Commission de la défense nationale et des forces armées
Présidence de M. Jean-Jacques Bridey, président
— Audition du général Richard Lizurey, directeur général de la gendarmerie nationale, sur le projet de loi de finances pour 2019.
La séance est ouverte à dix-sept heures.
M. le président Jean-Jacques Bridey. Mes chers collègues, je suis heureux d’accueillir le général Richard Lizurey, directeur général de la gendarmerie nationale, sur le projet de loi de finances pour 2019.
Je veux tout d’abord vous remercier, Mon général, d’avoir accueilli une délégation de députés au Centre national d’entraînement des forces de gendarmerie (CNEFG) de Saint-Astier au mois de mai dernier, et d’en avoir invité certains à prendre part à des stages en immersion en Guyane.
Je vous donne maintenant la parole pour un propos liminaire, avant que les députés qui le souhaitent ne vous posent quelques questions.
Général Richard Lizurey, directeur général de la gendarmerie nationale. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je suis ravi de me trouver devant vous cet après-midi afin d’évoquer le projet de loi de finances pour 2019 et, au-delà, l’évolution de la gendarmerie nationale au cours des années à venir. La gendarmerie nationale a été placée sous la tutelle du ministère de l’Intérieur en 2009 – il y a presque dix ans –, et le bilan que l’on peut faire de cette migration de la défense vers l’intérieur m’apparaît positif, à la fois en termes d’évolution, de positionnement et de prise en compte de la gendarmerie dans l’architecture de la sécurité intérieure. Aujourd’hui, bien qu’ayant été intégrée à un autre ministère que celui auquel elle était initialement rattachée, la gendarmerie a conservé l’état d’esprit lié à son statut militaire, et tout ce qui fait la spécificité de son personnel, à savoir une certaine rusticité et une grande efficacité. Il est bon de souligner ce point, car en 2009 les choses ne semblaient pas gagnées d’avance et nous avions quelques légitimes inquiétudes.
Nous devons faire en sorte que ce qui apparaît aujourd’hui comme une réussite continue à l’être dans les années à venir. Pour cela, différents projets ont été engagés et d’autres le seront prochainement, notamment en termes de mutualisation des forces de sécurité intérieure. Dans ce domaine, nous avons mis en place un certain nombre d’organismes communs et d’unités de coordination, ainsi que des partages de connaissances et des perspectives communes. L’ensemble constitué par NéoGend et NéoPol est le premier outil nativement partagé entre les forces de police et de gendarmerie – elles utilisent exactement la même version – qui permet à chaque personnel d’emporter son bureau sur le terrain.
L’effort de mutualisation est appelé à se poursuivre, notamment dans le cadre de deux projets : la direction du numérique du ministère de l’Intérieur, d’une part ; le service ministériel des achats, qui a vocation à regrouper l’ensemble des achats effectués par le ministère, d’autre part.
Le troisième grand axe de transformation est celui de la mutualisation des services techniques et scientifiques de la police et de la gendarmerie. Au sein de chaque département, un certain nombre de plateaux auront ainsi vocation à être regroupés soit physiquement, soit fonctionnellement, afin de gagner en efficacité.
Nous devons nous inspirer des expériences réussies du passé pour continuer, au cours des prochaines années, à travailler dans une coopération toujours accrue. À l’été 2018, nous avons fait notre entrée à la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), ce qui a constitué un grand moment, car jusqu’alors la gendarmerie nationale n’y avait aucun représentant. La présence de deux officiers de gendarmerie au sein de la DGSI – c’est un début – marque le début d’un travail collaboratif en matière de renseignement, à la fois dans le haut du spectre, en son milieu – avec le renseignement territorial – et pour ce qui est du renseignement quotidien, au niveau local.
En matière de renseignement territorial, nous bénéficierons à partir de 2019 de transferts d’effectifs, à hauteur de 27 équivalents temps plein (ETP) par an – 54 en 2019, où nous obtiendrons le bénéfice simultané de deux annuités – en provenance du programme 176 « Police nationale », ce qui nous permettra d’augmenter le nombre de gendarmes affectés au dispositif de renseignement territorial. Une dynamique est enclenchée, grâce à laquelle le renseignement territorial est maintenant un outil partagé, permettant aux forces de sécurité intérieure d’être plus efficaces.
Pour ce qui est de la lutte contre le terrorisme, nous poursuivons le travail engagé contre la radicalisation, et avons dans ce domaine des objectifs en commun avec nos services partenaires.
En ce qui concerne la lutte contre l’immigration irrégulière, nous sommes dotés d’un dispositif mis en place à proximité de la frontière italienne – où un petit incident a eu lieu il y a quelques heures –, dans le Calaisis, mais aussi à la frontière espagnole, où le flux croissant d’immigrés nous oblige à renforcer nos effectifs. Aujourd’hui, environ six escadrons sont affectés à cette mission, en plus des personnels de la gendarmerie départementale des zones concernées.
La lutte contre la délinquance se poursuit, et nous affichons actuellement de bons résultats en matière de lutte contre les atteintes aux biens, avec une diminution d’environ 6 % du nombre de cambriolages constatés dans notre zone de compétence. Nous faisons en sorte de maintenir notre présence sur le terrain afin d’être en mesure de lutter contre les grands groupes criminels organisés – notamment ceux provenant d’Europe de l’est –, grâce à l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI).
Par ailleurs, nous sommes très satisfaits des résultats que notre dispositif d’analyse décisionnelle, récemment mis en fonction, nous permet d’ores et déjà d’obtenir. En alimentant en données relatives à la criminalité, au contexte socio-économique, mais aussi à la météorologie et à toutes sortes d’autres domaines, une application fonctionnant grâce à un algorithme, nous obtenons une sorte de « carte des températures » de la délinquance. À l’issue d’une expérience menée pendant un an dans onze départements, nous avons constaté que le résultat obtenu dans les départements concernés en matière de cambriolage a été meilleur que dans tous les autres. Sur la base des informations fournies par le dispositif d’analyse décisionnelle, qui indique où et dans quel créneau horaire des cambriolages sont le plus susceptibles de se produire, le commandement local peut organiser ses patrouilles en concentrant les effectifs là où ils sont le plus utiles. Les compagnies de gendarmerie disposent ainsi d’un outil de prévision qui les aide dans leur conception de service – sans être pour autant contraints de suivre les orientations suggérées par la machine, évidemment.
Par ailleurs, nous poursuivons notre logique de modernisation dans le domaine de la recherche, dans le cadre d’une démarche de valorisation et d’innovation. Ainsi, nos ateliers de performance (ADP) font appel aux propositions de chacun de nos personnels en matière d’innovation. Nous mettons également en œuvre une politique de valorisation, dans le cadre de laquelle nous déposons cinq ou six brevets par an. Pour deux de ces brevets, nous nous sommes mis en relation avec un industriel qui, en contrepartie de leur utilisation, nous verse des royalties et nous fait bénéficier d’un prix plancher sur la vente des produits qu’il fabrique.
Pour cela, nous avons travaillé en liaison avec l’Agence du patrimoine immatériel de l’État (APIE) et avons eu recours aux services d’un cabinet d’avocat ; nous avons aussi bénéficié du détachement d’ingénieurs de l’armement – le délégué général de l’armement m’a récemment confirmé que cela continuerait à être le cas à l’avenir –, qui nous apportent en interne toute l’ingénierie dont nous avons besoin dans nos relations avec l’industriel, rendant possible cette valorisation de l’innovation qui ne faisait pas partie de nos pratiques il y a quelques années. Nous avons, enfin, engagé des démarches en vue de l’obtention de financements européens.
Le budget pour 2019 est satisfaisant, dans la mesure où il traduit un engagement très fort du ministre de nous fournir un certain nombre de moyens. En termes d’effectifs, conformément aux orientations du plan 2 500, le schéma d’emplois affiche un solde net de plus 643 personnels qui, à l’exception des 36 personnels affectés au soutien, pourront tous être engagés sur le terrain, au sein des unités territoriales – cet engagement des forces au contact constitue notre priorité depuis deux ans.
Pour ce qui est des effectifs de réservistes, le budget prévoit 98 millions d’euros destinés à nous permettre de maintenir 30 000 personnels. En 2018, nous avons été obligés d’effectuer une régulation. En effet, pour ne pas dépasser ce que prévoit la loi de finances initiale en termes de masse salariale, les deux seuls outils de régulation dont je dispose sont, d’une part, le décalage d’un mois et demi de l’entrée des élèves en école de gendarmerie, d’autre part, les crédits de la réserve. Cela dit, pour 2018, le ministre a obtenu une autorisation d’engagement supplémentaire de 19 millions d’euros afin de permettre d’employer le même nombre de réservistes que celui de 2017, à savoir 2 700 par jour en moyenne – ce chiffre était descendu à 1 800 en début d’année, mais le ministre a souhaité qu’il remonte à 2 700 à partir du 1er septembre. En pratique, nous convoquons depuis septembre des réservistes que nous ne paierons qu’en 2019, en accord avec la direction du budget – un dispositif qui nous a permis de relancer l’engagement des réservistes.
Au sujet de la réserve, je veux également mentionner une modification du système de paiement. À compter du 1er janvier 2019, nous allons mettre en place un dispositif visant à solder à la fois les personnels d’active et les personnels de réserve et s’appuyant sur notre système d’information ressources humaines (SIRH) Agorh@, qui regroupe la totalité des informations portant sur les militaires concernés – nous sommes en train d’en fiabiliser les données. Ce SIRH va servir de calculateur pour la solde de l’ensemble des militaires à compter du 1er janvier 2019. Les tests auxquels il a été procédé durant deux mois, avec des opérations de solde en double, n’ont mis en évidence que très peu d’erreurs, et celles qui sont apparues sont déjà réglées, ce qui me permet d’être très confiant quant au déploiement de ce nouveau dispositif au début de l’année prochaine.
