Question écrite n° 02471 de Mme Brigitte Lherbier (Nord – Les Républicains) publiée dans le JO Sénat du 14/12/2017 – page 4447
Mme Brigitte Lherbier attire l’attention de Mme la secrétaire d’État, auprès de la ministre des armées sur les concessions des combattants morts pour la France. Au lendemain de la Grande guerre, la France a proposé aux familles endeuillées soit d’inhumer le membre de leur famille tué au combat dans une nécropole nationale, soit de le restituer afin qu’il soit enterré dans une tombe familiale. Dans la majorité des cas, les familles ont souhaité inhumer elles-mêmes leurs proches dans une concession dite à perpétuité. Cependant, les concessions ont désormais une durée maximale de 99 ans. Dans les cimetières communaux des milliers de tombes, où sont inhumés des morts pour la France, ont disparu ou vont disparaître. Ces tombes des héros français de la Première Guerre Mondiale sont le témoignage indélébile, dans les communes de France, de la tragédie humaine qui s’est déroulée au début du XXème siècle. C’est pourquoi, au moment où l’on célèbre le centenaire de la Grande Guerre, elle souhaite savoir si le Gouvernement envisage de prendre des mesures de conservation des tombes des combattants morts pour la France lors de cette guerre particulièrement sanglante, mais également lors des conflits suivants afin de favoriser le travail de mémoire des générations futures.
Réponse du Secrétariat d’État, auprès de la ministre des armées publiée dans le JO Sénat du 25/01/2018 – page 304
Il convient tout d’abord de rappeler qu’une loi du 29 décembre 1915 prévoyait, à l’origine, que tous les soldats des armées françaises et alliées morts au combat pendant le premier conflit mondial reposeraient dans des sépultures perpétuelles aménagées et entretenues aux frais de l’État. La possibilité de restituer les corps des victimes aux familles a, par la suite, été instaurée dans le cadre d’une loi du 31 juillet 1920. Dans ce contexte, aux termes des dispositions du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG), seules sont aujourd’hui entretenues, à titre perpétuel, aux frais de l’État, les tombes des soldats bénéficiaires de la mention « mort pour la France » et dont les corps n’ont pas été restitués aux familles, celles-ci ayant choisi de les laisser sous la sauvegarde de l’État sur le lieu de leur première inhumation, situé dans un cimetière national ou dans un carré spécial au sein d’un cimetière communal. Lorsque les corps des soldats morts pour la France sont restitués aux familles, à la demande de celles-ci, pour être inhumés dans des sépultures familiales, l’article L. 521-3 du CPMIVG prévoit que ces familles perdent le droit à l’entretien perpétuel de la sépulture aux frais de l’État. Il leur incombe alors d’en prendre soin, sans qu’il leur soit possible d’obtenir la réinhumation du corps dans un cimetière national ou un carré militaire. En effet, du jour de la restitution, les sépultures de ces soldats échappent à la compétence de l’État. Le régime juridique qui leur est alors applicable est celui des sépultures privées situées au sein des cimetières municipaux, tel qu’il est défini par les articles L. 2223-1 et suivants du code général des collectivités territoriales précisant les obligations des communes envers les sépultures implantées sur leur territoire. Une modification de la réglementation en vigueur aboutissant à la prise en charge par l’État de la préservation des tombes des militaires morts pour la France restitués aux familles concernerait non seulement les victimes de la Première Guerre mondiale, mais également celles des conflits postérieurs, entraînant d’importantes conséquences financières. Il peut en effet être observé que si la restitution des corps est restée minoritaire s’agissant des soldats morts lors de la Première Guerre mondiale (300 000 corps restitués environ), elle s’est progressivement généralisée lors des conflits suivants pour devenir la règle en ce qui concerne les opérations extérieures (quatre soldats inhumés dans des sépultures perpétuelles sur un total de plus de 500 morts pour la France en opérations extérieures). Les frais correspondants seraient d’autant plus élevés qu’il conviendrait de respecter, dans leur diversité, les aménagements des tombes réalisés par les familles. Il en résulterait une diminution corrélative du montant des crédits consacrés à l’entretien des tombes des soldats dont les familles ont choisi de confier à l’État la sépulture de leur parent mort pour la France. Il n’est donc pas envisagé de remettre en cause le dispositif actuel, qui offre une réelle protection à l’ensemble des sépultures abritant les corps des militaires morts pour la France, dans le respect de l’option choisie par les familles quant au lieu de l’inhumation et préserve la mémoire de ces soldats. Toutefois, il est souligné que les communes qui sont aujourd’hui confrontées à l’abandon de concessions dans lesquelles reposent des soldats morts pour la France font le choix de prendre à leur charge l’entretien de ces tombes, à titre d’hommage rendu aux défunts ou celui de transférer les restes mortels dans un ossuaire sur lequel est apposé une plaque commémorative mentionnant la qualité de mort pour la France des défunts et honorant leur mémoire. Enfin, l’association Le Souvenir français s’est fixé pour mission l’entretien bénévole, en relais des familles, des tombes en déshérence des soldats morts pour la France dont les corps ont été restitués. Elle remplit cette mission avec dévouement et efficacité, en lien le plus souvent avec les communes et bénéficie à cet effet d’un soutien matériel de la part du ministère des armées prenant la forme de la fourniture d’un contingent annuel de 500 emblèmes funéraires.
Source: JO Sénat du 25/01/2018 – page 304