Question écrite n° 17252 de M. Jean-Paul Fournier (Gard – Les Républicains) publiée dans le JO Sénat du 09/07/2015 – page 1617
M. Jean-Paul Fournier attire l’attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur les destructions massives de sites antiques qui s’inscrivent dans une stratégie globale d’effacement systématique et délibéré d’une culture de la part de l’État Islamique (EI).
Outre les bouddhas de Bâmiyân dynamités au nord-est de Kaboul en 2001, les trésors du musée de Kaboul, de Ghazni, et d’Hérat ont été saccagés, mais aussi, plus récemment, la bibliothèque de Tombouctou, les remparts de Ninive ou le musée de Mossoul. Chacun tremble aujourd’hui pour les vestiges de Palmyre dont le seul nom résonne comme un symbole nodal entre Orient et Occident. Or la destruction de ces joyaux historiques, dont la plupart sont classés au patrimoine mondial de l’UNESCO, efface violemment une partie de l’histoire de l’Humanité et constitue à la fois des tragédies culturelles mais aussi des crimes de guerre au regard du statut de Rome. Pas moins de 2 000 sites archéologiques et culturels répertoriés sont ainsi aux mains de l’État Islamique et l’ensemble des objets d’antiquité qui ne sont pas détruits font l’objet d’un trafic illicite qui est, avec le pétrole et les rançons, l’une des principales sources utilisées pour financer les activités terroristes.
Il demande ainsi ce que le Gouvernement entend faire, notamment dans le cadre de la convention France-UNESCO, mais aussi par le biais des leviers diplomatiques et militaires, pour donner suite de façon concrète et efficace aux demandes de sauvetage, sécurisation de sites et reconstruction lancées à la communauté internationale par l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture.
Les récentes et traditionnelles journées de l’archéologie du mois de juin sont de surcroît, à bien des égards, une occasion supplémentaire de rappeler qu’elle est une science indispensable à la compréhension de notre histoire mais aussi un impératif éthique essentiel qui oppose la connaissance et la raison à la folie destructrice de l’obscurantisme.
Réponse du Ministère des affaires étrangères et du développement international publiée dans le JO Sénat du 22/10/2015 – page 2493
La France est l’un des membres de la Coalition contre Daech, qui réunit une soixantaine d’États et agit résolument contre le groupe djihadiste. S’agissant de patrimoine, la France agit dans le cadre des conventions de l’UNESCO pour la protection des patrimoines culturels matériel et immatériel, notamment en mettant en œuvre les dispositions de la Convention de 1970 relatives à la lutte contre le trafic illicite de biens culturels et celles de la convention de La Haye de 1954 sur la protection du patrimoine en situation de conflit armé. La France entretient à cet égard une coopération étroite avec l’UNESCO pour mobiliser la communauté internationale. Elle a participé à l’élaboration des plans d’action de l’UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine culturel en Syrie en 2013 et en Irak en 2014, au service desquels elle apporte toute son expertise. Ces plans d’action portent sur l’inventaire des collections et la surveillance des sites archéologiques, ainsi que sur la formation au contrôle des frontières. Elle a soutenu les résolutions prises à l’UNESCO pour protéger le patrimoine culturel de l’Irak, de la Syrie et plus largement dans les zones de conflit. Au Conseil de sécurité, la France a veillé à ce que soient introduites dans la résolution 2199, des dispositions permettant de lutter contre le pillage et le trafic illicite de biens culturels irakiens, qui financent le terrorisme. La France est au cœur de la mobilisation internationale sur cette question. Elle a organisé au Conseil de sécurité une réunion ministérielle sur les victimes de violences ethniques et religieuses et, le 8 septembre 2015 à Paris, une conférence internationale au cours de laquelle le ministre des affaires étrangères et du développement international a appelé à lutter contre la destruction intentionnelle du patrimoine culturel et à lutter contre l’impunité. Un plan d’action a été adopté qui prévoit des mesures de protection et de préservation. Le Président de la République a confié au directeur du musée du Louvre, M. Jean-Luc Martinez, une mission d’expertise sur les moyens d’accroître l’efficacité des instruments juridiques internationaux et mécanismes existants dont le rapport, comportant des recommandations concrètes et opérationnelles, sera rendu au début du mois d’octobre. La Bibliothèque nationale de France et l’Institut français au Proche-Orient se sont vu confier des missions de cartographie et de préservation de ces patrimoines.
Source: JO Sénat du 22/10/2015 – page 2493