Le fait que les réservistes soient payés grâce à la même application que les personnels d’active va leur permettre de percevoir leur solde plus rapidement – en effet, il fallait jusqu’alors deux à quatre mois pour que le règlement de la solde d’un réserviste soit effectué. Au cours d’une année donnée, on payait les deux derniers mois de l’année précédente, puis les dix premiers mois de l’année en cours. Passer sans aménagement au nouveau dispositif, où les soldes sont réglées sans décalage, nous aurait donc conduits à régler quatorze mois de soldes en 2019, puisqu’en plus des douze mois de solde de l’année 2019, réglés immédiatement, nous aurions également dû régler les deux derniers mois de 2018. Afin d’y remédier, nous avons obtenu que le budget pour 2019 prévoie 17 millions d’euros supplémentaires – n’ayant évidemment pas vocation à être renouvelés –, qui vont nous permettre de faire face à la modification du calendrier de paiement qu’entraîne la mise en œuvre du nouveau dispositif technique.
Hors titre 2, nous avons bénéficié du « coût de sac à dos » des effectifs créés, ce qui n’avait pas été le cas dans le budget pour 2018, et 13,6 millions d’euros sont également destinés au fonctionnement de la réserve. Ces crédits vont nous permettre d’envisager le renouvellement de notre flotte de véhicules, grâce à l’achat de 2 800 véhicules ; nous allons également pouvoir faire l’acquisition de gilets pare-balles pour des quantités au moins équivalentes à 2018 et rénover un certain nombre de casernes. Les programmes immobiliers vont bénéficier de 105 millions d’euros, dont 15 millions d’euros pour la sécurisation des casernes, ce qui s’inscrit dans une trajectoire amorcée l’année dernière et qui me semble nécessaire, car l’immobilier constitue une préoccupation essentielle pour l’ensemble de nos personnels.
Parallèlement, nous faisons évoluer notre politique en matière de ressources humaines, d’abord en mettant en place de nouvelles modalités de recrutement. Il existe aujourd’hui deux concours, organisés respectivement en mars et en octobre, et pour lesquels certaines épreuves – je pense notamment aux tests psychologiques – se font à l’ancienne, sur papier. Nous travaillons actuellement à la mise en place d’un seul concours en octobre, avec une dématérialisation totale des épreuves – qui, outre qu’elle va nous permettre d’économiser 60 tonnes de papier, va également faciliter la correction. Le prochain concours sera donc organisé en septembre 2019. Si nous avons décidé d’en supprimer un, c’est que nous avions constaté qu’un certain nombre de candidats attendaient jusqu’alors douze à quatorze mois avant d’être intégrés, ce qui provoquait une « évaporation » non négligeable parmi les candidats : bon nombre d’entre eux se désistaient avant leur incorporation. Nous avons donc décidé d’écouler le stock de candidats agréés, avant d’en sélectionner de nouveaux qui, eux, seront intégrés peu de temps après avoir été reçus au concours.
Nous allons également modifier le contenu de la formation dispensée aux nouvelles recrues, en continuant à mettre l’accent sur ces aspects spécifiques que sont le contact, la résilience, l’endurance, la confrontation à la mort et à la difficulté : en d’autres termes, nous voulons travailler le savoir-être plus que les connaissances. En effet, ces connaissances étant aujourd’hui facilement accessibles à partir de l’outil NéoGend, il est inutile de les apprendre par cœur, d’autant que les lois changent tous les jours – vous êtes bien placés pour le savoir !
En ce qui concerne les ressources humaines, nous avons mis en place un dispositif d’avancement semi-automatique, ainsi qu’un nouveau dispositif d’enseignement du second degré – nous avons pour cela modifié toute la partie relative à l’École de guerre, et introduit une notion de mobilité des officiers supérieurs. Je considère pour ma part qu’un officier supérieur de qualité doit avoir servi à l’extérieur de la maison. Si cette exigence n’est pas statutaire, elle me paraît souhaitable en ce qu’elle permet à l’officier concerné de voir autre chose, de rencontrer des personnes ayant une autre vision, et de revenir enrichi de l’expérience ainsi accumulée, donc meilleur. Je rappelle que le taux de féminisation des effectifs de la gendarmerie s’établit actuellement à 19 % et qu’il augmente d’un point par an depuis plusieurs années – ce qui fait que l’on commence à voir arriver des personnels féminins dans les strates de commandement, dont la proportion est appelée à augmenter dans les prochaines années.
Mme Aude Bono-Vandorme, rapporteure pour avis des crédits de la gendarmerie nationale. Le budget présenté par le ministre de l’Intérieur pour la gendarmerie nationale est marqué par une hausse de crédits de paiement de près de 118 millions d’euros hors compte d’affectation spéciale (CAS) « Pensions ». Cette hausse exprime tout autant une véritable reconnaissance pour le remarquable travail accompli quotidiennement par nos gendarmes que pour la place stratégique occupée par la gendarmerie parmi les forces de sécurité intérieure.
Je fais partie de ceux qui croient à la nécessité de sanctuariser les budgets afin de fournir une visibilité à moyen terme aux responsables dont vous faites partie. Aussi, j’ai la conviction qu’il est important que le ministère de l’Intérieur se dote d’une loi de programmation, à l’instar de tous les ministères régaliens – le ministère des Armées l’a fait et le ministère de la Justice s’y prépare. Cette loi doit être l’aboutissement d’un travail et d’une vision collective, c’est la raison pour laquelle son nécessaire préalable est l’élaboration d’un document stratégique pour les forces de sécurité intérieure, avec des objectifs clairs et ambitieux.
Vous connaissez mon attachement au maintien du moral des troupes. Je crois en effet que l’engagement du gendarme est proportionnel au bien-être qu’il peut avoir dans sa vie personnelle et je souhaite, comme vous, que chaque gendarme reste pleinement mobilisé, tant les menaces sont aujourd’hui importantes. C’est pourquoi son cadre de vie doit être amélioré et les moyens affectés à ses missions modernisés – c’est là une nécessité que j’ai pu vérifier tant en outre-mer qu’en métropole. Si le budget de l’immobilier de 2018 est reconduit en 2019, vous savez comme moi que ce budget ne pourra pas satisfaire tous les besoins qui s’expriment, en dépit de tous les efforts consentis. Nous devons rester vigilants sur ces sujets, c’est pourquoi le projet de loi de programmation pour la sécurité intérieure (LPSI) que je porte répondrait à cet impérieux besoin de visibilité.
Pour ce qui est des conditions d’exécution de la loi de finances pour 2018, en particulier des mesures de régulation budgétaire qui ont concerné la réserve, si ces dépenses sont facilement pilotables, le financement de la réserve de la gendarmerie nationale ne peut pas constituer, chaque année, une variable d’ajustement, car les réservistes représentent une ressource inestimable.
Enfin, je souhaite évoquer des missions méconnues de la gendarmerie nationale dans le domaine de la gestion de crise, en mettant à l’honneur ces corps participant au soutien opérationnel et dont le commandement est installé dans la commune du Blanc, dans l’Indre : ils sont souvent les premiers de cordée dans la gestion des crises.
Général, pensez-vous comme moi qu’une loi de programmation pour la sécurité intérieure soit indispensable à la Nation ? Le cas échéant, quels en seraient selon vous les nécessaires préalables ? La notion de bien-être au travail ne s’applique pas seulement aux salariés et aux fonctionnaires : elle concerne aussi les militaires. Quelles sont vos pistes pour l’amélioration des conditions de vie des gendarmes et de leurs familles ? Souhaitez-vous sanctuariser les crédits de la réserve à un moment où la menace est importante ? Enfin, quels sont les avantages que procure le statut de militaire pour les responsables dans la gestion de crise ?
M. Jean-Louis Thiériot. L’un des éléments majeurs de l’efficacité réside dans le maillage territorial, donc dans la présence sur le terrain des brigades territoriales. Si nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer ensemble cette question à l’École des officiers de la Gendarmerie nationale (EOGN) de Melun, alors que j’étais président du conseil départemental de Seine-et-Marne, aujourd’hui, je souhaiterais savoir quelles sont les règles définissant les priorités pour les constructions réalisées sur la base du décret du 28 janvier 1993 relatif aux modalités d’attribution de subventions aux collectivités territoriales pour la construction de casernements de gendarmerie.
Selon la rumeur, alors que les constructions prévues en région Île-de-France figurent sur une liste prioritaire comportant une partie domaniale et une partie réservée aux brigades territoriales, un certain nombre des casernes destinées à ces brigades territoriales, dont la construction avait été annoncée en 2016 par le ministre, ont été sorties de la liste, sans que l’on puisse savoir à qui attribuer cette décision – on parle tantôt du Secrétariat général pour l’administration du ministère de l’Intérieur (SGAMI), tantôt de la préfecture de police. Je ne sais pas ce qu’il faut en penser, mais force est de constater que de nombreux projets, tel celui de la caserne de Guignes, en Seine-et-Marne, se trouvent aujourd’hui retardés, alors même que les communes et régions concernées sont disposées à prendre part à leur financement. Pouvez-vous nous dire ce qu’il en est réellement ?
Pour conclure, je me permets d’insister à nouveau sur l’importance de veiller à ce que les personnels soient décemment logés sur les territoires où ils interviennent : c’est une condition essentielle au bien-être des personnels, mais aussi à l’efficacité de leur action.
Mme Sereine Mauborgne. Général, au nom de tous les parlementaires qui m’accompagnaient lors du stage que vous aviez organisé à notre intention en Guyane, je veux à nouveau vous remercier pour l’accueil qui nous a été réservé par tous les gendarmes rencontrés sur place.
Ma question porte sur les hélicoptères de la gendarmerie, qui affichent un taux de disponibilité de 90 % – un chiffre tout à fait remarquable, notamment au regard de la disponibilité des aéronefs des armées. Pouvez-vous nous dire un mot des modalités spécifiques de maintien en condition opérationnelle (MCO) dont bénéficient vos hélicoptères ?
Par ailleurs, je me permets de vous faire passer le message selon lequel les hélicoptères Écureuil sont particulièrement bienvenus en Guyane, au regard des longues distances à parcourir.
