Plus fort que la police de la pensée, voilà la gendarmerie de la pensée. En son nom, le président de la République vient de signer un décret frappant de la plus lourde des sanctions le chef d’escadron de gendarmerie Jean-Hugues Matelly: la radiation. La faute de ce gradé de 44 ans est jugée impardonnable par les généraux: brisant la sacro-sainte obligation de réserve, il a osé critiquer les conditions du rapprochement de la gendarmerie et de la police. Le commandant a sans doute oublié qu’un bon gendarme, de nos jours comme au début du siècle drnier, est un gendarme qui ne pense pas, ne s’exprime pas, mais obéit au doigt et à l’oeil. Peu importe à ses censeurs qu’il ne se soit pas exprimé sur la voie publique ni dans un meeting enfiévré, mais dans un article publié sous sa casquette de chercheur du CNRS. La grande muette ne souffre qu’une vérité; la vérité officielle. Une position qui risque de devenir intenable à l’heure où les gendarmes se retrouvent de plus en plus souvent à la même table que des flics dotés depuis longtemps de représentants « démocratiquement élus », selon le mot de Nicolas Comte, secrétaire général de l’organisation majoritaire (Unité-Police-SGP).
Intenable et contre-productive, parce que les pensées du trop intelligent Matelly servaient de soupape dans une maison où les délégués du personnel sont encore désignés par le général, et que la troupe risque fort d’en faire un martyr.
Extrait de Marianne du 3 au 9 avril 2010.
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