En droit des militaires, une question demeure récurrente : la spécificité militaire peut-elle justifier toutes les différences de traitement ?
La problématique de l’appréciation de l’aptitude ou non d’un militaire uniquement par un médecin militaire en est un exemple.
En effet, la détermination et le contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire relève de la compétence des médecins du service de santé des armées.
L’article L713-12 du Code de la Sécurité Sociale énonce :
« Les services de santé militaires restent seuls compétents pour toutes les décisions pouvant avoir des conséquences statutaires ou disciplinaires ».
Il en résulte que lorsque l’aptitude d’un militaire est discutée, seules les expertises médicales effectuées par un médecin militaire font foi.
Une telle situation rend particulièrement difficile la contestation de son aptitude ou de son inaptitude par le militaire requérant dès lors qu’il lui est quasi-impossible d’apporter la preuve contraire.
Lesdites dispositions pourraient ainsi ériger les constatations des médecins militaires comme des preuves irréfragables alors que, par nature, il s’agit de l’appréciation de faits juridiques qui doivent nécessairement être l’objet d’un examen contradictoire.
En effet, l’enjeu est là : que doit faire le requérant fasse à une preuve impossible ?
L’aptitude ou l’inaptitude d’un militaire étant un élément factuel, elle devrait être prouvée par tout moyen et notamment par des expertises et des certificats médicaux effectués par des médecins civils, davantage lorsqu’il s’agit de spécialistes ou de documents médicaux plus récents.
D’ailleurs, si selon l’adage « actori incombit probato », le demandeur a la charge de la preuve, il est de jurisprudence constante que le juge administratif exige cette preuve que dans la mesure où le demandeur a les moyens matériels de la fournir et ce d’autant plus que ce magistrat demeure entièrement libre dans l’administration des modes de preuve.
Ainsi, le juge administratif peut se contenter de simples commencements de preuve ou de simples présomptions.
Une telle négation de la valeur des avis et examens des médecins civils est surprenante dès lors que dans d’autres circonstances, Monsieur le Ministre de la Défense accorde pleine valeur probante aux constatations et diagnostics de médecins civils.
Il en est notamment ainsi dans le cadre des procédures de pensions militaires d’invalidité pour lesquelles l’appréciation de l’invalidité du militaire se fait à partir du dossier médical civil et militaire et où sont commis pour expertise des médecins civils.
En conclusion, la question est alors de savoir si les médecins tant civils que militaires forment une seule et même famille de professionnels de la santé titulaires d’un diplôme de docteur en médecine ayant pour but de soigner les maux de l’être humain – ils seront alors des frères médecins – ou s’il s’agit de cousins éloignés tentant chacun de soigner des êtres différents ?
© MDMH – Publié le 23 octobre 2015
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C’est également le cas dans toutes les entreprises de droit privé ou l’aptitude au travail est décidé par la médecine du travail et pas par n’importe quel médecin civil.
Tout comme dans le civil, il existe des voies de recours aux décisions d’aptitudes en milieu militaire qui sont bien connues de tous.
Il semble étonnant de vouloir s’attaquer au Service de Santé des Armées dont les praticiens décident en toute indépendance et avec une même éthique de l’aptitude au poste de travail des militaires en suivant les textes relatifs à l’aptitude dans les armées qui laisse peut de chance à la subjectivité.
Rappelons tout de même que les médecins du SSA (tout comme les médecins du travail) ne sont que des conseillers du commandement (ie de l’employeur dans le civil) dans l’évaluation de l’aptitude au poste de travail et que le commandement peut aller outre la décision du médecin des armées.
L’avancement des médecins du travail, leur notation, leurs affectations ne dépendent pas des chefs d’entreprise, dont ils évaluent médicalement l’aptitude des salariés. Eux, sont indépendants. Pas les médecins militaires ! L’Adefdromil a de multiples histoires à raconter à ce sujet.
La médecine militaire est à la médecine ce que la musique militaire est à la musique : apprécier des aptitudes en fonction de textes spécifiques et fournir le soutien médical lors des opérations. Les hôpitaux devraient être fusionnés dans les agences régionales de santé. Les médecins militaires sont au service de l’armée, pas des patients.