M. Jean-Pierre Cubertafon. Les effectifs de la gendarmerie ont été augmentés, et les brigades ont bénéficié de nouveaux équipements. La création de plus de 3 000 postes de 2013 à 2017 a permis de renforcer la présence des gendarmes sur le terrain, ce qui est très important pour la population rurale, dont les gendarmes sont les principaux interlocuteurs en matière de sécurité.
Au-delà des nouvelles problématiques demandant une présence accrue sur le territoire, la démographie est en constante évolution. Entre 2013 et 2017, la population française a augmenté de 1,3 million d’habitants. Si le projet de loi de finances pour 2017 semblait avoir répondu à vos attentes en matière d’effectifs, est-ce également le cas du projet de loi de finances pour 2019 ?
M. Joaquim Pueyo. Mon général, c’est à juste titre que vous avez réservé une grande place à la réserve opérationnelle dans votre propos liminaire, car elle est d’une grande importance, en particulier dans les départements qui, sans elle, ressembleraient à des déserts militaires : il est bon de savoir qu’en tout point du territoire, des réservistes peuvent être mobilisés lors de grands événements.
Je ne reviendrai pas sur le détail des chiffres, mais j’aimerais savoir si, selon vous, il existe des disparités territoriales en termes de recrutement. En d’autres termes, est-il plus difficile de recruter dans certains départements que dans d’autres ? J’ai tendance à penser que le recrutement se fait plus facilement dans les départements ruraux, mais je peux me tromper.
Ma deuxième question porte sur le renseignement territorial. Dans ce domaine, nous savons que la récolte de renseignement au plus près du terrain est essentielle, et repose sur des personnels qui connaissent très bien les populations, et sont donc les plus à même de détecter un changement de comportement chez tel ou tel individu. Pouvez-vous nous indiquer si en matière de renseignement les gendarmes travaillent avec les élus locaux ? En tout état de cause, ces derniers sont demandeurs – non pas de renseignements précis sur une personne, mais d’informations concernant leur territoire. En dehors des réunions régulièrement organisées par les préfets, les brigades sont-elles amenées à entrer en relation avec les élus locaux afin de procéder à des échanges d’informations ? Je précise que si je vous pose cette question, c’est aussi parce que je sais que la police travaille différemment.
M. Jacques Marilossian. Les groupements de gendarmerie départementaux sont mis à contribution, nous le savons, pour le déploiement des dispositifs de police de sécurité du quotidien.
Dans ce cadre, le groupement de gendarmerie de la Haute-Saône a mis en place la Force de liaison et d’action des Mille Étangs (FLAME). S’appuyant sur un réseau d’information par SMS, elle permet aux gendarmes de renseigner et d’alerter la population mais également au public d’envoyer des requêtes. Ce dispositif, développé par la section des systèmes d’information et de communication de Haute-Saône, semble bien fonctionner pour un coût d’exploitation faible, ce qui est une innovation à saluer pour les finances publiques.
Envisagez-vous, Mon général, de l’adapter à des départements de même nature, étendus et difficilement contrôlables, notamment en outre-mer et plus particulièrement en Guyane ?
M. André Chassaigne. Mes questions porteront sur le numérique.
La gendarmerie a engagé sa transformation en ce domaine avec NéoGend. Ces outils ont-ils été généralisés à l’ensemble des brigades territoriales ? Pourriez-vous faire le point sur leur développement ?
La gendarmerie a également mis en place un self-service numérique avec la brigade numérique, composée d’une vingtaine de gendarmes formés pour répondre aux questions envoyées en ligne par les usagers dans des domaines variés. Pour y accéder, nos concitoyens doivent bien sûr disposer d’internet. Comptez-vous passer des conventions avec les maisons de services au public (MSAP) afin de rendre ce service accessible au plus grand nombre de personnes ?
Comme chaque service public, la gendarmerie est obligée de publier sur internet des données publiques. Où en êtes-vous de votre politique d’open data ? L’organisation des communautés de brigades rend parfois difficile de connaître les horaires d’ouverture des gendarmeries. Une meilleure information s’impose.
Enfin, qu’en est-il du classement des pelotons de surveillance et d’intervention (PSIG) en configuration Sabre ? Le projet de loi de finances pour 2018 envisageait la création de cinq nouveaux PSIG-Sabre, ce qui portait leur nombre à 150. Qu’en sera-t-il pour les années à venir ?
Général Richard Lizurey. Madame la rapporteure, je vous remercie pour les encouragements que vous prodiguez à la gendarmerie, qui sont extrêmement appréciés, sachez-le. Les moyens qui nous sont accordés témoignent de la reconnaissance du travail qu’elle accomplit : je peux vous garantir que les militaires et les personnels civils y sont particulièrement sensibles parce qu’ils leur permettent de travailler mieux.
Pour ce qui est de la création d’une loi de programmation de sécurité intérieure, je partage votre analyse et votre souhait. Il me semble important de tracer des perspectives. Cela a du sens et ce n’est pas pour rien que les armées se dotent de lois de programmation militaire. Nous pourrions définir ensemble les objectifs stratégiques, le niveau de sécurité que nous voulons garantir à nos concitoyens, puis déterminer les besoins et enfin définir les moyens à attribuer et les évolutions à mettre en place en matière d’organisation et de personnels.
Le bien-être de nos personnels est un enjeu d’importance, particulièrement cette année où la gendarmerie a déjà connu vingt-neuf suicides. En dix ans, c’est la deuxième fois que nous enregistrons de tels chiffres, ce qui me préoccupe beaucoup. Ces actes individuels ne me semblent pas refléter un malaise général à la gendarmerie mais ils doivent nous mobiliser : il faut réfléchir aux moyens d’éviter ces dramatiques passages à l’acte.
Plusieurs pistes s’offrent à nous.
Il y a d’abord la mise à disposition de nouveaux outils pour les personnels et l’amélioration des infrastructures – vous avez évoqué les efforts consentis en matière d’immobilier. Les familles sont très présentes au sein de l’univers de la gendarmerie : qu’elles puissent être logées dans des conditions normales est un élément déterminant. Autre élément déterminant : le sens de la mission. « Choisissez un travail que vous aimez et vous n’aurez pas à travailler un seul jour » disait un grand auteur. Donner à nos personnels les moyens de travailler au service de la population contribue à leur bien-être.
Pour ces deux raisons, j’ai lancé depuis quelques mois un chantier portant sur l’évolution des astreintes afin que chaque militaire ait davantage de temps à accorder à sa famille et trouve un plein sens à son action. Les permanences se multiplient tous azimuts, dans toutes les unités, et concernent chaque jour un tiers des 100 000 civils et militaires, ce qui est beaucoup trop. Certes, elles garantissent une grande réactivité mais compte tenu de la réalité des besoins, nombre d’entre elles se révèlent inutiles. Elles apparaissent dès lors comme des contraintes et suscitent des interrogations.
Le bien-être passe aussi par la perspective de l’avancement, qui permet à chacun d’être reconnu dans son métier grâce à l’ascenseur social. Je souhaite que toutes les personnes qui rentrent dans la gendarmerie, dès lors qu’elles en ont l’ambition, puissent monter en grade, de gendarme adjoint volontaire jusqu’à général. Chaque année, la liste d’aptitudes comprend des gens qui ont commencé à la base.
Le bien-être se manifeste, en outre, par la solidarité dans les moments difficiles – aujourd’hui, c’est vers les brigades de l’Aude confrontées aux inondations que nous nous tournons. On a coutume de dire que la gendarmerie est une famille. Cela a des mauvais côtés mais aussi des bons et mon travail consiste à développer ces bons côtés.
Sanctuariser les crédits consacrés à la réserve, suggérez-vous, Madame la rapporteure. Oui, mais il ne faut pas oublier que je dois rester dans les limites de l’enveloppe initiale qui m’a été accordée par la loi de finances. Cela m’impose d’avoir recours à certains leviers de gestion, dont font partie les crédits de la réserve opérationnelle. J’essaierai de limiter leur impact mais je n’ai pas d’autre choix.
Quant au statut militaire, il apporte un avantage décisif dans la gestion de crise. Après le passage de l’ouragan Irma, je n’ai pas pu projeter de personnels civils car leur statut ne le permet pas. Les personnels des corps de soutien comme les mécaniciens ou les spécialistes radio ont pu, eux, être envoyés sur place car ils sont militaires. Dans la sphère « environnement », nous devons donc continuer à avoir moitié de personnels civils, moitié de personnels militaires, soit 5 000 et 5000, afin d’assurer une pleine efficacité opérationnelle.
Pour ce qui est du décret de 1993, Monsieur Thiériot, je vais essayer d’être synthétique. Une fois le principe de la construction d’une brigade notifié, il fait l’objet d’une validation au niveau du ministre et le programme de construction suit son cours. Il ne peut être stoppé que si la collectivité territoriale ou l’opérateur le décide. Lorsque la gendarmerie relevait du ministère de la Défense, son opérateur était le service d’infrastructure de la défense (SID) ; depuis qu’elle est rattachée au ministère de l’Intérieur, elle dépend des SGAMI. Certains sont en mesure de conduire toutes les opérations de construction qui leur sont confiées. Celui de Paris a des difficultés pour gérer la totalité des chantiers, très nombreux dans la région parisienne. Cela explique qu’il y ait ici ou là des retards mais cela n’implique nullement que le programme de Guignes soit remis en cause, il est simplement décalé.
Madame Mauborgne, pour les hélicoptères, je dois rendre hommage à mes spécialistes. Notre conception de l’entretien des appareils privilégie l’autonomie : dans chaque section aérienne, le travail des pilotes et des mécaniciens permet d’atteindre ce taux de disponibilité de 90 %. En outre-mer, nous avons mis en place depuis de nombreuses années un système de maintien en condition opérationnelle local. Contrairement à la sécurité civile, nous ne faisons pas revenir les appareils en métropole. Cela limite les coûts de transport comme les périodes d’indisponibilité. Nous recevons également l’appui très efficace de la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère de la Défense (SIMMAD).
