Question écrite n° 07908 de Mme Vivette Lopez (Gard – Les Républicains)
publiée dans le JO Sénat du 29/11/2018 – page 5978
Mme Vivette Lopez attire l’attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l’inquiétude des associations et organismes signataires qui dénoncent les obstacles dans l’accès au juge que le projet de loi n° 1349 (Assemblée nationale, XVe législature), adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice porte en son article 4 et qui rendent la représentation par un avocat obligatoire pour les contentieux de la sécurité sociale et de l’aide sociale.
Malgré les alertes, en vain, des associations d’accidentés de la vie, de victimes du travail, de personnes en situation de handicap, de malades chroniques, la réforme pourrait avoir des conséquences néfastes pour les justiciables les plus précaires et les plus éloignés de la justice sociale.
Ainsi, au prétexte d’un « meilleur fonctionnement de la justice », toutes ces populations seraient, désormais, obligées de prendre un avocat dans la mesure où elles souhaiteraient faire appel d’une décision défavorable de première instance.
Par ailleurs, il est probable que l’aide juridictionnelle ne puisse jamais financer cette réforme, aucune étude d’impact n’ayant été présentée, ni aucun chiffre ou encore aucune évaluation.
Enfin, alors que les syndicats ont obtenu le statut de « défenseur syndical », le statut de « défenseur social » devant les juridictions d’appel serait refusé aux grandes associations reconnues d’utilité publique pour continuer à accompagner les assurés en situation de handicap ou les plus pauvres devant la « nouvelle » juridiction sociale.
Cette réforme ne participerait donc pas à un véritable accès à la justice pour les populations les plus éloignées aujourd’hui des juridictions sociales.
Aussi, elle lui demande comment elle entend répondre à ces inquiétudes et renouer avec le principe fondamental de la justice sociale qui serait menacé par cette réforme.
Réponse du Ministère de la justice publiée dans le JO Sénat du 27/12/2018 – page 6803
Devant les tribunaux de grande instance spécialement désignés pour statuer à compter du 1er janvier 2019 sur le contentieux de la sécurité sociale et de l’aide sociale, la procédure restera orale et sans représentation obligatoire. Il s’agit, en effet, de permettre au justiciable, le cas échéant assisté ou représenté dans des conditions souples définies aux articles L. 142-9 du code de la sécurité sociale et L. 134-4 du code de l’action sociale et des familles, de faire valoir ses arguments et verser aux débats les pièces utiles au soutien de la contestation d’une décision d’un organisme de sécurité sociale ou d’une autorité administrative. En revanche, en appel, le litige doit se concentrer sur les questions de droit. Il est par conséquent dans l’intérêt du justiciable d’être représenté par un avocat qui a une connaissance de la procédure d’appel et du contentieux de la sécurité sociale, enjeu essentiel du litige. Enfin, le justiciable pourra, sous réserve de relever des plafonds prévus par la loi, bénéficier d’une aide juridique totale ou partielle. Pour l’ensemble de ces raisons, le projet de loi de programmation et pour la réforme de la justice instaure à compter du 1er janvier 2020 la représentation obligatoire devant les cours d’appel spécialement désignées en matière de sécurité sociale et d’aide sociale. Les associations de mutilés et invalides du travail, celles œuvrant dans les domaines des droits économiques et sociaux des usagers ainsi que dans ceux de l’insertion et de la lutte contre l’exclusion et la pauvreté conserveront en revanche le rôle important qui est le leur en première instance aux côtés des justiciables les plus en difficulté.
Source: JO Sénat du 27/12/2018 – page 6803