Question écrite n° 17481 de Mme Nicole Duranton (Eure – Les Républicains) publiée dans le JO Sénat du 30/07/2015 – page 1787
Mme Nicole Duranton appelle l’attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la position française quant à la saisine de la Cour pénale internationale par le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies (ONU), au motif de génocide et de crimes contre l’humanité commis par l’organisation dite de l’État islamique. La plainte examinée en la matière par la Cour pénale internationale se heurte à de nombreuses limites juridiques affectant sa compétence, notamment d’ordre territorial. En effet, les pays dans lesquels se déroulent ces crimes et autres atrocités ne sont pas parties au statut de Rome. De plus, la Cour n’a pas compétence s’agissant des ressortissants de ces pays, pourtant parmi les principaux instigateurs et responsables des exactions. Seul un engagement ferme des États parties au statut du Rome et membres de la coalition contre l’organisation dite de l’État islamique pourrait favoriser la saisine de la cour par le Conseil de sécurité de l’ONU et donnerait à la Cour pénale internationale les fondements juridiques d’instruire une telle plainte.
Elle lui demande de lui préciser quelles sont les démarches engagées par la France en ce sens et quelles solutions juridiques pourraient être envisagées, afin que les responsables de ces crimes contre l’humanité puissent être poursuivis, bien que n’appartenant pas à une organisation gouvernementale officielle reconnue. Elle lui demande, en outre, dans quelle mesure la France pourrait accompagner les victimes survivantes dans leur démarche contre leurs bourreaux.
Transmise au Ministère des affaires étrangères et du développement international
Réponse du Ministère des affaires étrangères et du développement international publiée dans le JO Sénat du 15/09/2016 – page 3906
La mission d’enquête sur l’Irak du Haut-Commissariat aux droits de l’Homme et la Commission d’enquête internationale indépendante sur la Syrie ont fait état de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité commis essentiellement par le régime syrien, s’agissant de ce pays, et par Daech en Irak et en Syrie, et, dans le cas des Yézidis d’Irak, d’un possible crime de génocide – crimes susceptibles de relever de la compétence de la Cour pénale internationale. La France a condamné de façon très ferme ces crimes et condamne de façon générale toute violence à l’encontre des civils, quelle que soit leur appartenance religieuse ou ethnique. Engagée de longue date pour la lutte contre l’impunité, la France a présenté en mai 2014 un projet de résolution du conseil de sécurité des Nations unies en vue d’une saisine de la CPI des crimes commis en Syrie. Il n’a pu être adopté, en raison du veto de la Russie et de la Chine. La France continue d’encourager le Conseil de sécurité à saisir la Cour pénale internationale, afin qu’elle puisse juger les auteurs de ces crimes. La France poursuit ses efforts de mobilisation en faveur des personnes persécutées par Daech, notamment sur le fondement de leur appartenance ethnique et religieuse. Elle soutient les efforts de documentation de ces crimes, engagés par les organisations internationales et la société civile, en vue de donner une voix aux victimes mais aussi de préparer le travail de la justice. Elle finance des projets dans ce domaine. La France a également saisi la justice française. Ainsi, au total, 353 procédures judiciaires en lien avec la Syrie ont été ouvertes au pôle anti-terroriste de Paris. Par ailleurs, depuis le début de l’offensive de Daech en Irak, en août 2014, la France s’est mobilisée afin de venir en aide aux populations affectées et apporter un soutien tout particulier aux personnes appartenant aux communautés chrétiennes et yézidies, particulièrement visées. C’est dans cet esprit que la France a organisé le 27 mars 2015, à l’occasion de sa présidence du Conseil de sécurité, une réunion spéciale consacrée aux populations persécutées au Moyen-Orient du fait de leur appartenance ethnique ou religieuse. Dans la continuité de la réunion du Conseil de sécurité, la France et la Jordanie ont co-présidé le 8 septembre 2015 à Paris une conférence ministérielle sur les victimes de violences ethniques et religieuses au Moyen-Orient, ouverte par le Président de la République. La conférence a abouti au Plan d’action de Paris, qui identifie les actions concrètes à mettre en œuvre en soutien des populations concernées.
Source: JO Sénat du 15/09/2016 – page 3906