Avalanche de Valfréjus : quelles responsabilités pour l’armée ? (Par François Carrel, Correspondant à Grenoble)

Cinq légionnaires sont morts dans la catastrophe qui a eu lieu lundi près de la station savoyarde. Les professionnels de la montagne s’interrogent car les bulletins météo avaient signalé un danger.

Avalanche de Valfréjus : quelles responsabilités pour l’armée ?

L’avalanche qui a emporté, lundi, un groupe de soldats près de la station savoyarde de Valfréjus, a tué cinq d’entre eux, âgés de 21 ans à 33 ans. Deux autres, toujours hospitalisés, sont grièvement blessés mais leurs pronostics vitaux ne sont pas engagés, selon la 27e brigade d’infanterie de montagne (Bim) dont ils dépendent.

Le groupe décimé était composé d’une cinquantaine de légionnaires du 2e régiment étranger de génie de Saint-Christol. Ce régiment, basé sur le plateau d’Albion (Vaucluse), est rattaché à la 27e Bim qui regroupe les forces alpines de l’armée de terre, dont trois bataillons de chasseurs alpins.

Ces légionnaires étaient en stage hivernal afin de décrocher leur brevet d’alpiniste et de skieur militaire, obligatoire au sein de la 27e Bim. Après une première semaine d’initiation au ski, ils étaient encore néophytes en montagne. Ils étaient encadrés par trois cadres de leur régiment ayant la qualification de «chef de détachement haute montagne», obtenue à l’Ecole militaire de haute montagne de Chamonix (EMHM), et par huit autres sous-officiers ou soldats formés plus succinctement à l’EMHM.

L’avalanche s’est déclenchée alors qu’une partie du groupe remontait, sur des skis de randonnée, un raide vallon menant au col du Petit Argentier, situé à 2 600 mètres d’altitude, face aux pistes de Valfréjus. Selon Franck Bouchayer, «officier montagne» de la 27e Bim, les hommes de tête étaient parvenus aux deux tiers de cette pente orientée nord-est et haute de 300 mètres de dénivelé. En aval, 18 soldats ont été ensevelis ou secoués par l’avalanche. Le reste du groupe, resté au pied de la pente, n’a pas été touché.

Un espacement sans doute insuffisant

Les professionnels de la montagne ne comprennent pas. Les bulletins locaux d’estimation du risque d’avalanche des 17 et 18 janvier, émis par Météo France, étaient explicites sur la menace pour des skieurs dans les pentes raides situées «sous le vent», au-dessus de 2 200 mètres. L’un des six pisteurs-secouristes de Valfréjus présents sur le secours, Régis Tuaillon, a confié son amertume au Dauphiné libéré : «Avec les vents qu’on a eus la semaine dernière, c’était l’exposition maximum […]. C’était suicidaire de partir dans un endroit pareil, surtout à cinquante la queue leu-leu comme ils l’ont fait». Simon Teppaz, du Bureau des guides Savoie-Maurienne, s’interroge à mots pesés : «C’était une pente susceptible d’être avalancheuse ce jour-là. Par ces conditions, avec un groupe aussi imposant, n’aurait-il pas été plus prudent de trouver un itinéraire moins exposé ?»

Une «enquête de commandement» devrait être, selon l’usage, lancée par l’armée de terre, en parallèle à l’enquête menée par les gendarmes sous l’autorité du parquet d’Albertville (Savoie). A la 27e Bim, Franck Bouchayer précise : «Il n’y a pas eu d’entorse au règlement, le fonctionnement du système militaire de montagne ne me paraît pas remis en cause. Il nous reste à comprendre ce qui s’est précisément passé et les responsabilités de chacun. A ma connaissance, l’objectif du groupe validé avant le début du stage n’était en effet pas d’aller au col du Petit Argentier : il devait rejoindre le sommet du télésiège de Punta Bagna, via le vallon situé au pied de ce col, tout en profitant de pentes sur le parcours pour travailler des savoirs faire « montagne » spécifiques.» L’enquête devra établir pourquoi et comment les militaires se sont engagés si haut sous le col du Petit Argentier, si nombreux et avec un espacement sans doute insuffisant face aux risques nivologiques avérés.

Source: http://www.liberation.fr/

 

Cette publication a un commentaire

  1. jacques

    Si je comprends bien, M. Renaud Marie de Brassac avait donc parfaitement raison de poser la question de la responsabilité des morts et des blessés résultant de cet accident dramatique.

    Il est lamentable de ne pouvoir discuter sereinement d’une question qui dérange, sans tomber dans les insultes et l’invective.

    Certains, aveuglés par ce qu’ils croient être de l’esprit de corps, ont du mal à regarder la réalité en face.

    Espérons que ce drame leur ouvrira un peu les yeux et les fera progresser.

    Un montagnard retraité

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