MORTS POUR LA FRANCE: LE TÉMOIGNAGE D’UNE FAMILLE (Par Emilie Blachere – Paris Match)

Sandrine Vermeille a posé les mains en coupe sous son ventre rond. Parfois elle l’effleure, le couvre. Il arrive qu’elle le caresse. Comme pour soutenir et protéger l’enfant qu’elle porte. Ce sera un garçon. Il devrait venir au monde le 25 juillet… Sandrine a noué ses cheveux blonds en queue-de-cheval, une coiffure qui accentue les traits de son long visage. Dans le silence, elle a baissé les yeux. Elle semble fixer le sol. Mais quand elle nous parle, elle redresse la tête et nous regarde. Regard bleu clair, douloureux. Sans haine, sans fureur, mais si douloureux.

« Je suis chez ma mère depuis le 25 juin, dit-elle dans un souffle. Je ne veux pas accoucher toute seule. » Sa mère, Elisabeth, est assise près d’elle, ainsi que son beau-père, Laurent, pudique, mutique. Soudain, les larmes viennent troubler le regard bleu, et Sandrine s’efforce de les retenir. Ne pas pleurer. L’effort est violent. Elle se raidit, assise bien droite sur le canapé d’angle du salon. Elle veut parler de Sébastien, son mari mort en Afghanistan, il y a quatre jours. Un instant, elle jette un coup d’œil en direction de l’escalier. A l’étage, son fils aîné, Mathys, 7 ans, joue avec Guillaume, le frère de Sandrine. Celui-ci veille sur l’orphelin. « Mathys sait tout », lâche la jeune femme. Sa mère renchérit : « C’est un petit garçon très intelligent, très mûr, trop peut-être… » Et c’est elle, Elisabeth, qui raconte cette scène que redoutent toutes les femmes de soldats. Le coup de sonnette, l’officier de haut rang figé sur le seuil… Le mercredi 13 juillet, c’est le général Le Garrec qui est entré dans la cour de cette vieille bâtisse réaménagée. Dès qu’il l’a vu, Mathys a deviné le drame. Il s’est mis à sangloter, et sa mère a compris. Sébastien ne reviendra pas.

Sandrine est pétrie de douleur, tétanisée par la perspective d’un avenir sans lui. Autour de nous, un silence embarrassant et douloureux. Les gloussements des deux furets enfermés dans une grande cage sortent Sandrine de son mutisme : « Le gros, c’est Tequila, un mâle de 1 an. La petite, c’est Choupi, la femelle ; elle a 3 ans. Ce sont les animaux de Sébastien. » Puis, d’une voix émue, tremblante, elle raconte : « C’était un bon bricoleur, un fin cuisinier, un super jardinier… C’est… c’était, reprend-elle, un mari formidable. Mais avant tout, c’était un soldat, un militaire. » Comme elle.

Son histoire avec Sébastien débute par un coup de foudre. Il y a dix ans, ils se rencontrent à Bourges, au centre ­d’information et de recrutement de l’armée de terre (Cirfa). Lui rêve de….

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