Afghanistan : le coût du soldat « coalisé » avoisine les 354 000 euros par an…

Au bas mot, un soldat canadien de l’ISAF (Force internationale d’assistance et de sécurité) revient, hors solde, hors acheminement initial, à environ 525 000 CAD l’an. Soit près de 354 000 euros. C’est ce que révèle un envoyé spécial du CanWest News Service qui s’est rendu auprès des responsables de l’intendance et du « train des équipages » des Forces canadiennes en Afghanistan. Les montants relatifs au GI en Afghanistan seraient comparables, selon le Pentagone. En multipliant cette somme par l’effectif du contingent français sur place (hors ex-républiques soviétiques ou océan Indien), soit plus de 3 000, la somme dépasserait annuellement le milliard d’euros…

L’article de Mathew Fisher, publié par Canada.com le 9 janvier 2010, est assorti de multiples « dièses » quant à la minoration de cette estimation. 1,5 milliards de dollars canadiens pour 2 850 militaires sur le sol afghan en 2009, c’est fortement restrictif, soit une vue partielle et instantanée des dépenses engagées.

Vue partielle puisqu’elle n’inclut pas le ravitaillement depuis le Canada, les prestations d’entreprises partenaires (la France utilise aussi du personnel afghan et des entreprises françaises ou étrangères pour la maintenance et l’ordinaire des troupes), le coût des opérations en hélicoptères canadiens ou loués (la France va en fournir à ses troupes), les investissements en bâtiments, bases, et diverses insfrastructures. Partielle aussi puisque les rémunérations des entreprises ou supplétifs afghans qui effectuent des travaux de « pacification » (construction de routes, d’écoles, dispensaires…) ne sont pas incluses dans l’estimation canadienne

Vue instanée aussi. Si elle ne prend pas en compte les soldes versées annuellement, souvent majorées, ni les incidences sur les futures retraites ou les pensions d’invalidité, ni la prise en charge des pathologies graves sur le long termes n’entrent en ligne de compte. Le problème des répercussions de la guerre en Irak et en Afghanistan a fortement sensibilisé l’opinion britannique du fait de la précarité et des faibles revenus des grands blessés rendus à la vie civile. En France, les indemnisations étant heureusement plus élevées, le problème à long terme se pose – pour le moment – très différemment. Par ailleurs, les sommes versées à des autorités compréhensives (les Italiens rétribuaient l’adversaire dans la région de Kapisa avant qu’elle ne passe sous contrôle français, les Britanniques avaient passé un accord chiffré pour se retirer de Bassorah en Irak…) ne peuvent guère être estimées si la pratique venait à être adoptée. Toutefois, cette approche, est contrecarrée par le recours – très coûteux – à des interventions en hélicoptères et l’emploi de drônes. D’un côté, cet effort financier épargne des pertes militaires, de l’autre, il ralentit la volonté d’être au contact des populations pour mettre, par la coopération, une fin possible à la mission globale. De plus, les groupes d’insurgés ne tenant plus le terrain tendent à avoir recours de plus en plus aux bombes artisanales,  pesant désormais jusqu’à 45 kilos d’explosifs, voire aux attaques suicidaires au sein même de la population. Est-ce pour contrebalancer un repli sur des bases sûres que, dans la province de Surobi, la Légion étrangère a lancé une radio émettant en patchoune avec deux animateurs locaux ? Le lancement de cette radio a été estimé à 10 000 euros et les unités françaises vont distribuer 4 000 radios à piles et capteurs solaires. Des distributions de téléphones portables sont aussi envisagées…

