Question N° : 70376 de M. Marc Le Fur (Union pour un Mouvement Populaire – Côtes-d’Armor)
Texte de la question
M. Marc Le Fur attire l’attention de M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales sur les conclusions du rapport annuel de la Commission nationale de déontologie et de sécurité (CNDS).
La Commission nationale de déontologie de la sécurité a traité, entre le 1er janvier et le 31 décembre 2008, 147 saisines, qui lui ont été transmises par des parlementaires (députés ou sénateurs) ou des autorités administratives indépendantes telles que le Défenseur des enfants, le Médiateur de la République, le président de la HALDE et, depuis la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
Les affaires traitées ont été répertoriées dans ce rapport annuel et au regard des éléments soulevés ont donné lieu à des recommandations.
En ce qui concerne la condition des mineurs lors des opérations de police, et notamment les interpellations et les contrôles d’identité, la CNDS rappelle qu’une intervention de police, lorsqu’elle concerne un mineur, obéit certes à la nécessité de faire respecter la loi et de protéger l’ensemble de la société, mais, a aussi et surtout conformément à l’instruction ministérielle du 22 février 2006, pour objectif de protéger contre lui-même tout mineur engagé dans un parcours délinquant, qui l’expose à une forme de marginalisation et risque de le priver de toute chance d’insertion sociale et professionnelle.
La Commission souligne ainsi qu’elle n’a eu que trop souvent l’occasion de déplorer les pratiques de menottage systématique encore largement répandues.
Elle a rappelé à de multiples reprises les dispositions de l’article 803 du code de procédure pénale, selon lequel : « Nul ne peut être soumis au port des menottes ou des entraves que s’il est considéré soit comme dangereux pour autrui ou pour lui-même, soit comme susceptible de tenter de prendre la fuite ».
Cette règle étant fréquemment méconnue par les fonctionnaires de police, elle a été rappelée par la circulaire du ministre de l’intérieur du 11 mars 2003 et, de nouveau, par celle du directeur général de la police nationale datée du 9 juin 2008.
Selon la CNDS, le menottage abusif, qui constitue une atteinte à la dignité des personnes, est particulièrement dommageable dans le cas des mineurs, notamment à cause de la dimension symbolique que comporte le port d’entraves et l’humiliation qu’elle peut représenter.
La Commission souligne que les mineurs sont psychologiquement plus fragiles que les autres, même lorsque leur apparence physique est proche de celle d’un adulte.
C’est pourquoi la CNDS estime que l’instruction du 22 février 2006, qui prescrit aux fonctionnaires de « conserver en toute circonstances des pratiques professionnelles irréprochables vis-à-vis des mineurs, qu’ils soient victimes, témoins, mis en cause ou simplement contrôlés », soit effectivement respectée et mise en oeuvre et que le recours au menottage soit exceptionnel et justifié.
Il lui demande de préciser la position du Gouvernement à ce sujet.
Texte de la réponse
Les forces de sécurité intérieure peuvent être conduites à recourir à des moyens coercitifs.
Cet usage de la contrainte s’exerce dans le respect des droits fondamentaux des personnes.
Il est strictement encadré et rigoureusement contrôlé.
S’agissant des menottes, l’article 803 du code de procédure pénale dispose que nul ne peut être soumis au port de celles-ci ou des entraves que s’il est considéré comme dangereux pour autrui ou pour lui-même ou comme susceptible de prendre la fuite.
Une circulaire du 11 mars 2003 du ministre de l’intérieur souligne le nécessaire discernement qui doit accompagner la mise en oeuvre du menottage, qui ne peut être systématique.
Le directeur général de la police nationale a personnellement rappelé à tous les services de police, par une instruction du 9 juin 2008, les conditions de mise en oeuvre du menottage, et une note leur a également été adressée le 8 octobre 2008 sur l’usage légitime de la force.
De même, une note a été diffusée le 3 juillet 2009 à l’ensemble des unités de gendarmerie sur les comportements opérationnels à adopter pour l’interpellation des auteurs de violences collectives.
Chaque membre des forces de sécurité dispose d’un pouvoir d’appréciation et doit agir en considération des circonstances de l’affaire, de l’âge, des renseignements de personnalité recueillis sur la personne et de manière proportionnée.
Le menottage excessivement serré est formellement proscrit.
L’opportunité d’inscrire le port d’entraves dans un procès-verbal de garde à vue n’est cependant pas établie.
Outre que le menottage est une mesure de sécurité purement administrative, le policier qui y recourt est rarement l’officier de police judiciaire responsable de la garde à vue.
Par ailleurs, le contrôle de cette mesure est d’ores et déjà assuré par la hiérarchie, qui engage des poursuites disciplinaires lorsque des manquements déontologiques sont avérés, ainsi que par les différentes autorités de contrôle.
La commission nationale de déontologie de la sécurité ou le contrôleur général des lieux de privation de liberté, par exemple, apprécient au cas par cas l’opportunité des différentes mesures de sécurité.
Concernant les mineurs, une circulaire du 22 février 2006 du ministre de l’intérieur relative à la conduite à tenir à leur égard à l’occasion des interventions de police insiste sur le respect scrupuleux de la protection due à tout mineur, même lorsqu’il est mis en cause.
Elle rappelle également que les forces de sécurité doivent conserver en toutes circonstances des pratiques professionnelles irréprochables, notamment vis-à-vis des mineurs, et que l’appréciation de la nécessité et de la proportionnalité concernant leur menottage, qui peut s’avérer nécessaire, doit être particulièrement attentive et objective.
Par note du 16 février 2010, le directeur central de la sécurité publique a rappelé à ses services l’importance qui s’attache à un respect absolu de ces principes et souligné que l’emploi des menottes est à proscrire pour les mineurs de 13 ans, sauf mise en cause dans une affaire criminelle ou avis contraire du magistrat compétent, tandis qu’il doit rester exceptionnel pour les mineurs de 13 à 18 ans.
Le ministre de l’intérieur et l’ensemble de la hiérarchie policière sont particulièrement attentifs au respect permanent et rigoureux de ces principes, dont les violations sont sévèrement sanctionnées en ce qu’elles portent atteinte à la dignité de la personne humaine mais aussi à l’image de la police et de la gendarmerie nationales et au respect qu’elles doivent inspirer à la population.
Source: JO AN du 11/05/2010 page : 5349