Femmes/Hommes : la violence conjugale (par Myriam LASRY, Avocat au Barreau de Paris)

La nouvelle loi du 9 juillet 2010

par Myriam LASRY, Avocat au Barreau de Paris

« Rien ne se produit sans un mouvement initial » (Albert EINSTEIN).

Il faut parfois du temps, de la patience et beaucoup de souffrance pour que les ténèbres de l’esprit, l’aveuglement instinctif, et les radicalités sourdes ou barbares de la violence laissent place aux lumières calmes et puissantes de la raison, à la civilité paisible, et au bel équilibre des forces de vie entre les êtres.

Une Loi juste et forte a le pouvoir d’accélérer ce processus, d’éduquer et relever les consciences.

Ainsi les dispositions adoptées le 9 juillet 2010 dans le cadre de la loi n°2010 – 769 du 9 juillet 2010 « relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants » s’inscrit de plain pied dans la société de progrès qui est la nôtre, dans la belle aventure de l’égalité ou tout au moins de l’équilibre entre hommes et femmes.

Dans notre paysage de lois spéciales, a été instaurée une protection renforcée des victimes de violences conjugales en ménageant une notion extensive du couple : divorcé, pacsé ou de fait, y compris de ce qu’il en reste après sa rupture.

Le Juge aux Affaires Familiales voit ses prérogatives élargies puisqu’il peut adopter des mesures civiles et pénales, prendre une Ordonnance protection prescrivant des mesures en urgence dans le cadre de l’article 515-11 du Code Civil « s’il estime au vu des éléments produits devant lui et contradictoirement débattus qu’il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblable la commission des faits de violence allégués et le danger auquel la victime est exposée ».

Les nouvelles dispositions garantissent plus efficacement l’éloignement du conjoint violent ou un relogement assorti de la confidentialité, des dispositions d’accueil pour les enfants, un accompagnement par des personnes qualifiées.

La protection vise tout autant les violences physiques que psychologiques. Le harcèlement moral est désormais reconnu en matière conjugale.

La nouvelle loi qui agit par capillarité dans de très nombreuses dispositions de notre droit civil et pénal concerne également l’éducation, l’habitation, le travail, tout autant que le séjour des étrangers et le droit d’asile.

Ainsi peu importe la nationalité de la victime et son statut, certaines réserves traditionnelles du droit des étrangers ont disparu eu profit d’une protection accrue dés lors qu’elle demeure sur le territoire français,

Le législateur a tenu compte des pratiques et coutumes étrangères que les femmes peuvent subir en France et partout dans le monde : ainsi le dispositif vise à les protéger contre les mariages forcés et assouplit les démarches d’obtention d’un titre de séjour en cas de violences.

Notre approche ne se veut ni didactique ni exhaustive – le lecteur averti pourra se reporter au texte – mais analytique en ce qui concerne tant le sujet qu’elle traite ( I ) que le rôle précieux de l’avocat dans cet édifice ( II ).

I/ HOMMES-FEMMES : L’EGALITÉ DES TEXTES ?

L’égalité est un sujet de fond et de forme qui n’en finit pas de tourmenter nos sociétés modernes.

Il s’agit d’une notion plus complexe qu’il n’y parait, une équation faussement simple à deux termes mais à plusieurs inconnues, dont la logique est fuyante et l’évidence trompeuse.

Privilégier l’égalité, parfois de manière expéditive et idéologiquement consensuelle, aboutit à des situations paradoxales de déséquilibre parce que les parties ne sont pas comparables, ayant des identités, des besoins et des spécificités bien distincts.

C’est la raison pour laquelle il nous semble qu’avant de s’enfermer dans des concepts qui risquent de devenir totalitaires parce que nul ne les a bien compris, il parait plus judicieux de raisonner en termes d’équilibre.

Il en va ainsi de la place de l’homme et de la femme : pour les faire vivre en sécurité entre eux malgré leurs antagonismes obscurs et intemporels, il convient de favoriser un équilibre et de protéger par priorité la partie affectée du plus faible coefficient force/ autonomie.

La nouvelle loi privilégie ostensiblement la protection des femmes ce qui pourrait être considéré comme un traitement de faveur mais chacun sait et ressent que les violences perpétrées contre elles depuis toujours, sont spécifiques tant en raison de leur sexe, vulnérable au sens réel et charnel du terme, que de leur faiblesse morphologique, de leur condition culturelle et économique partout dans le monde y compris en France.

Chacun garde à l’esprit les drames de la passion, Marie Trintignant victime d’un trop plein d’amour ou de folie, de la jalousie ou de l’emprise aveugles, de l’égarement des corps et des esprits.

Existe aussi la violence brute, dépourvue d’amour, seul exutoire d’une haine incontrôlée contre les femmes, tout simplement.

Le temps était venu d’octroyer à ces victimes faciles, une part de justice en plus.

Organiser le sauvetage, dresser des remparts, faciliter la fuite. Pour la mieux protéger, il fallait donc désigner expressément la femme en tant que telle, dans le titre et dans le texte, la nommer enfin, cette victime originelle de la culture et de la nature, ce bouc émissaire de l’impuissance phallique qui renvoie l’homme aux terreurs archaïques de l’altérité, de l’incomplétude et de la castration (1)

Lui consacrer le droit à être faible et pointer le curseur là où cela fait mal depuis tant d’années, depuis la nuit des temps.

A- LE CURSEUR SEMANTIQUE – L’INEGALITE TEXTUELLE AU SERVICE D’UN EQUILIBRE DU SOCLE SYMBOLIQUE

La question des violences dans le couple et surtout celles qui s’exercent contre les femmes conduit à quitter l’angélisme de la notion d’ égalité sous prétexte que certains acquis et de nombreux droits ont vu le jour depuis une soixantaine d’années.

Président encore à l’indigence de certains rapports de couple, des facteurs sociologiques et économiques ; aussi, et surtout, des déséquilibres intrinsèques et profonds, des situations de faiblesse psychique ou encore de peurs trop souvent liées à des conditionnements ancestraux dont l’homme le plus moderne et tout autant la femme, ont du mal à s’extraire (2) Penser le contraire serait faire œuvre de déni. Or le diable est dans le déni.

Les avocats, travaillent pour renverser ce diable, l’extraire des réalités cachées, des apparences lisses et des détresses muettes…

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