Question orale n° 1521S de Mme Hélène Conway-Mouret (Français établis hors de France – Socialiste et républicain) publiée dans le JO Sénat du 08/09/2016 – page 3804
Mme Hélène Conway-Mouret attire l’attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la sécurité des élèves scolarisés dans les établissements français à l’étranger. En France, le contexte sécuritaire a conduit le ministre de l’intérieur et la ministre de l’éducation nationale à renforcer la sécurité des écoles, collèges et lycées en demandant notamment la réalisation d’un exercice « attentat intrusion ». La décision a également été prise de suspendre plusieurs agents et enseignants « fichés S » dont le comportement pouvait laisser craindre qu’ils fussent en voie de radicalisation.
Aussi, elle souhaiterait connaître les mesures prises par le ministère des affaires étrangères, en concertation avec les administrations concernées, de façon à garantir la sécurité des élèves scolarisés dans les établissements français à l’étranger. Elle l’interroge plus particulièrement sur les mesures visant à éviter que les professeurs suspendus ou exclus de l’éducation nationale qui quitteraient le territoire puissent être recrutés localement par les différents opérateurs éducatifs français à l’étranger.
Réponse du Secrétariat d’État, auprès du ministère des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger publiée dans le JO Sénat du 16/11/2016 – page 17331
Mme Hélène Conway-Mouret. Dans le contexte de l’intervention de la coalition internationale contre Daech au Levant, et alors que nous venons de célébrer le triste anniversaire des attentats du 13 novembre 2015, le ministère des affaires étrangères et du développement international continue de recommander aux Français résidant à l’étranger de faire preuve d’une vigilance particulière.
Des efforts importants ont été accomplis pour créer un environnement sécurisé pour nos emprises et pour les salariés d’entreprises françaises basés à l’étranger. Une enveloppe globale de 60 millions d’euros a été débloquée cette année afin de poursuivre les travaux de sécurisation qui s’imposent. Ce budget permettra des investissements importants, notamment pour renforcer la sécurité passive des établissements de notre réseau d’enseignement français à l’étranger. Il peut s’agir, par exemple, du rehaussement de murs ou de la mise en place de moyens de surveillance accrus.
Mais la sécurité des élèves scolarisés dans le réseau ne repose pas seulement sur ces travaux : la mise en œuvre des procédures, les exercices, la formation des personnels, en un mot le facteur humain, sont fondamentaux. À l’instar de ce qui se pratique en France, des exercices de confinement et d’intrusion sont prévus dans les écoles, les collèges et les lycées français à l’étranger.
Néanmoins, monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous interroger sur les échanges d’informations entre les différents acteurs du réseau, s’agissant plus particulièrement de la gestion des personnels.
En France, plusieurs agents et enseignants de l’éducation nationale « fichés S », dont le comportement pouvait laisser craindre une radicalisation, ont été suspendus ou révoqués. J’aimerais connaître les mesures prises par le ministère des affaires étrangères et du développement international afin d’éviter que ces professeurs puissent être recrutés localement par les opérateurs éducatifs français à l’étranger.
Pouvez-vous également nous dire, monsieur le secrétaire d’État, si et, le cas échéant, comment l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger et la Mission laïque française se coordonnent dans la gestion de leurs ressources humaines face à ce risque ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Matthias Fekl, secrétaire d’État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger. Madame la sénatrice, vous connaissez très bien ces sujets, à propos desquels nous avons d’ailleurs régulièrement l’occasion d’échanger. Je vous prie d’abord de bien vouloir excuser le ministre des affaires étrangères, retenu par des obligations internationales.
L’une des principales mesures de la mission « Action extérieure de l’État », dans le projet de loi de finances pour 2017, est précisément la mise en place d’un « plan de renforcement de la sécurité des communautés et intérêts français et des moyens de lutte contre le terrorisme à l’étranger », à hauteur de plus de 62 millions d’euros.
Dans le cadre de ce plan, la moitié des crédits, soit 31,7 millions d’euros, sera affectée à la sécurité des réseaux diplomatiques, consulaires et culturels – instituts français et alliances françaises – et à la création de quarante postes de garde de sécurité. Un peu plus de 14 millions d’euros de crédits additionnels permettront notamment de créer vingt-cinq postes d’expert technique international de sécurité et de défense. Enfin, 16,6 millions d’euros seront consacrés à la sécurité des communautés à l’étranger, 14,7 millions d’euros étant dédiés en particulier à la sécurité des écoles et des lycées français, lesquels sont évidemment au cœur de notre attention.
Le ministère a par ailleurs engagé un plan de sécurisation des réseaux scolaires à l’étranger, dont l’étape initiale est la réalisation de l’audit de sûreté des 495 établissements scolaires homologués, qu’ils soient en gestion directe, conventionnés ou partenaires.
Une première vague d’audits a démarré cette année pour les écoles situées dans une quarantaine de pays où les menaces sont jugées élevées. Les audits doivent être achevés en zone prioritaire à la mi-2017. Ils se poursuivront ensuite dans les autres zones.
Ces audits, tous pris en charge par le Quai d’Orsay, sont effectués par des experts de la sous-direction de la sécurité diplomatique et de la défense du ministère, par des policiers et gendarmes mis à disposition par le ministère de l’intérieur et qualifiés en tant que référents sûreté, ou, à titre très exceptionnel, par des sociétés privées spécialisées.
Les conclusions et les rapports d’audit sont transmis aux ambassades, à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, qui a recruté en juillet 2016 un conseiller sécurité travaillant spécifiquement sur cette question, et aux chefs d’établissement, pour mise en œuvre des recommandations, lesquelles concernent soit des travaux de sécurisation, soit des adaptations des procédures de sécurité.
Enfin, en ce qui concerne la procédure de criblage des personnels, à ce jour, l’Agence de l’enseignement français à l’étranger n’a pas eu connaissance de la présence de personnels ou d’enseignants identifiés comme « fichés S » au sein de son réseau.
Afin d’éviter que les professeurs suspendus ou exclus de l’éducation nationale en France qui quitteraient le territoire national puissent ensuite être recrutés localement par un établissement de l’AEFE, celle-ci a appelé l’ensemble du réseau à une vigilance renforcée ; nous y sommes très attentifs.
En concertation avec les postes et le service de sécurité diplomatique du ministère, la procédure de criblage fait l’objet d’une application particulièrement rigoureuse, afin de garantir qu’aucun personnel recruté n’ait un profil incompatible avec la fonction envisagée. L’attention de l’ensemble du réseau, en la matière, est forte et permanente.
Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.
Mme Hélène Conway-Mouret. Monsieur le secrétaire d’État, je me réjouis de votre réponse. Je pense en effet qu’il faut rassurer les familles, qui constatent aujourd’hui les efforts accomplis au service de ce qu’on appelle la « sécurité passive ». Il est important de souligner que les personnels chargés d’encadrer les enfants et d’assurer leur sécurité font l’objet de la même vigilance.
Je me félicite tout particulièrement de l’audit en cours, du lancement d’un plan de renforcement de la sécurité et surtout des efforts consentis en matière budgétaire, dans le contexte que nous connaissons : on voit bien qu’il s’agit d’une priorité pour le Gouvernement. Il est important de le faire savoir aux familles !
Source: JO Sénat du 16/11/2016 – page 17331