Question écrite n° 05978 de M. Henri Leroy (Alpes-Maritimes – Les Républicains)
publiée dans le JO Sénat du 05/07/2018 – page 3299
M. Henri Leroy attire l’attention de M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur, sur les conditions d’acquisition de la nationalité française.
Il s’étonne qu’un enfant né en France de parents étrangers, remplissant une condition de résidence, puisse acquérir la nationalité française à ses 18 ans, et ce de façon automatique. La nationalité n’est pas une pochette surprise que l’on reçoit à sa majorité, mais une qualité qui se mérite et qui se demande. Personne ne doit pouvoir intégrer notre grande et belle communauté nationale sans en exprimer la volonté.
Une loi n° 93-933 du 22 juillet 1993 réformant le droit de la nationalité, abrogée quelques années plus tard, imposait au jeune étranger, répondant aux critères légaux de résidence, qu’il ait à effectuer une démarche active et volontaire pour devenir français.
D’une manière générale, ce sont les lois votées sous le ministère du gaulliste Charles Pasqua qui mériteraient d’être rétablies. En effet, ce grand ministre de l’intérieur avait réussi, par une action ferme et courageuse, à redonner du sens et ses lettres de noblesse à la citoyenneté française.
Lorsqu’à l’occasion de la discussion du projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif
et une intégration réussie, modifié par le Sénat le 26 juin 2018, il avait, par voie d’amendement, proposé le retour aux règles d’acquisition de la nationalité de 1993, le ministre de l’intérieur lui a répondu que de telles dispositions ne devaient pas trouver leur place dans un projet de loi ayant pour objet les questions d’asile et d’immigration, mais dans un texte spécifique portant sur la nationalité.
Par conséquent, il lui demande, d’une part, son avis au fond sur la disposition qu’il a proposée, consistant pour un jeune étranger à devoir manifester sa volonté pour devenir français et, d’autre part, les réformes qu’il entend proposer pour revaloriser la citoyenneté française.
Transmise au Ministère de la justice
Réponse du Ministère de la justice publiée dans le JO Sénat du 27/12/2018 – page 6799
Il résulte de l’article 21-7 du code civil que l’enfant né en France de parents étrangers acquiert la nationalité française à sa majorité si, à cette date il a sa résidence en France et s’il a eu sa résidence habituelle en France pendant une période continue ou discontinue d’au moins cinq ans, depuis l’âge de onze ans. Si l’acquisition de la nationalité française par naissance et résidence en France s’opère de plein droit à la majorité, sans déclaration de nationalité française à formaliser, il n’en demeure pas moins que la délivrance d’un certificat de nationalité française sur le fondement de l’article 21-7 du code civil implique une démarche positive de l’intéressé, qui devra justifier, par la production de divers documents (certificats de scolarité notamment) des conditions relatives à la résidence en France : au moment de la majorité et durant la période antérieure à la majorité sur une période continue ou discontinue de cinq ans entre l’âge de onze et dix-huit ans. En toute hypothèse, il résulte de l’article 21-11 du code civil qu’entre 13 et 18 ans l’acquisition de la nationalité procède d’une déclaration dans les formes de l’article 26 et suivants du code civil. Dans la très grande majorité des cas (84 % en 2017), les déclarations sont souscrites pour une acquisition anticipée entre 13 et 16 ans. Entre le 1er janvier 1994, date d’entrée en vigueur de la loi du 22 juillet 1993 qui avait prévu une manifestation de volonté des jeunes âgés de 16 à 21 ans pour acquérir la nationalité française et la loi n° 98-170 du 16 mars 1998 relative à la nationalité qui a instauré l’article 21-7 du code civil dans sa rédaction actuelle, il est apparu que la très grande majorité des jeunes intéressés demandait à acquérir la nationalité française, cette démarche étant opérée assez tôt entre 16 et 18 ans et « qu’environ 10 à 15 % des jeunes susceptibles d’acquérir la nationalité française selon cette procédure ne l’auraient pas demandée, mais parmi ceux qui se sont abstenus de toute démarche, il est impossible de distinguer ceux qui n’auraient pas été en mesure de manifester leur volonté faute d’information par exemple, de ceux qui refusent délibérément de devenir Français ». (v. rapport n° 162 de M. Christian Bonnet Sénateur sur le projet de loi relatif à la nationalité déposé le 10 décembre 1997).
Source: JO Sénat du 27/12/2018 – page 6799