CAPTATION DE PUBLICATIONS SUR « FACEBOOK » PAR L’EMPLOYEUR : UNE ATTEINTE DISPROPORTIONNEE A LA VIE PRIVEE DES SALARIES (Par Claire JAKYMIW, stagiaire, et Me Aïda MOUMNI, avocat associé)

Si l’article 9 du Code civil dispose que « Chacun a droit au respect de sa vie privée », il est important de rappeler que ce droit s’étend au monde du travail. En effet, le salarié a droit, « même au temps et au lieu de travail », au respect de l’intimité de sa vie privée (consécration par l’arrêt dit « Nikon » de la chambre sociale de la Cour de cassation, du 2 octobre 2001, n°99-42942).

Ce principe a trouvé une application particulière dans un arrêt récent de la chambre sociale de la Cour de cassation du 20 décembre 2017, n°16-19609.

Dans cette affaire, un employeur avait produit devant la juridiction prud’hommale, dans le cadre du conflit l’opposant à sa salariée, des propos tenus par cette dernière sur son profil facebook alors même qu’il n’était pas autorisé à les voir dans la mesure où il n’était pas « ami » avec cette salariée sur le réseau social.

Les informations avaient été recueillies par l’employeur au moyen du téléphone portable professionnel d’un autre salarié – étant précisé que ces informations étaient alors présumées professionnelles.

Pour autant, le 20 décembre 2017, la Chambre sociale de la Cour de cassation a pu retenir :

« Mais attendu qu’ayant relevé que le procès-verbal de constat d’huissier établi le 28 mars 2012 à la demande de la société Jesana rapportait des informations extraites du compte facebook de la salariée obtenues à partir du téléphone portable d’un autre salarié, informations réservées aux personnes autorisées, la cour d’appel a pu en déduire que l’employeur ne pouvait y accéder sans porter une atteinte disproportionnée et déloyale à la vie privée de la salariée ; que le moyen n’est pas fondé ; »

(Cass, n°16-19609 du 20/12/2017)

Il convient de retenir de cet arrêt que la loyauté de la preuve reste essentielle.

Si un employeur peut produire en justice les propos tenus sur Facebook par un salarié lorsqu’ils figurent sur un mur public, accessible à tous, cela n’est pas le cas si ces propos sont tenus sur un profil dont l’accessibilité est restreinte aux seuls amis de la personne concernée, et, l’employeur, non autorisé à accéder à ce contenu, ne peut produire en justice ces éléments.

En l’espèce, l’employeur a été condamné à verser 800 euros d’indemnité à la salariée pour avoir porté une atteinte disproportionnée et déloyale à sa vie privée.

Il convient ainsi de s’assurer des paramètres de confidentialité de nos différents comptes sur les réseaux sociaux…

© MDMH – Publié le 28 mars 2018

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