Monsieur Cubertafon, je pourrais vous répondre que l’augmentation des effectifs prévue dans chaque budget n’est jamais suffisante. Toutefois, l’accroissement de 643 équivalents temps plein pour 2019 nous permettra de renforcer nos unités : 100 seront injectés dans les vingt départements prioritaires en matière de police de sécurité du quotidien et les autres seront intégrés dans des brigades soumises à d’importantes tensions opérationnelles. Il est important de noter que 70 % de l’augmentation de la population concernent des zones qui relèvent de la gendarmerie. Auparavant, l’exode rural drainait les populations vers les villes tandis qu’aujourd’hui, beaucoup de citadins viennent s’installer dans des zones périurbaines ou rurales. Dans les années à venir, il nous faudra être en mesure d’accompagner cette évolution démographique. Les effectifs dont nous disposons actuellement nous permettent de faire face mais cela n’empêche pas de procéder à de nécessaires redéploiements ici ou là.
Quant aux recrutements, Monsieur Pueyo, ils sont marqués par des disparités certaines. Nos bassins de recrutement se situent essentiellement dans les métropoles et les grandes villes, ce qui conduit à une asymétrie car les bassins d’emploi sont souvent ruraux. Nous devons apprendre à nos jeunes recrues à parler avec une population qu’ils n’ont pas l’habitude de côtoyer, comme les agriculteurs. Bon an mal an, nous parvenons toutefois à recruter : le taux de sélection est de quatre pour un pour les sous-officiers et d’un peu moins de deux pour un pour les gendarmes adjoints volontaires. Je n’ai pas d’inquiétudes particulières à ce sujet.
C’est votre question sur le renseignement territorial qui m’inquiète car elle montre que les relations entre élus et gendarmerie ne se nouent pas comme il le faudrait. La base de l’action de la gendarmerie est le contact avec les élus, qui constituent pour elle des interlocuteurs majeurs à même de l’éclairer sur la manière dont elle fait son service. Dans le cadre de la police de sécurité du quotidien en 2018, nous avons souhaité que chaque maire ait un gendarme référent. Il reste apparemment des marges de progression. Depuis cette année, nous avons décidé d’organiser chaque semestre des réunions de travail réunissant l’ensemble des maires des communes relevant d’une compagnie territoriale pour que le commandant de compagnie et les commandants de brigade rendent compte de leur activité. Nous devons continuer à travailler dans cette voie. Ces contacts contribuent au développement du renseignement territorial.
Je me suis rendu en Haute-Saône pour voir de plus près comment fonctionnait le dispositif FLAME. Je dois dire qu’il m’a enchanté, d’autant qu’il est uniquement animé par des réservistes. Il inspirera sans doute d’autres compagnies. Il correspond à une approche sur-mesure en matière de police de sécurité du quotidien. Je considère qu’une fois que j’ai « donné les clefs du camion » à chacun des 350 commandants de compagnie, il est de leur responsabilité de s’organiser comme ils l’entendent et qu’ils sont libres de s’inspirer ou non des bonnes pratiques. S’ils prennent des options qui ne sont pas les bonnes, des corrections pourront toujours être apportées après retour d’expérience. Chacun a droit à l’erreur.
Ajoutons que la Haute-Saône va aussi innover l’année prochaine en expérimentant le dispositif GenDrive, qui consiste à implanter un poste de gendarmerie au sein d’un centre commercial.
Tous les terminaux NéoGend, soit 67 000, ont été déployés avant le 31 décembre 2017. Chaque gendarme départemental est désormais doté d’un smartphone, qui comprend la totalité des bases de données nécessaires, tandis que chaque escadron de gendarmerie mobile dispose de deux ou trois tablettes collectives. Tous les trois ans, ces équipements seront renouvelés, opération qui ne posera pas de problèmes particuliers puisqu’ils sont loués.
La brigade numérique est née d’un constat : nombre de nos concitoyens ont des difficultés pour accéder aux services publics de gendarmerie parce que les brigades sont fermées la nuit, le week-end, que leurs horaires d’ouverture sont mal connus et qu’il n’est pas toujours facile de s’y rendre durant la semaine. Pour leur offrir un moyen d’interagir avec nous, nous avons créé cette plateforme animée par des gendarmes spécialement formés, qui s’occuperont aussi de la future plateforme de signalement des violences sexuelles. Depuis Rennes, ils répondent vingt-quatre heures sur vingt-quatre aux internautes de toute la France qui se sont connectés à partir du site gendamerie.gouv.fr.
Par ailleurs, nous avons lancé avec la préfecture du Loir-et-Cher une expérimentation consistant à implanter dans les maisons de services au public des bornes interactives afin que tous ceux et toutes celles qui n’ont pas d’équipement internet chez eux puissent avoir accès à la brigade numérique.
Vous évoquiez également, Monsieur Chassaigne, la difficulté d’obtenir des informations sur les horaires d’ouverture. Nous travaillons à améliorer les choses. La plateforme animée par la brigade numérique servira même en 2019 à prendre des rendez-vous avec les gendarmes de chaque brigade territoriale.
Quant aux 150 PSIG-Sabre, ils représentent un PSIG sur trois, ce qui est une bonne proportion. Cela dit, pour atteindre l’objectif opérationnel qui nous a été fixé – chaque point du territoire doit pouvoir bénéficier d’une intervention spécialisée de premier niveau dans un délai de vingt minutes –, nous procéderons à des aménagements complémentaires et nous créerons sans doute d’autres PSIG car nous constatons qu’il y a dans certaines zones des petits déserts.
M. Didier Le Gac. Ma première question portait sur les réservistes mais vous y avez en grande partie répondu, Mon général. C’est pour nous, élus, un enjeu d’importance car la baisse de 30 % l’année dernière a été douloureusement vécue localement.
Ma deuxième question porte sur les brigades nautiques. J’ai entendu dire que vous comptiez les supprimer. Pour le Finistère, qui est le département le plus maritime de France avec 1 200 kilomètres de côtes, cela paraît difficilement compréhensible.
Mme Marianne Dubois. Ma question vous paraîtra sans doute basique. L’une des missions premières d’un gendarme est d’accueillir les personnes, souvent en plein désarroi, qui viennent porter plainte. Or les conditions d’accueil ne sont souvent pas à la hauteur des attentes. Prévoyez-vous des moyens spécifiques pour former les gendarmes aux accueils difficiles ?
M. Yannick Favennec Becot. Le Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN), unité d’élite de la gendarmerie, est reconnu et envié dans le monde entier. Il semblerait qu’il traverse une période un peu difficile, notamment depuis les attentats de Paris. Le 13 novembre 2015, les hommes du GIGN ne sont pas intervenus car les événements se déroulaient dans une zone d’intervention de la police. Ils ne sont pas intervenus non plus lors de l’attaque de Trèbes car ils sont arrivés trop tard.
Le problème renvoie au temps nécessaire pour mobiliser les hommes du GIGN. Cette unité d’élite est formée et entraînée pour des interventions pointues pour lesquelles elle est irremplaçable ; or elle paraît aujourd’hui souffrir d’être sous-utilisée.
Pouvez-vous, Mon général, nous donner votre sentiment sur cette situation et nous indiquer quels moyens vous comptez utiliser pour réorganiser ces groupements d’intervention au niveau national mais également au niveau des six antennes régionales ?
Mme Françoise Dumas. Les années 2017-2018 ont marqué un véritable tournant pour la gendarmerie nationale, notamment dans sa manière de créer un lien avec les citoyens, et je tiens à saluer l’ensemble de vos forces et ceux qui les commandent.
L’expérimentation des brigades territoriales de contact qui a lieu depuis 2017 s’est révélée positive et elle a trouvé un prolongement dans le cadre de la police de sécurité du quotidien. Quelles mesures sont envisagées pour renforcer la fonction « contact » au sein de la gendarmerie territoriale ? Pourriez-vous nous préciser les mesures relatives à la formation des personnels d’active et de réserve, en particulier pour ce qui est de la compréhension des attentes sur le terrain ?
M. Jean-Michel Jacques. Ma question porte sur la mutualisation informatique. NéoGend, équivalent de NéoPol pour la gendarmerie, fonctionne bien. Qu’en est-il des logiciels de rédaction des procédures ? D’après les informations dont je dispose, il y en a un pour la police nationale, dit LRPPN, et un autre pour la gendarmerie nationale, dit LRPGN. Un groupe de travail se penche sur une convergence, qui serait une garantie de simplification. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Par ailleurs, la police ne dispose pas de l’équivalent de la brigade numérique de Rennes. Ne serait-ce pas une autre piste pour la mutualisation ?
Mme Nicole Trisse. Le budget alloué à la gendarmerie nationale pour 2019 est fort. Toutefois, un poste de dépenses est en baisse : les investissements subissent une diminution de 4 % en autorisations d’engagement et de 13 % en crédits de paiement. Quelles sont vos attentes en la matière ?
M. Laurent Furst. Mon général, j’aimerais vous rassurer : dans ma circonscription, les relations entre gendarmes et élus sont absolument excellentes. Il y a environ trois ans, lors d’une réunion, les gendarmes nous ont informés qu’une bande, partie de la région parisienne pour rejoindre l’Europe de l’Est, commettait des cambriolages chemin faisant, de zones de police en zones de gendarmerie. De quels moyens disposez-vous pour suivre ce genre d’affaires particulièrement complexes puisqu’elles s’étendent sur des portions importantes du territoire national ?
Mme Patricia Mirallès. À la suite de l’application aux gendarmes de la directive « Temps de travail », vous estimiez il y a deux ans une moindre activité de 5 %. Qu’en est-il à ce jour ? Et quel impact cette directive a-t-elle eu sur la population spécifique des réservistes, alors que les pompiers pourraient s’y voir soumis à la suite de l’arrêt Matzak ?
Général Richard Lizurey. S’agissant des brigades nautiques, Monsieur Le Gac, nous n’entendons rien supprimer mais nous voulons les adapter aux besoins. Les brigades nautiques de Bretagne ont bien entendu leur justification, mais nous avons quelque 300 plongeurs dans la gendarmerie nationale, principalement localisés dans les unités nautiques sur la côte alors que leur emploi est principalement dans les terres, car les recherches subaquatiques se font surtout dans les cours d’eau. Il faut donc parcourir des distances importantes pour exercer leur métier et même pour s’entraîner car ils s’entraînent, non dans la mer, mais là où ils interviennent, c’est-à-dire dans les terres. Le travail qui est actuellement conduit est tout simplement une revue capacitaire, qui ne concerne d’ailleurs pas que les unités nautiques mais l’ensemble des unités. Il est de ma responsabilité de regarder si le dispositif historique est toujours pertinent au regard de la démographie et des besoins. Les unités nautiques font comme les autres l’objet de cette réflexion. Il n’est pas envisagé de les supprimer mais nous regarderons l’évolution des besoins.