Comment expliquer que les hôpitaux militaires continuent d’être gérés par des médecins. Et comme par hasard, ils sont mal gérés.
Ces mêmes médecins « généraux » qui n’ont pas vu un patient depuis des lustres, redeviennent médecins quand ils quittent le service et vont faire des piges dans des cabinets privés. Cela fait peur.
On ne peut être à la fois gestionnaire d’hôpital, gestionnaire des ressources humaines (mauvaise gestion des RH, méconnaissance et violation des droits, etc.) et médecins. Le coût pour la nation est disproportionné par rapport au service de faible qualité qui est rendu.
On pourrait parler aussi de la psychiatrie militaire, médecine d’élimination et non de soins. Lorsque ça se passe avec un militaire, c’est qu’il ne parvient pas à s’adapter, donc il faut le faire partir : congés-maladie, puis CLDM ou réforme. Les médecins s’arrogent des droits qu’ils n’ont pas. On a vu des psychiatres militaires envoyés en Afghanistan pour résoudre un problème de commandement et faire un beau rapport au retour ! On a vu un psychiatre militaire, qui refusait de faire reprendre le service à un militaire, être désavoué par une expertise judiciaire…
Faut-il aussi déballer les erreurs de diagnostic plus fréquentes que dans le reste de la médecine, les erreurs de soins, etc ?
La Cour des comptes a pointé à maintes reprises la piètre gestion de la médecine militaire et son coût.
Il y a véritablement des réformes profondes à opérer et sans anesthésie !
Jacques BESSY
Président de l’Adefdromil
Je ne sais pas ce que les médecins militaires ou l’un d’eux vous a fait, mais cela nous donne un vomit qui démontre l’absence de connaissance de son sujet.
c’est navrant
Dès l’instant qu’on dit des choses désagréables, mais basées sur des faits, on est accusé d’être motivé par des ressentiments personnels.
C’est ridicule.
Il est exact qu’à l’Adefdromil, on voit beaucoup de dysfonctionnements, ce qui influence forcément notre opinion.
Il y a sûrement de nombreux cas où les médecins militaires ont fait ou font leur travail correctement, mais ce ne sont pas ceux la que les adhérents nous rapportent…
Je maintiens qu’il y a des gisements d’économie considérables dans la réorganisation indispensable du Service de Santé des Armées, et sans que le soutien aux combattants ne s’en trouve altéré.
J Bessy
Dès qu’une réflexion, une critique voire même une proposition est faite par un responsable de l’Adefdromil, il y a toujours un ou des cerveaux étriqués qui se manifestent pour jeter l’anathème,sous couvert de l’anonymat, sans aucune preuve ou début de preuve.
Ce ou Ces petits cerveaux dont on serait curieux de connaître les appréciations portées par leur hiérarchie sur leurs mérites, se croient toujours être les seuls détenteurs de la vérité…. révélée! Ils se croient propriétaires de l’Institution alors qu’ils ne sont, comme tout un chacun, que de passage au sein de celle-ci!
Moi, ce que je sais d’expérience, c’est que ce ou ces petits cerveaux sont potentiellement des clients pour l’Adefdromil car nul n’est à l’abri d’un retour de manivelle. Et lorsque l’on se retrouve face à la machine infernale à broyer les hommes ou les femmes, on perd beaucoup de sa superbe et on commence seulement à comprendre ce qu’est la solitude et la nécessité d’avoir une main tendue. Faire preuve d’humilité n’a jamais tué personne.
Je confirme les écrits du président de l’Adefdromil. Oui il y a beaucoup à dire sur la gestion du service de santé des armées, oui il y a beaucoup à dire sur la manière dont sont écartés par la voie psychiatrique ceux ou celles qui gênent.
Si une simple réflexion du président de l’Adefdromil donne un vomi, soyez assurés que le traitement d’un dossier mettant en cause le service de santé nous donne parfois envie de dégueuler!
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