Question écrite n° 23107 de Mme Colette Giudicelli (Alpes-Maritimes – Les Républicains)
publiée dans le JO Sénat du 08/09/2016 – page 3816
Mme Colette Giudicelli attire l’attention de M. le secrétaire d’État, auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire sur les mesures de réparation en faveur des orphelins de guerre. Les décrets n° 2000-657 du 13 juillet 2000 et n° 2004-751 du 27 juillet 2004 prévoient l’indemnisation des orphelins dont les parents furent victimes des persécutions antisémites et racistes durant la guerre de 1939-1945 ou victimes de la barbarie nazie, morts en déportation, fusillés ou massacrés pour actes de résistance ou pour des faits politiques. Des milliers d’orphelins dont les parents sont aussi morts pour la France, en temps de guerre, restent en dehors du dispositif de réparation. Ce sont des enfants dont l’acte de décès des parents mentionne pourtant « mort pour la France ». Le Défenseur des droits a relevé lui-même cette différence de traitement dans un courrier adressé aux présidents des deux chambres le 15 avril 2015. Aussi, elle souhaiterait connaître sa position sur cette situation, si elle lui paraît juste ou non et, dans la négative, les mesures qu’il entend prendre pour mettre les orphelins de guerre non indemnisés par les décrets sus cités sur le même pied d’égalité que ceux qui le sont.
Réponse du Secrétariat d’État, auprès du ministère de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire
publiée dans le JO Sénat du 20/10/2016 – page 4612
Très attaché au devoir de mémoire et comprenant la détresse et la souffrance de celles et ceux que la guerre a privés de leurs parents, le secrétaire d’État chargé des anciens combattants et de la mémoire accorde une attention toute particulière à la demande d’extension des dispositifs mis en place par les décrets n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites et n° 2004-751 du 27 juillet 2004 instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie durant la Deuxième Guerre mondiale. Ainsi que le prévoit le code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre (CPMIVG), tout orphelin de guerre peut percevoir, ou a pu percevoir, une pension spécifique jusqu’à son 21ème anniversaire. En outre, tous les orphelins de guerre et pupilles de la nation, quel que soit leur âge, sont ressortissants de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre et peuvent bénéficier, à ce titre, de l’assistance de cet établissement public, dispensée notamment sous la forme d’aides ou de secours en cas de maladie, absence de ressources ou difficultés momentanées. Cependant, il est souligné que l’indemnisation mise en place par les décrets de 2000 et 2004 est plus particulièrement destinée aux victimes de l’extrême barbarie nazie, qui renvoie à une douleur tout à fait spécifique, celle d’avoir perdu un père ou une mère, ou parfois les deux, dans un camp d’extermination. En effet, c’est fondamentalement le caractère particulièrement insoutenable d’extrême barbarie nazie propre à ces disparitions spécifiques à la Seconde Guerre mondiale, le traumatisme dépassant le strict cadre d’un conflit entre États, qui est à l’origine de ce dispositif réservé aux enfants dont les parents, résistants ou ayant fait l’objet de persécutions antisémites ou raciales, sont décédés en déportation ou ont été exécutés dans les circonstances définies aux articles L. 274 et L. 290 du CPMIVG. Ce dispositif doit rester fidèle à sa justification essentielle qui est de consacrer solennellement le souvenir des victimes de la barbarie nazie, à travers leurs enfants mineurs au moment des faits. C’est pourquoi le Gouvernement a décidé de maintenir cette spécificité pour ne pas porter atteinte à la cohérence de ces décrets. Au-delà de cette analyse, il a été constaté que l’examen de plusieurs dossiers a laissé apparaître la difficulté d’appliquer des critères stricts permettant de distinguer des situations extrêmement proches. La mise en œuvre de ces critères doit donc s’opérer de manière éclairée, afin de donner aux deux décrets leur pleine portée, dans le respect de leur ambition initiale d’indemniser la souffrance des orphelins dont les parents ont été frappés par cette barbarie. Aussi, le Gouvernement s’est engagé en faveur d’un réexamen au cas par cas des dossiers en cause, afin de garantir une égalité de traitement, tout en confirmant la nécessité de préserver le caractère spécifique de cette indemnisation dont l’extension à tous les orphelins de guerre ne saurait être envisagée. C’est ainsi que, en application des conclusions de la commission nationale de concertation mise en place en 2009 à la suite du rapport du préfet honoraire Jean-Yves Audouin, 663 dossiers ont été réexaminés dont 200 ont trouvé une issue favorable.
Source: JO Sénat du 20/10/2016 – page 4612