Question écrite n° 06082 de M. Jacques Le Nay (Morbihan – UC) publiée dans le JO Sénat du 12/07/2018 – page 3426
M. Jacques Le Nay attire l’attention de M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur, sur les rémunérations et le temps de travail dans la police et la gendarmerie nationales. Dans un référé du 13 mars 2018, la Cour des comptes a alerté le Premier ministre sur la nécessité d’instaurer une vigilance renforcée sur l’indispensable cohérence de l’ensemble des mesures d’effectifs et de rémunérations susceptibles d’avoir un impact sur l’évolution de la masse salariale dans la police et la gendarmerie, afin que celle-ci soit compatible avec la trajectoire financière de la mission « sécurités » prévue par le Parlement. Le premier président de la Cour recommande notamment de mettre en place à partir de 2019 un suivi rigoureux au niveau central des cycles horaires résultant de la mise en conformité avec le droit communautaire de l’organisation du temps de travail dans les services de police et dans les unités de gendarmerie, afin d’en mesurer l’impact sur le potentiel opérationnel des deux forces et d’en maitriser toutes les conséquences budgétaires. Il lui demande si le Gouvernement compte mettre en œuvre cette préconisation.
Transmise au Ministère de l’intérieur
Réponse du Ministère de l’intérieur publiée dans le JO Sénat du 17/01/2019 – page 316
Par courrier du 13 mars 2018, la Cour des comptes a adressé au Premier ministre un référé relatif aux rémunérations et au temps de travail dans la police et la gendarmerie nationales. Dans ce document, la Cour prescrivait, dans sa 2ème recommandation, la mise en place d’un suivi rigoureux, au niveau central, des cycles horaires résultant de la mise en conformité avec le droit communautaire de l’organisation du temps de travail dans les services de police et dans les unités de gendarmerie. Comme l’a noté la Cour dans son référé, « la réglementation sur le temps de travail dans la fonction publique ne s’applique pas aux militaires de la gendarmerie, assujettis à l’obligation de disponibilité en tout lieu et en tout temps, en application du code de la défense ». Ainsi, des travaux sont actuellement en cours entre la France et la Commission européenne afin de tenir compte de la spécificité du statut militaire et de l’organisation du service pour l’application de la directive européenne sur le temps de travail (DTT) de 2003. Pour autant, la gendarmerie a pris des dispositions internes depuis septembre 2016 qui visent à faire bénéficier tout militaire de la gendarmerie d’une période de repos physiologique journalier de onze heures consécutives par période d’activité de vingt-quatre heures. Par ailleurs, au regard de la notion de disponibilité, consubstantielle de l’état de militaire, le temps de travail est dissocié en temps d’activité et en temps d’astreinte pour chaque journée d’emploi. Les applications de commandement et de suivi du service en gendarmerie comportent ainsi des données relatives aux temps d’activité et d’astreinte. Un suivi régulier de la mise en œuvre de cette mesure est organisé par l’administration, grâce à l’exploitation des données de deux systèmes d’information : Pulsar, pour la gendarmerie départementale, Pulsar GM, pour la gendarmerie mobile. Ils offrent ainsi une vision globale de l’activité des militaires de la gendarmerie, permettant d’être en adéquation avec la recommandation de la Cour des comptes. Ces dispositions prévoient toutefois des situations de dérogation et d’exclusion afin de maintenir la capacité d’engagement de la gendarmerie en cas de crise. Elles garantissent la pérennité du fonctionnement de l’institution et préservent un modèle fondé sur un engagement des personnels en fonction du besoin opérationnel constaté. S’agissant de la police nationale, il convient en premier lieu de rappeler que, dans un souci de modernisation de la gestion des ressources humaines, une réforme des cycles de travail a été engagée en 2014 avec pour objectif de mieux répondre aux attentes des personnels (conciliation vie privée-vie professionnelle) et de mieux prévenir les risques psycho-sociaux, tout en maintenant le potentiel opérationnel des services. Cette réforme s’imposait également au regard du droit européen en matière de santé et de sécurité au travail (directive 2003/88/CE en date du 4 novembre 2003 concernant certaines aspects de l’aménagement du temps de travail) car certains cycles de travail n’étaient pas conformes aux normes européennes. En effet, la transposition en droit interne de cette directive ayant été contestée sur le plan juridique au niveau européen, un décret du 30 janvier 2017 a repris l’ensemble des prescriptions de la directive, qui s’appliquent dorénavant aux policiers. Les différentes instructions générales relatives à l’organisation du travail dans la police nationale (IGOT) ont également été modifiées. L’ensemble des textes régissant les cycles de travail dans la police nationale sont dorénavant en conformité avec le droit communautaire. La réforme a fait l’objet d’une vaste concertation avec les organisations syndicales représentatives, tant au niveau central que territorial, en particulier dans le cadre des comités techniques. Un arrêté portant organisation du temps de travail (APORTT) est toutefois encore nécessaire afin d’assurer l’application du décret du 30 janvier 2017 précité. Son élaboration est en cours. Le dialogue social se poursuit sur ce sujet et se conclura au premier semestre 2019, pour une application du nouvel arrêté portant sur l’organisation du temps de travail à partir du second semestre 2019. L’organisation du travail dans la police nationale sera alors pleinement conforme au droit européen.
Source: JO Sénat du 17/01/2019 – page 316