Je considère qu’une unité qui passe plus de 50 % de son temps à s’entraîner doit être interrogée sur sa justification. C’est comme cela que je l’ai dit à mes troupes. On doit d’abord être engagé dans l’opérationnel. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas s’entraîner mais 50 % ne me paraît pas une bonne mesure. Cela peut inquiéter ici ou là ; il me paraît toutefois important d’y réfléchir, en liaison avec l’ensemble des personnels. Vous serez également sollicités, je pense, dans ce cadre.
Madame Dubois, l’accueil est la première étape du contact. C’est donc l’étape la plus importante, et ce n’est pas pour rien que les entreprises font porter là-dessus le plus gros effort. Nous avons pris quelques mesures, avec des locaux aménagés ici ou là, mais il faut encore que nous soyons meilleurs en matière de formation. La qualité d’accueil laisse parfois à désirer et je le regrette car notre métier est d’accueillir toutes les personnes qui viennent nous voir, usagers, plaignants, et même des auteurs d’actes, et nous avons le devoir de les respecter. Le respect est la base de l’accueil. L’accueil, comme le contact, fait partie des éléments déterminants de notre ADN et, de ce point de vue, nous devons encore progresser dans la formation de nos personnels. Nous en ferons un point fort de la formation initiale que j’ai évoquée.
Monsieur Favennec Becot, le GIGN connaît en effet une période un peu difficile mais c’est normal car les choses évoluent et on ne peut pas considérer qu’il soit au sommet de la pyramide et inatteignable pour l’éternité. Ce n’est en tout cas pas mon point de vue. Le GIGN est un organisme vivant, la gendarmerie tout entière est un organisme vivant, et il faut donc que nous nous interrogions sur notre avenir, sur la manière d’assurer la mission, sur la cinétique et sur le contexte, qui a changé. Vous avez évoqué les attentats du 13 novembre : le GIGN n’a pas été engagé à ce moment-là parce que, d’une part, la réponse apportée localement était considérée comme suffisante et, d’autre part, nous n’étions pas à l’abri d’une réplique en d’autres points et le GIGN était donc potentiellement prévu pour intervenir ailleurs. Pour Trèbes, c’est vrai que le temps de projection de Satory a été long et quand ils sont arrivés c’était terminé, mais c’est aussi du fait de la cinétique propre de la crise.
Le modèle que nous avons aujourd’hui est-il pérenne, ne souffre-t-il aucune critique ? J’ai demandé une réflexion en interne, d’où l’inquiétude qui s’exprime, car, quand on demande aux gens de réfléchir sur un dispositif, ils craignent qu’il soit mis en cause et supprimé. Nous avons six antennes GIGN, qui doivent à mon avis être intégrées dans une vision globale de l’opération. Nous sommes aujourd’hui sur une logique de tueries de masse, avec une cinétique extrêmement rapide : nous n’avons plus le temps d’attendre une projection, il faut prendre de premières mesures. Le primo-arrivant, c’est le gendarme de brigade ; l’intervention spécialisée de premier niveau, c’est le PSIG-Sabre. C’est d’ailleurs comme cela que ça s’est passé à Trèbes. C’est d’abord la communauté de brigade de Trèbes qui est arrivée, puis le PSIG-Sabre, puis l’antenne GIGN, enfin le GIGN. Tout cela s’est mis en place mais on voit bien qu’il faut s’interroger sur notre modèle, qui doit être revu dans sa cinétique et dans sa conception opérationnelle, non pas pour le mettre en cause mais pour l’améliorer et pour qu’il réponde à l’instant t aux besoins. Nous avons des marges de progression.
Madame Dumas, je vous remercie pour l’hommage que vous avez rendu aux personnels. S’agissant de la fonction contact et des brigades territoriales de contact, je rejoins ce que j’ai dit sur l’accueil. C’est une formation que nous avons commencé à intégrer dans la formation initiale, et ce sont d’ailleurs des élus qui interviennent devant nos élèves gendarmes, pour leur expliquer tout simplement ce qu’ils attendent d’eux, ce qui est attendu des gendarmes quand ils arrivent, aller voir les élus, dire bonjour, faire le tour de la circonscription, toutes choses qui étaient considérées comme acquises et qui en réalité ne le sont pas. Je pense qu’il faudra aller encore au-delà, nous continuerons d’investir sur le sujet. Si les uns et les autres êtes intéressés, je suis prêt à vous accueillir dans les écoles pour que vous témoigniez de votre expérience et de votre vision d’élus, car il est important que les jeunes gendarmes vous entendent. Un jour, un élu m’a dit que les gendarmes ne venaient pas toujours aux cérémonies et que, quand ils venaient, ils ne disaient pas bonjour. Cela m’a interpellé. En l’espèce, c’était vrai : renseignements pris, il s’agissait de deux jeunes gendarmes qui venaient d’arriver et qui étaient complètement perdus. Notre erreur était de ne pas les avoir formés. C’est ce qui a déclenché le processus de réflexion sur le contact.
Monsieur Jacques, les plateformes LRPPN et LRPGN sont différentes, et je ne crois pas qu’il soit dans l’intérêt des uns et des autres de les rendre identiques. La LRPGN a été développée par des personnels de la gendarmerie nationale en fonction de la doctrine d’emploi de nos personnels. Un gendarme fait de la police administrative, de la police judiciaire, de la police des eaux et forêts, de la police de la chasse, il fait de tout, à la différence de nos camarades policiers qui sont beaucoup plus spécialisés. Les besoins ne sont donc pas les mêmes. Le gendarme traite une enquête de A à Z, sauf les enquêtes complexes où nous saisissons la section de recherches ; il a donc besoin d’une procédure complète, ce qui n’est pas le cas de la police nationale. Le policier premier saisi, parfois, et même assez souvent, transfère les gardes à vue. Le séquençage des missions est différent. C’est pourquoi il ne me paraît pas souhaitable de rapprocher les logiciels de rédaction de procédure.
En revanche, il faut, vous avez raison, que le puits de données soit identique. Je rejoins donc ce que vous avez dit sur les perspectives de dématérialisation de la procédure. Un travail est actuellement en cours entre la justice et l’intérieur, afin de créer, j’espère en 2021 ou 2022, un dispositif qui permette à chaque policier et chaque gendarme de remplir la procédure, la machine transférant les données dans un puits de données où les magistrats viendront puiser, donc une procédure dématérialisée jusqu’au procès pénal. Mais cela n’oblige pas à se doter d’une plateforme unique.
La brigade numérique ne comprend à ce stade que des gendarmes mais des offres de service sont sur la table. J’ai dit, dès sa création, que les policiers étaient les bienvenus. Une salle est à leur disposition et nous mettrons les ordinateurs nécessaires quand ils viendront.
Madame Trisse, il est vrai que les investissements sont en baisse, notamment dans le domaine des systèmes d’information et de communication (SIC) : c’est parce que, sur la partie Néogend, nous sommes en phase de MCO, tandis que l’an dernier nous avons acheté 67 000 tablettes. Nous n’avons plus besoin d’acheter de tablettes aujourd’hui, le matériel a été loué ; il ne reste que le MCO qui ne nécessite pas d’investissement.
Monsieur Furst, nous suivons les grands groupes criminels organisés, notamment avec l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI). Nous avons démantelé une trentaine de groupes l’année dernière et nous avons l’ambition d’en démanteler au moins autant cette année. Nous sommes d’ailleurs, au niveau de l’office, leaders dans le projet European multidisciplinary platform against criminal threats (EMPACT) de l’Union européenne qui vise à travailler au niveau européen sur la lutte contre ce phénomène de délinquance. C’est un phénomène principalement en provenance d’Europe de l’Est, mais pas seulement, puisque nous sommes même confrontés à des groupes chiliens. Jusqu’à récemment, on estimait que la criminalité organisée était le haut du spectre. Aujourd’hui, les cambriolages opérés par ces groupes criminels sont de la criminalité organisée, et nous nous organisons pour en limiter l’impact au maximum. Les résultats en matière de lutte contre les atteintes aux biens sont encourageants.
Madame Mirallès, la directive « Temps de travail » a fait l’objet d’une réflexion en interne et nous avons mis en place, le 1er septembre 2016, une instruction provisoire établissant un système de récupération de onze heures de repos physiologique journalier par tranche de vingt-quatre heures. Cela a été absorbé. Je vous avais dit à l’époque que cela ferait 5 % en moins de capacités présentes sur le terrain ; l’Inspection générale de l’administration (IGA) a considéré que l’impact était équivalent à moins 4 000 ETPT. Dont acte. Cela a été intégré, nous nous sommes réorganisés. La contrainte nous conduit à imaginer d’autres formes de procès : nous diminuons un certain nombre de tâches indues, de missions périphériques… Cela n’a pas recréé la capacité de travail pour autant, mais nous nous sommes adaptés à ce dispositif.
Il n’a pas eu à ce stade d’impact sur les réservistes. La jurisprudence que vous avez évoquée concernait des sapeurs-pompiers belges en astreinte immédiate à la caserne. C’est le caractère immédiat de l’astreinte qui a conduit le juge à estimer qu’il s’agissait d’un temps de travail effectif. Nos réservistes ne sont pas, quant à eux, en astreinte immédiate ; ils sont mobilisables mais n’ont pas l’obligation d’être en tenue chez eux pour intervenir. Je ne crois donc pas que la directive aura un impact sur nos réserves dans le futur proche.
M. le président. Il reste douze questions. Je vais les faire passer en une seule série et, si vous n’avez pas le temps de répondre à toutes, Mon général, vous pourrez nous communiquer vos réponses par écrit pour que nous les incorporions dans le compte rendu.