Ce genre d’angle de couverture du conflit afghan est assez typique de la presse nord-américaine. Fin juin 2009, le Devoir de Montréal titrait « Afghanistan – le coût de la guerre a doublé en quatre ans ». Le ministère de la Défense canadien a publié ses estimations pour l’année 2010-2011, près de 1,5 milliard de CAD, montant devant régresser à 779 millions en 2011-2012 car le Canada a décidé de retirer son contingent du théâtre des opérations (« pas question de garder des troupes là-bas après juillet 2011, » a déclaré le responsable pour l’Afghanistan au ministère de la Défense canadienne). De même, après la mort d’une journaliste, Michelle Lang (34 ans) et de quatre soldats canadiens victimes d’une bombe artisanale ayant frappé leur véhicule blindé, la presse canadienne porte un autre regard sur l’activité des envoyés spéciaux. La discrétion avec laquelle les deux journalistes de FR3 ont agi pour rejoindre le site de construction d’une route est estimée plus prudente qu’inconsciente par la presse canadienne. Les bombes artisanales sont désormais fabriquées industriellement ou presque au Pakistan et les détonateurs en graphite ainsi que la charge de nitrate d’ammonium sont devenus indétectables par des moyens classiques et il faudrait entraîner spécifiquement des chiens pour tenter de les déceler.

Le coût de la guerre (Irak, Afghanistan, Pakistan…) pour les États-Unis avoisinerait le cinquième de leur PIB s’il est tenu compte des dépenses cachées, des prédictions sur le long terme, des intérêts croissants de la dette générée par l’effort de guerre, &c. Outre les vies humaines, les destructions d’habitats, le coût pour la population afghane est lourd : les retombées positives sont contrebalancées par les atteintes générales à l’environnement (sable prélevé dans les rivières pour construire ou fortifier à l’occidentale, déchets non retraités ni recyclés, mode de vie modifié accentuant la pauvreté des plus pauvres). Lorsque les désormais très lourdes charges des bombes et mines artisanales explosent, les habitations, le matériel agricole aux alentours sont aussi détruits, comme cela s’est produit lors de l’explosion du tunnel ayant provoqué la mort de la journaliste canadienne. Les habitants blâment davantage la guerre en général, et la présence massive des troupes coalisées, que les talibans ou d’autres insurgés…

La guerre en Afghanistan, plus que celle d’Irak, a aussi de lourdes conséquences pour l’armée britannique. Selon une récente étude publiée par The Independent, désormais, jusqu’à 22 % du personnel militaire combattant n’est plus en état de participer à des opérations de guerre. « Plus de 16 000 militaires ne sont plus en état de combattre » (sur un total de 73 000 militaires), est-il estimé. Aussi le ministère de la Défense britannique a-t-il lancé une campagne de recrutement pour porter les effectifs à 102 000. Mais un ancien officier devenu député émet des doutes sur les capacités de trouver assez d’instructeurs compétents pour les nouvelles recrues. L’armée britannique, depuis 2001, a compté environ cinq blessés au combat pour chaque tué (1 018 blessés pour 246 tués en Afghanistan), auxquels ils faut ajouter près de 2 200 hospitalisés pour d’autres raisons (maladies, accidents hors zones de combat). Plus de 9 000 militaires sont estimés aptes à rejoindre un champ d’opérations, mais non de participer aux combats. La France, pour sa part, déploie ses troupes sur des zones en Afrique, par exemple, en sus des zones où elle côtoie l’armée britannique, comme au Kosovo.

Samedi 9 janvier 2009, c’est un journaliste britannique qui a sauté sur une mine. Il était entouré de soldats, c’était son nième séjour en Afghanistan. Libération a illustré la dépêche d’une photo de soldat muni d’une « poêle à frire » (un détecteur de métal). Dérisoire si ce n’était affligeant : les nouvelles mines ne sont plus ainsi détectables. Rupert Hamer, pas plus de Michelle Lang, n’étaient inconscients des dangers, pas davantage, quoi qu’on en dise, que les agents de la CIA et de Xe (ex-Blackwater) qui ont été victimes d’un attentat-suicide. Il devait certes y avoir de l’inconscience, de la part des journalistes qui visitaient les tranchées du Chemin des Dames, lors des offensives meurtrières de la Grande Guerre… Mais que dire de l’état-major ?

Tant les journalistes que les spécialistes de l’Afghanistan ayant couvert la guerre soviétique,

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