Les armées affaiblies
Avec le président de la République, c’est le chef des Armées qui a été élu tandis que le Premier ministre vient d’être désigné et le ministre de la Défense le sera prochainement. Même si les questions de Défense n’ont pas fait la une de la campagne électorale, les Français n’ignorent rien de l’état critique dans lequel l’équipe précédente a laissé nos armées. Jamais l’effort de Défense n’a été aussi faible depuis plus d’un demi-siècle. Trois exemples illustrent la situation : aucun des avions ravitailleurs, qui ont pourtant plus de 50 ans, n’a été remplacé, plus de 50% des hélicoptères sont indisponibles, 15% des militaires ne reçoivent toujours pas le montant exact de leurs rémunérations 6 ans après la mise en place de« Louvois »,… scandaleux !
L’incohérence entre les missions et les moyens
« Le costume a été taillé bien trop juste » par le Livre blanc de 2013 et la LPM 2014-2019. Les coutures sautent les unes après les autres. Malgré les discours guerriers, flatteurs et rassurants des autorités politiques et les photos où ils figurent avec nos soldats sur les théâtres d’opérations, l’armée se délite depuis 5 ans. Les nombreuses mises en garde des chefs d’état-major lors de leurs auditions par les commissions de la Défense des deux assemblées ne sont pas suivies d’effets.
L’effort de Défense n’a cessé de diminuer que lorsque le chef de l’Etat a déclaré que « nous sommes en guerre », mais il reste à ce palier, le plus bas, alors que l’armée doit mener des opérations militaires nombreuses, dispersées et longues comme au Mali sur 5 millions de km2, ou au Liban depuis 40 ans ! Ne nous étonnons donc pas du taux de disponibilité catastrophique des matériels majeurs, de la baisse continue du niveau d’entraînement des forces et du vieillissement accéléré des matériels. Face à cette situation plus qu’alarmante, deux des huit réponses du candidat devenu chef de l’Etat, méritent réflexion.
Un projet de service militaire obligatoire irréaliste
Cette proposition est irréaliste en raison du nombre de jeunes Français concernés : 750 000 par an, de son coût initial – plus de 10 milliards – au regard de la situation économique et financière du pays, de l’absence de cadres et d’infrastructures disponibles. En outre, cette solution serait inefficace en raison de la durée trop courte – un mois – (en fait moins en intégrant les formalités administratives) pour assurer un véritable brassage et une formation militaire de base.
D’autres solutions visant à renforcer le sentiment d’appartenance à la communauté nationale pourraient être envisagées. A titre d’exemple, ne serait-il pas souhaitable, que tous les fonctionnaires d’Etat, notamment les enseignants, suivent une formation militaire obligatoire pendant 2 ou 3 mois ? Ils prolongeraient leur formation par un stage de même durée dans une entreprise ainsi que dans une grande institution : Justice, Police, Gendarmerie, Santé ? Une véritable « éducation nationale »,- dans l’acception première de ces termes -, des jeunes Français renforcerait grandement la cohésion et la résilience de la Nation.
Un effort de Défense insuffisant
Il n’est pas crédible de fixer un objectif à atteindre 3 ans après la fin du mandat présidentiel. Quel est le point visé pour 2022 ? Partant de 1,5% en 2017, il pourrait être proche de 1,8 % à cette échéance. Cet effort serait notoirement insuffisant pour retrouver les capacités abandonnées depuis des années faute de crédits, pour accélérer la modernisation des équipements hors d’âge dont le coût de maintien en condition devient exorbitant, enfin de préparer les nouveaux équipements qui seront nécessaires dans les années à venir.
Un effort de Défense s’élevant à 2% du PIB en 2022, c’est ce que demande avec raison le chef d’état-major des Armées qui connaît mieux les termes de l’équation missions = moyens que les technocrates qui ont conduit nos armées dans l’impasse actuelle. Rappelons que le seuil de 2% était celui retenu en1996 lors de la professionnalisation des armées…
Retrouver la fierté et la confiance
Enfin, il est maintenant impératif et urgent que nos responsables politiques rejettent toute forme de repentance au nom de la France. L’insulte systématique faite à nos pères tout comme l’instrumentalisation de notre Histoire nationale par démagogie, par idéologie ou par ignorance est dangereuse, voire suicidaire. Elle contribue à faire douter les Français et à faire perdre leur confiance dans les fondements de notre Nation. Elle alimente la désintégration de la cohésion nationale indispensable face aux menaces terroristes et à la compétition mondiale.
Une telle attitude, n’est pas de nature à favoriser l’assimilation des étrangers ou des récents naturalisés. En effet, leur nouveau pays, qui devrait susciter leur fierté, est présenté comme celui d’un peuple d’esclavagistes, d’exploiteurs, voire de criminels contre l’humanité. Ne nous étonnons pas que ces propos officiels et répétitifs nourrissent la haine et le désir de vengeance de certains jeunes Français.
Qui nous dit que la prochaine génération n’accusera pas demain, notre pays de « crime contre l’humanité » pour nos interventions d’aujourd’hui en Afghanistan et au Mali dans le cadre de la lutte contre les terroristes ? Si cette culpabilisation devait se poursuivre, il est probable que notre pays ne trouvera plus des hommes et des femmes acceptant de porter ses armes pour le défendre et protéger les Français ?
Des raisons d’espérer tout en restant mobilisés
Durant cette campagne, nous avons pu voir tous les candidats prononcer les mots patrie, patriote et patriotisme ; une marée de drapeaux tricolores envahissait les salles de réunion et la Marseillaise était chantée systématiquement. On peut s’en réjouir.
De même, la visite du nouveau Président à des blessés militaires le jour de son investiture, ainsi que sa volonté de rendre visite aux soldats en opérations pour son premier déplacement hors d’Europe peuvent laisser espérer qu’il a l’intention d’assumer pleinement sa responsabilité de chef des Armées.
Fort de ce constat, l’ASAF lance un appel à la mobilisation pour rappeler aux nouveaux dirigeants, chaque fois que cela sera nécessaire, leurs responsabilités en matière de Défense. Nos soldats doivent disposer dès aujourd’hui, mais aussi demain, des moyens nécessaires pour mener à bien les missions qui leur sont et seront confiées.
LA REDACTION de L’ASAF
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