M. Xavier Batut. Je suis député de Seine-Maritime, une circonscription rurale de 233 communes et six compagnies de gendarmerie. Je salue la mise en place des brigades de contact, qui permettent de resserrer les liens avec la population et les élus. Cela marche très bien en Seine-Maritime ; les maires et les élus sont satisfaits des référents, avec qui ils se trouvent en discussion permanente. Ces brigades permettent également de sensibiliser les populations de personnes âgées aux risques numériques et autres.
Malgré cela, je suis régulièrement interpellé par la population pour des vols et incivilités en augmentation. Il faut savoir que nous avons eu cette année en Seine-Maritime 30 % d’affluence touristique en plus. Il y a quelques années, il existait des postes de gendarmerie d’été qui permettaient de gérer ces afflux de population. Des effectifs supplémentaires sont-ils prévus sur le terrain pour les gendarmeries territoriales, où souvent le gendarme est le dernier lien avec la population ?
M. Charles de la Verpillière. Dans le canton que je représente au conseil départemental de l’Ain, le canton de Lagnieu, se trouve la centrale nucléaire du Bugey, protégée par un peloton spécialisé de protection de la gendarmerie (PSPG). Pouvez-vous nous parler de ces PSPG ? Vous disiez par exemple qu’il ne faut pas dépasser 50 % de temps d’entraînement : comment fait-on, dans ces conditions, pour maintenir leur moral ?
Mme Séverine Gipson. La gendarmerie dans les territoires ruraux occupe une place importante auprès des citoyens et des élus. Elle est un lieu précieux pour chacun et permet un équilibre non négligeable dans la vie des petites communes. Lors de la réunion annuelle avec la compagnie de gendarmerie départementale, à laquelle je participe avec grand intérêt depuis plusieurs années, auparavant comme maire et maintenant comme députée, les différents chiffres de la délinquance, l’activité des brigades, les effectifs ont été présentés, il y a quelques semaines. Je tiens à féliciter les brigades de ma circonscription pour le travail effectué : baisse de la délinquance – moins 11 % – et des cambriolages – moins 9 %. Cependant, cette année, il y a un manque d’effectifs de 20 % et un point noir à moins 30 %. Il semblerait que ce point noir puisse avoir un impact non négligeable sur la vie de cette brigade, notamment en raison de la superficie couverte puisque l’on est en ruralité. Les raisons invoquées sont le manque d’attractivité des lieux mais aussi un manque de gradés. Des actions spécifiques sur le tableau d’avancement deviennent nécessaires afin de combler ces manques. Pouvez-vous nous indiquer quelles mesures vous entendez prendre face à ces postes non pourvus ?
M. Christophe Lejeune. Mon collègue Jacques Marilossian a eu l’excellente idée de vous parler de FLAME et vous avez répondu sur GenDrive.
Vos hommes et femmes sont régulièrement déployés sur des théâtres hors de métropole : Mayotte, Nouvelle-Calédonie pour le référendum, Guyane, Irma… Comme pour Notre-Dame-des-Landes, en termes capacitaires, c’est beaucoup de personnel concentré pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois, en l’occurrence sur des horizons lointains. Certains éléments sont prévisibles, comme le référendum. Certaines tensions sont récurrentes, en Guyane, à Mayotte. Il y a aussi l’imprévisible, comme les événements météorologiques. Vos capacités sont-elles suffisantes ?
Mme Laurence Trastour-Isnart. Dans la sixième circonscription des Alpes-Maritimes, les relations entre la gendarmerie et les élus sont très bonnes. Nous sommes régulièrement invités à la gendarmerie pour participer à des réunions d’information.
Ma question porte sur l’insécurité dans les quartiers, de plus en plus présente, avec de la criminalité, des trafics de drogue, de la délinquance, des vols, des agressions, l’appropriation de certains quartiers par des bandes organisées. Avez-vous les moyens humains et matériels de faire face à la montée de cette insécurité ? De plus, la police de sécurité au quotidien souhaitée par le Gouvernement est-elle la bonne réponse à cette criminalité organisée qui crée des zones de non-droit en France ?
M. Stéphane Trompille. Je souhaite revenir, après notre collègue tout à l’heure, sur l’immobilier. Lors de projets de casernes, une commission tripartite se réunit. J’ai connu le problème dans mon département de l’Ain : il faut parfois plus d’un an pour que le service de santé des armées envoie quelqu’un. C’est un réel problème.
Vous avez parlé de rendre des comptes aux élus. Les policiers de Bourg-en-Bresse ont fait quelque chose qui mériterait peut-être d’être reproduit dans des secteurs de gendarmerie : « un café avec un policier », où la police rend des comptes aux habitants et qui leur permet également d’avoir des remontées du terrain.
M. Patrice Verchère. Si les crédits du budget de la gendarmerie sont en hausse de 2 % en crédits de paiement, les crédits de paiement pour l’investissement sont néanmoins en baisse de 13 %, cela a été dit. Une inquiétude a été relayée par l’Association professionnelle nationale de militaires (APNM) Gendarmes et Citoyens, qui craint que ce manque de crédits d’investissement se traduise par un retard de la rénovation du parc immobilier, préjudiciable aux familles et aux militaires eux-mêmes. Ils sont également inquiets quant au manque de crédits pour le renouvellement nécessaire des véhicules réformables. Faites-vous le deuil de la possibilité d’une levée de la mise en réserve ou avez-vous encore l’espoir, d’ici au 31 décembre, de l’obtenir ?
Par ailleurs, les gendarmes de l’hôtel Matignon, qui assurent la sécurité de la résidence du Premier ministre, ont récemment dénoncé la dégradation de leurs conditions de travail. Une mission d’évaluation, que vous avez confiée à l’inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN), devait rendre ses conclusions le 12 octobre. Nous sommes le 16. Est-ce que, par hasard, vous auriez ses conclusions ?
Mme Anissa Khedher. Dans le cadre des Rencontres de la sécurité, une convention a été signée la semaine dernière en Isère le 10 octobre entre les sapeurs-pompiers, la gendarmerie nationale et la police nationale, afin d’assurer la sécurité des soldats du feu au cours de leur intervention. Je suis députée de la septième circonscription du Rhône, qui comporte notamment les communes de Bron, Vaulx-en-Velin, Rillieux-la-Pape, où les pompiers tirent la sonnette d’alarme. Dès novembre 2017, ils ont manifesté pour dénoncer le nombre d’agressions en hausse lors de leurs interventions. Ils demandaient notamment l’anonymisation de leurs plaintes, mais aussi la possibilité d’avoir recours à une caméra GoPro pour filmer les interventions dites sensibles et pouvoir identifier les auteurs. Ils comptent également sur une meilleure communication avec la police nationale et la gendarmerie afin de mieux identifier les interventions à risque. Quels moyens seront alloués à l’amélioration de la coopération et du partage d’informations entre ces différents services de sécurité ? Quels résultats envisagez-vous en Isère ? Et pensez-vous que des conventions similaires seront signées dans les prochains mois sur d’autres territoires dits à risque ?
M. Thomas Gassilloud. Il y a quelques semaines, j’étais avec plusieurs collègues en Guyane. Les forces aériennes de la gendarmerie comptent actuellement quelque cinquante hélicoptères ; dans les années quatre-vingt-dix, elles comptaient également des avions légers, du type Cessna. Alors que ces avions sont plus robustes, moins chers, ont un plus grand rayon d’action et sont plus rapides, ils ont cependant été abandonnés. Compte tenu des missions de la gendarmerie, transport de personnes, observation…, ne serait-il pas pertinent de se doter à nouveau d’avions de ce type ?
M. Philippe Folliot. Il y a une dizaine d’années, dans le cadre d’un rapport budgétaire, j’avais constaté un problème dans la gendarmerie d’outre-mer par rapport au recrutement, à savoir qu’il y avait relativement peu de gendarmes issus des départements ou collectivités d’origine. Vos prédécesseurs avaient répondu qu’ils feraient des efforts pour un meilleur recrutement local. Pouvez-vous nous présenter un point d’étape ? La situation a-t-elle progressé ?
M. Thibault Bazin. Des investissements attendus, notamment sur des casernes, sont reportés. Est-ce dû à la baisse du montant d’investissement évoqué par Mme Trisse ? Je pense en particulier à des logements qui suscitent des postes vacants chez nos gendarmes, ou même à des cellules de garde à vue, avec, sur six cellules, pour trois unités, deux cellules opérationnelles seulement. Avez-vous, en termes de pilotage, un outil pour identifier les points noirs et les prioriser dans les budgets successifs ?
M. Philippe Chalumeau. Je salue tout d’abord l’engagement permanent de nos gendarmes et le service rendu à la population.
Ma question porte sur le service national universel. Il n’est pas encore mis en œuvre mais quel regard portez-vous sur un tel dispositif ? Avez-vous des propositions ?
Enfin, nous avons évoqué l’an dernier la dette de loyer de la gendarmerie. Ce problème est-il réglé ou en cours de l’être ?
Général Richard Lizurey. Monsieur Batut, le dispositif des brigades territoriales de contact est à développer. C’est pourquoi une grande partie des effectifs qui me seront accordés, voire leur quasi-totalité, y seront injectés. Nous poursuivrons nos efforts en ce sens, dans la mesure où ces brigades me paraissent être aujourd’hui la cible prioritaire en termes d’augmentation d’effectifs. S’agissant des postes saisonniers, cette année, pour des raisons d’ordre public, nous disposions de moins d’escadrons et en avons, de ce fait, moins créés.
Monsieur de la Verpillière, les gendarmes des pelotons spécialisés de protection de la gendarmerie sont installés à proximité immédiate des centrales nucléaires de production d’électricité (CNPE). Ces unités de contre-terrorisme, dont l’effectif moyen s’élève à cinquante hommes, sont spécialement entraînées. Moniteurs d’intervention professionnels, ils sont lourdement équipés. S’ils s’entraînent beaucoup, ils peuvent également intervenir aux alentours des CNPE, dans le cadre quotidien des perquisitions ou des interpellations de forcenés, en parfait accord avec EDF. De fait, même si les 1 100 gendarmes des PSPG sont intégralement payés par EDF et dédiés aux CNPE, nous avons l’autorisation de les utiliser dans le cadre de la sécurité publique. Leur taux d’entraînement dépasse largement 50 %. Mais dès lors que ce n’est pas moi qui paie, je suis un peu moins regardant… (Sourires.)
