(arrêt du 28 septembre 2000 de la Cour d’Appel de Paris – Cour Régionale des Pensions, publié dans la « Tribune des sous officiers » n° 155 juillet-août-septembre 2001)
Le gendarme V., après avoir bénéficié d’une autorisation de pratique du parachutisme sportif du Commandant de Légion de Gendarmerie, obtient un ordre de service du 13 décembre 1994 délivré par le Commandant de la Compagnie de Gendarmerie pour la pratique du parachutisme sportif pour la période du 16 au 19 décembre 1994. L’ordre de service précise que le gendarme V. est autorisé à assister « au programme d’activité du club sportif et artistique des armées à Pamiers (SMPS) pour la période de parachutisme sportif au Luc en cas de mauvaise météo report sur la zone de saut de Pamiers, Pau ou Gap et Ampuria ».
Le 17 décembre 1994, le gendarme V. effectue un saut à ouverture retardée au dessus de la zone de saut d’Empuria Brava (Espagne) à la suite duquel, au moment de l’atterrissage, il ressent une vive douleur à la cheville.
Après examen par la commission de réforme de Marseille, la direction des Pensions Militaires notifie au gendarme V. une décision portant rejet d’une demande de pension militaire d’invalidité au motif que l’accident ne peut être « rattaché au service » dans la mesure où « l’accident résulte d’un accident de saut sur un territoire étranger, dans un club n’ayant pas de convention avec la Section Militaire de Parachutisme Sportif du 9e Régiment de Chasseurs Parachutistes … La preuve de l’imputabilité à celui-ci n’a pas été apportée. La présomption légale d’origine ne peut être appliquée (Cf. articles L.2 et L.3 du Code des Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre) ».
Le gendarme V. conteste cette décision en saisissant le Tribunal des Pensions Militaires de Créteil qui, suivant jugement en date du 5 octobre 1999, fait droit à ses demandes en jugeant que le gendarme « produit l’ordre de service du 13 décembre 1994 le concernant sur une période de parachutisme sportif et pré voyant expressément le report des sauts sur la zone de saut d’Ampuria en cas de mauvaise météo, dûment signé et valable. Attendu dès lors que l’accident de parachutisme intervenu dans le cadre de cet ordre de mission sur l’une des zones de saut désignées doit être déclaré imputable au service » et de lui accorder le bénéfice d’une pension rétroactive au taux global de 25 %.
Le Service des Pensions militaires du ministère de la Défense forme appel en contestant le lien de l’accident avec le service et en soutenant que le jour de l’accident le gendarme était en réalité en position de « repos » et que ses activités étaient dénuées de tout rattachement au service.
La Cour régionale des Pensions a rejeté les moyens du ministre de la Défense et a confirmé intégralement le jugement en retenant le lien au service de l’accident et en accordant l’entier bénéfice de la pension suivant arrêt du 20 septembre 2000.
En effet, les dispositions de l’instruction n° 45 300/SE/CM/2 du 3 septembre 1973 et de l’instruction n° 32/301 DEF/ C 22 du 1er octobre 1974 précisent clairement que les militaires ayant une activité dans un club affilié à la F.C.S.A.D. sont considérés comme étant « en service », s’agissant des dommages qu’ils supportent personnellement pendant la pratique des activités du club ou pendant le transport lié à ces activités, à condition que
– les séances sportives et artistiques se déroulent dans le cadre des activités et sous le contrôle et la surveillance du club ;
– à défaut, lorsqu’elles échappent à la surveillance permanente du club, le chef de corps (ou une autorité subordonnée) ait délivré un ordre de service consigné sur un registre journal tenu par le club.
L’ordre de service ne peut être délivré que lorsque les participants remplissent les conditions de niveau technique suffisant, de licence de la Fédération avec couverture de tous risques éventuels et de connaissance des règles de sécurité en vigueur et d’un engagement à les respecter. Enfin, l’ordre de service doit contenir les mentions suivantes : programme d’activité, activités sportives visées, mode de transport et de véhicules, les dates et heures de départ et de retour.
Enfin, cette situation juridique a été confirmée par le cabinet du ministre de la Défense dans une note en date du 11 avril 1996 : « la position en service est reconnue aux militaires pratiquant des activités sportives, non seulement au sein des formations militaires, mais également dans le cadre des clubs nautiques et des clubs de la marine, des clubs de la fédération des clubs sportifs et artistiques de la défense et des sections militaires créées au sein des associations et clubs sportifs civils … Dès lors que la double condition de temps et de lieu définis et d’existence du contrôle militaire n’est pas remplie, il est impératif pour établir clairement le rattachement au service de délivrer selon le cas un ordre de service, individuel ou collectif, permanent ou ponctuel mais toujours nominatif ou un ordre de mission ».
On ne peut que se féliciter de la clairvoyance dont ont fait preuve les instances judiciaires, tant en première instance qu’en appel. A l’inverse, il est permis de s’étonner du refus initial de prise en charge de l’accident par les services des pensions militaires du ministère de la Défense, en raison de la prétendue absence de lien entre l’accident et le « service » en contradiction tant avec les dispositions des deux instructions ministérielles qu’avec les notes émanant du ministère de la Défense … dont dépend le service des pensions militaires.