afin de contribuer au décodage !

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