Madame Gipson, vous m’avez inquiété en mentionnant le taux de 30 %, qui me semble très élevé. Il est vrai, cependant, que certains endroits souffrent d’un vrai déficit d’attractivité. Si l’on ne peut pas inventer une attractivité géographique, on peut néanmoins inciter les personnels. Aussi allons-nous créer un dispositif pour favoriser les stages dans ces unités, de sorte qu’un gendarme voulant devenir montagnard, pilote d’hélicoptère ou motocycliste aura plus de chances d’obtenir un stage dans ces unités-là que dans celles jugées plus attractives. C’est un moyen un peu détourné de donner de l’attractivité : on paie son écot au manque d’attractivité, mais l’on obtient, en contrepartie, un retour en termes de stage, de formation et d’avancement.
Une autre option à l’étude est celle de l’école de gradés, dont manquent ces unités. Je travaille actuellement avec le chef d’état-major des armées, afin d’intégrer chez nous une vingtaine de gradés, qui seraient formés en tant qu’officiers de police judiciaire (OPJ), puis injectés dans les unités, à la faveur d’un changement d’armée. Après cinq ou six ans dans ces unités non attractives, ils rejoindraient le cycle normal d’encadrement de la gendarmerie. Vingt gradés par an, cela en fait cent en cinq ans. Dotés chacun d’un contrat de cinq ans, ils nous permettraient de répondre aux difficultés actuelles.
Monsieur Lejeune, l’action outre-mer constitue actuellement un sujet de préoccupation. Nous planifions depuis un an l’opération relative au référendum en Nouvelle-Calédonie, avec huit escadrons sur place. Elle est bien préparée et ne présente pas de difficultés. En revanche, les crises régulières à Mayotte, où sont localisés trois escadrons en permanence, sont beaucoup plus inquiétantes. Je pense cependant qu’avec vingt et un escadrons outre-mer nos capacités sont suffisantes. Ces opérations ont un impact sur l’activité de nos personnels : un déplacement outre-mer de trois mois tous les treize mois n’est pas sans conséquences sur la vie familiale. Notre principale difficulté réside dans le manque de capacités de projection, puisque nous sommes tenus par le marché des voies aériennes civiles, qui coûtent extrêmement cher. La projection d’un escadron aller-retour coûte entre 150 000 et 200 000 euros. La facture est, de ce fait, assez élevée.
Madame Trastour-Isnart, nous menons un travail pour lutter contre les bandes. Christophe Castaner, le ministre de l’Intérieur, était d’ailleurs à Fosses ce matin. Pour répondre à ce problème, des zones de sécurité prioritaire ont été mises en place. La police de sécurité du quotidien y répond aussi : c’est du sur-mesure, qui concerne les zones rurales et urbaines. Nous menons également un travail en partenariat avec l’ensemble des contributeurs : la police municipale, la sécurité privée, la gendarmerie, la police nationale ainsi que l’ensemble des bailleurs sociaux et des élus. L’important, dans une telle situation, c’est de travailler collectivement. Mais l’effort de sécurité intérieure ne peut pas être la seule réponse à ce type de délinquance, qui doit être combattu par un travail collectif et dans la durée. Dans plusieurs zones, notamment dans le Val-d’Oise, nous avons déjà obtenu de bons résultats, par exemple à Persan-Beaumont, où nous avons repris une partie du terrain. Il faut continuer en ce sens.
Monsieur Trompille, nous sommes un peu dépendants du service de santé des armées. Tant qu’il n’est pas disponible, il n’est pas possible de réunir la commission tripartite. Deux options sont possibles : soit je m’en passe, mais les textes actuels ne me le permettent pas ; soit je prends un autre opérateur, ce qui poserait un problème d’ancrage militaire. Même s’il reste des marges de progression, je suis satisfait du service de santé des armées, qui est notre opérateur. Les médecins militaires sont beaucoup pris, que ce soit en opérations extérieures ou ailleurs, ce qui peut faire traîner les projets immobiliers.
L’expérimentation du « café rencontre » de la police nationale ne me pose aucun problème. C’est une bonne pratique à laquelle nous pourrions réfléchir.
Monsieur Verchère, sur les craintes formulées par l’APNM Gendarmes et Citoyens concernant la levée de la mise en réserve, j’espère – l’espoir est toujours permis – que les crédits qui ont été gelés en début d’année pourront être dégelés. L’ancien ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, a écrit à son collègue du budget, de sorte que nous puissions bénéficier de ce dégel, qui nous permettrait de commander 1 000 nouveaux véhicules. À ce stade, le dossier est entre les mains du ministre compétent, dont je ne doute pas de la bienveillance à l’égard de notre demande.
Concernant la compagnie de sécurité de l’Hôtel de Matignon, le besoin de concertation et de dialogue social est très clair. Suite à des changements dans le service, un travail est à faire. Hier, j’ai réuni les commandants de la garde, du régiment, de la compagnie et le commandant militaire. Ce que je retiens de l’échange parfaitement libre que nous avons eu, c’est qu’il faut remettre de l’humain dans les choses. Le statut militaire n’empêche pas le respect, la concertation et le dialogue, mais doit, au contraire, les favoriser. Dans ce cas-ci, il y a manifestement des marges de progression.
La séance est levée à dix-huit heures quarante.
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Membres présents ou excusés
Présents. – M. Xavier Batut, M. Thibault Bazin, Mme Aude Bono-Vandorme, M. Jean-Jacques Bridey, Mme Carole Bureau-Bonnard, M. Philippe Chalumeau, M. André Chassaigne, M. Jean-Pierre Cubertafon, Mme Marianne Dubois, Mme Françoise Dumas, M. Yannick Favennec Becot, M. Jean-Jacques Ferrara, M. Jean-Marie Fiévet, M. Philippe Folliot, M. Laurent Furst, M. Claude de Ganay, M. Thomas Gassilloud, Mme Séverine Gipson, M. Fabien Gouttefarde, M. Jean-Michel Jacques, Mme Manuéla Kéclard-Mondésir, M. Loïc Kervran, Mme Anissa Khedher, M. Didier Le Gac, M. Christophe Lejeune, M. Jacques Marilossian, Mme Sereine Mauborgne, M. Philippe Michel-Kleisbauer, Mme Patricia Mirallès, Mme Josy Poueyto, Mme Natalia Pouzyreff, M. Joaquim Pueyo, M. Jean-Louis Thiériot, Mme Laurence Trastour-Isnart, Mme Nicole Trisse, M. Stéphane Trompille, M. Patrice Verchère, M. Charles de la Verpillière
Excusés. – M. François André, M. Jean-Philippe Ardouin, M. Florian Bachelier, M. Sylvain Brial, M. Luc Carvounas, M. Olivier Faure, M. Richard Ferrand, M. Marc Fesneau, M. Jean-Christophe Lagarde, M. Fabien Lainé, M. Gilles Le Gendre, Mme Sabine Thillaye, Mme Alexandra Valetta Ardisson
ANNEXE
Éléments de réponses complémentaires fournis par le général Richard Lizurey
Mme Anissa Khedher. Dans le cadre des rencontres de la sécurité, une convention a été signée en Isère le 10 octobre dernier entre les sapeurs-pompiers, la GN et la PN afin d’assurer la sécurité des soldats du feu au cours de leur intervention. Les pompiers du Rhône tirent la sonnette d’alarme. Dès novembre 2017, ils ont manifesté pour dénoncer le nombre d’agressions en hausse lors de leurs interventions. Ils demandaient notamment l’anonymisation de leurs plaintes mais aussi la possibilité d’avoir recours à une Go Pro pour filmer les interventions dites sensibles et pouvoir identifier leurs agresseurs. Ils comptent également sur une meilleure communication avec la PN et la GN afin de mieux identifier les interventions à risque. Quels moyens vont être alloués à l’amélioration de la coopération et du partage d’informations entre ces différents services de sécurité ? Quels résultats envisagez-vous en Isère ? Pensez-vous que des conventions similaires vont être signées dans les prochains mois sur d’autres territoires dits à risque ?
Réponse. Sur les neuf premiers mois 2018, 379 plaintes pour outrages, violences ou dégradations commis à l’encontre de sapeurs-pompiers ont été enregistrées – 454 pour l’ensemble de 2017 – 346 pour 2016).
Les outrages sont les plus représentés (298 faits sur les 9 premiers mois 2018). Les violences représentent 71 faits. Les dégradations, 10 faits.
La coopération entre la gendarmerie et les sapeurs-pompiers pour prévenir ces actes est systématisée dans chaque département au travers de « protocoles de prévention et de lutte contre les agressions entre le SDIS, la DDSP et le groupement de gendarmerie départementale (GGD) ».
Ces protocoles sont prévus par une instruction ministérielle de 2015 qui a depuis été actualisée et enrichie. Ils concernent : le partage de l’information, les modalités d’intervention conjointes, la prise en compte spécifique des secteurs et périodes où le risque est élevé, les modalités des dépôts de plaintes des sapeurs-pompiers.
Les modalités de coopération prévues par ces protocoles doivent évoluer en continu.
Il y a encore des marges de progression en ce qui concerne l’accompagnement des sapeurs-pompiers dans les zones sensibles : nous devons évoluer vers du quasi systématique.
Un autre axe d’amélioration concerne l’accompagnement des sapeurs-pompiers entre le lieu de prise en charge de personnes démentes ou alcoolisées, par exemple, et l’hôpital.
Le partenariat instauré en Isère est particulièrement réussi mais il n’est pas le seul. Celui des Yvelines, également touché par les « violences urbaines » mérite également d’être mentionné. Ce sont deux exemples de partenariats bien rodés.
La convention signée entre le commandant du GGD 38, le DDSP et le SDIS de l’Isère réactualise le protocole signé en 2015.
Les quatre mesures prévues par l’instruction ministérielle de 2015 y sont déclinées. Elle consacre et pérennise les bonnes pratiques et permet d’accroître les échanges entre les services signataires. Elle confirme les excellentes relations entre la gendarmerie et les sapeurs-pompiers isérois. Enfin, elle vise à prévenir les actes agressifs, comme les infractions commises envers les sapeurs-pompiers.
Quant à la convention signée par le GGD 78, elle instaure notamment :
– une visite systématique du CORG ou du CODIS pour les nouveaux officiers du SDIS et du GGD ;
– la mise en place d’un exercice annuel sur le camp de Beynes portant sur l’intervention commune en milieux sensibles ;
– l’accompagnement systématique des Véhicules de Secours aux Asphyxiés et Blessés par une patrouille gendarmerie lors de la prise en compte d’un blessé dont le comportement peut s’avérer dangereux.
M. Thomas Gassilloud. J’étais en Guyane il y a quelques semaines. Les grandes distances sur place m’amènent à vous poser une question sur les capacités, mais la question a bien une dimension nationale. Les forces aériennes de la gendarmerie comptent actuellement 50 hélicoptères. Elles comptaient également des avions légers dans les années 1990. Ces avions sont plus robustes, moins chers, ont plus d’élongations, sont plus rapides, mais nous les avons toutefois abandonnés. Compte tenu des missions de la gendarmerie – transport de tout type, observation -, ne serait-il pas pertinent de se doter à nouveau d’avions de ce type ?
Réponse. La gendarmerie compte 56 hélicoptères (15 EC 145/ 15 EC 135/ 26 Ecureuils)
L’hypothèse de l’utilisation d’avions légers dans le cadre du dispositif ultramarin de la gendarmerie a fait l’objet d’une étude récente.
Il en ressort qu’une telle dotation ne répondrait nullement aux besoins de la gendarmerie et engendrerait des difficultés supérieures aux bénéfices espérés pour le ministère de l’Intérieur.
Plusieurs inconvénients ont ainsi pu être identifiés :
– l’absence de ressources en pilotes d’avion, obligeant à leur faire suivre une formation dispendieuse en temps et en argent ;
– l’absence d’infrastructures adaptées et de compétences en MCO, nécessitant une externalisation coûteuse ;
– la capacité de transport trop limitée de ces appareils, 4 personnes dont le pilote, qui ne répond pas aux besoins de la gendarmerie ;
– en Guyane, un avion léger n’est d’aucune utilité pour intervenir en forêt sur des sites d’orpaillage clandestin par exemple, où l’hélitreuillage reste le seul mode d’action valable ;
– de même, la densité de la forêt est un obstacle à l’utilisation d’avions légers pour des missions d’observations efficaces ; l’hélicoptère, avec le vol stationnaire et une vitesse de déplacement plus lente est bien plus adapté
Dans l’hypothèse où nous aurions exceptionnellement besoin d’un avion léger, nous ferions alors appel aux armées, avec lesquelles nous sommes toujours fortement liées pour notre soutien et notre projection sur les théâtres d’opération.
Les hélicoptères restent les vecteurs aériens les plus adaptés aux missions de la gendarmerie (renseigner, maintenir l’ordre, enquêter et secourir) et il n’est pas envisagé de développer une autre flotte d’aéronef, si ce n’est celles des drones.
M. Philippe Folliot. Il y a une dizaine d’années, dans le cadre mon rapport budgétaire, j’avais constaté des problèmes dans la gendarmerie d’outre-mer notamment s’agissant du recrutement, avec relativement peu de gendarmes issus des départements et des collectivités d’origine. Vos prédécesseurs ont affirmé qu’ils allaient faire des efforts pour assurer un meilleur recrutement local. Pouvez-vous faire un point d’étape par rapport à cela pour dire si la situation a progressé ?
Réponse. La situation a effectivement changé.
La notion « d’originaire » a disparu des textes législatifs et réglementaires au profit de la notion de centre des intérêts matériels et moraux (CIMM), qui s’applique à tous les militaires de la gendarmerie, quel que soit l’endroit où ils sont nés et ont grandi.
Ce dispositif permet de favoriser l’affectation des personnels originaires des outre-mer dans leur département ou territoire de naissance. Cela renforce les liens et le contact avec les populations locales, dont les spécificités doivent être prises en compte.
Ainsi, les GAV servant outre-mer en sont très majoritairement originaires (72 %). Ce taux dépasse les 80 % en Polynésie, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna.
Les SOG possédant des CIMM Outre-mer représentant 21 % des effectifs, et 11 % pour les sous-officiers du corps de soutien technique et administratif.
Les efforts de la gendarmerie se concentrent actuellement sur la Nouvelle-Calédonie, où les CIMM représentent 29,74 % des effectifs. La Polynésie Française est la mieux placée avec 41,55 % de militaires s’étant vu reconnaître un CIMM.
Enfin, pour les officiers de gendarmerie, la reconnaissance d’un CIMM constitue en gestion un critère d’appréciation supplémentaire. La gendarmerie veille à ce que les officiers issus du rang originaires d’un territoire outre-mer soient affectés sur celui-ci. Parmi les officiers possédant des CIMM, 38 % font l’objet d’une affectation effective sur le lieu de CIMM.
M. Thibault Bazin. Des investissements attendus dans l’immobilier sont reportés, notamment sur des casernes. Est-ce dû à la baisse des dépenses d’investissement ? Vous avez des logements vacants ou des cellules de garde à vue qui ne sont pas toutes opérationnelles. Avez-vous en termes de pilotage des outils pour identifier les points noirs et pour prioriser dans les budgets successifs ?
Réponse. Les dépenses d’investissement dans l’immobilier domanial ne diminuent pas. Nous y consacrerons 105 M€ en 2019 (contre 101 en 2018) et cet effort sera renouvelé chaque année jusqu’en 2022. Il permettra de réaliser des travaux dans plus de 10 000 logements et d’améliorer la sécurité des casernes.
Les reports de projets immobiliers ne sont donc pas liés à une baisse de nos crédits d’investissements.
Leur report ne signifie pas leur abandon. Les causes de retard au démarrage effectif des travaux sont multiples : délais prolongés pour les études préalables et l’instruction des dossiers, difficultés des fournisseurs à répondre à la demande, surcoûts constatés sur d’autres opérations, urgences à traiter, etc …
Nous n’avons pas seulement des outils de pilotage pour identifier les casernes qui ont besoin de travaux et prioriser nos investissements. La gendarmerie dispose de toute une chaîne « affaires immobilières », associant tous les échelons de commandement du groupement à la DGGN, et qui coopère avec les SGAMI et le secrétariat général du MININT (qui comprend un bureau spécifique aux affaires immobilières de la gendarmerie).
L’échelon local et l’échelon régional sont essentiels dans l’identification des besoins en investissements. C’est au niveau DGGN que se décide la priorité accordée à tel ou tel projet, en fonction des crédits alloués.
M. Philippe Chalumeau. Quel est le regard que vous porteriez sur un dispositif comme le service national universel ? Avez-vous des propositions à nous faire dans ce sens-là ? En outre, la question de la dette loyers de la GN est-elle réglée ou en cours de l’être ?
Réponse. 1) Quel est le regard que vous porteriez sur un dispositif comme le service national universel ? Avez-vous des propositions à nous faire dans ce sens-là ?
L’économie générale du SNU, validée par le Premier ministre à la fin du mois de juin, s’articule en deux phases distinctes :
• Une phase « cohésions » : Obligatoire, elle concernera toute une classe d’âge entre 15 et 18 ans et se composera :
◦ 15 jours sous le régime de l’internat : formation aux gestes de premiers secours, lutte contre l’illettrisme et détection des difficultés sociales, formation sur les valeurs de la République et ses institutions, cyberdéfense.
◦ 15 jours de préparation à l’engagement autour de la conduite de projets collectifs.
• Une phase d’engagement : réalisée sur la base du volontariat, elle concernera les jeunes entre 18 et 25 ans (estimation : 500 000) et consistera en un engagement pour une période de 3 à 6 mois (type service civique) de nature militaire, civile, réserve sanitaire, etc. Il se dessine donc un projet porteur d’opportunités pour la gendarmerie :
– exposition importante auprès de la jeunesse, ce qui pourra aider à constituer le vivier de nos futurs recrutements, tant dans le cadre d’un parcours professionnel au sein de l’armée d’active que dans celui, plus intermittent, mais tout aussi indispensable, de la réserve opérationnelle ;
– renforcement de la fonction « contact » que nous avons initié depuis quelques mois sur l’ensemble territoire : chaque jeune ayant réalisé son SNU au sein de la gendarmerie deviendra un relais et un capteur d’ambiance, grâce à la formation et à la sensibilisation qu’ils lui seront prodiguées
La gendarmerie nationale entend s’inscrire pleinement dans cette ambition présidentielle en offrant son concours aux deux grandes phases du dispositif. Elle dispose pour cela d’un savoir-faire et d’une expertise reconnue : elle est en effet le plus important contributeur aux Journées du citoyen, dont elle assure très fréquemment l’encadrement.
2) En outre, la question de la dette loyers de la GN est-elle réglée ou en cours de l’être ?
– Le sujet de la dette loyers de la gendarmerie est désormais clos.
– À la fin de 2017, nous avions estimé la dette loyers à 111 M€ en AE et 89 M€ en CP. Un audit interne a été conduit courant 2018 pour expertiser cette dette.
– Il a permis de fiabiliser son montant à 40 M€ en AE et 75 M€ en CP.
– La dette atteindra d’ici la fin 2018 un montant de 52 M€ en CP (et nul en AE). Ce résultat sera obtenu en poursuivant notre effort de remboursement (13 M€) et en requalifiant 11 M€ de baux irréguliers (qui prévoient un versement « terme à échoir », ce qui est incompatible avec les règles de la dépense publique).
– Le montant de 52 M€ peut être considéré comme « frictionnel » car il représente la moitié des paiements de loyers dus en décembre.
Source: Assemblée nationale