Commission de la défense nationale et des forces armées
Présidence de Mme Patricia Adam, présidente
La séance est ouverte à dix-sept heures.
Mme la présidente Patricia Adam. Je suis heureuse d’accueillir le général Alain Coroir, délégué aux réserves de la gendarmerie nationale.
Mon général, la gendarmerie est souvent citée en exemple concernant la question des réserves, sur laquelle nous travaillons en vue d’un prochain rapport. Votre audition doit nous permettre de comprendre les raisons de cette réussite et de mesurer les enseignements que l’on peut en tirer.
Général Alain Coroir, délégué aux réserves de la gendarmerie nationale. Je suis heureux de pouvoir m’exprimer devant vous.
Notre modèle de réserves est spécifique et non forcément transposable.
Notre dispositif, qui est déjà ancien, s’est adapté au fil du temps à notre implantation territoriale – la gendarmerie étant présente sur 95 % du territoire – ainsi qu’à nos missions de sécurité publique, qui sont variées, et à nos moyens.
Il fait l’objet d’une gestion très fine, opérée au niveau des régions et des départements. Le logiciel Minotaur nous permet en effet, par le biais d’une connexion directe de nos réservistes avec le gestionnaire, d’avoir une gestion souple et réactive.
S’ajoute à cela une forme d’intéressement pour nos employeurs que sont les commandants de région ou de groupement, dans la mesure où ils se voient attribuer un budget au titre de la réserve, qu’ils gèrent à leur guise en fonction de leurs besoins et de leurs priorités.
Ce dispositif contribue véritablement à la performance opérationnelle de la gendarmerie : nous ne pouvons plus nous priver de nos réservistes. Nous sommes passés au cours de ces dernières années d’un concept de force d’appoint ponctuel à un concept de renfort permanent en unités constituées de réservistes. Ces derniers sont pleinement intégrés à la manœuvre auprès des unités d’active : nous avons ainsi en moyenne 1 300 réservistes venant au quotidien renforcer celles-ci.
Le volume des réservistes dans chacun des départements est calculé au prorata des effectifs d’active, de façon à avoir une bonne répartition territoriale, certains départements étant beaucoup plus sollicités que d’autres.
Ce dispositif participe directement au lien armée-Nation : 70 % de nos réservistes sont en effet issus du milieu civil et suivent une formation militaire de gendarmerie pour intégrer la réserve – les 30 % restant étant d’anciens gendarmes ou militaires qui, à leur retraite, souscrivent un contrat pour poursuivre une activité pendant cinq ans au-delà de la limite d’âge du grade détenu dans la réserve. Cela leur donne une connaissance de la gendarmerie mais aussi du métier militaire et de la sécurité. Par ailleurs, 15 % de nos recrutements de sous-officiers proviennent de réservistes. Sachant que le nombre de réservistes voulant faire carrière en gendarmerie est plus important, notre sélection est assez rigoureuse.
Si les femmes représentent seulement 20 % des effectifs de la réserve, cela s’explique par le fait que 30 % de notre recrutement proviennent de retraités, qui sont essentiellement des hommes, la féminisation de la gendarmerie ayant commencé dans les années 1970. Mais le recrutement réalisé dans le civil, notamment auprès des jeunes, est équilibré, puisque nous recrutons globalement autant de filles que de garçons. Je rappelle que ceux-ci sont soumis non seulement à une visite médicale, mais aussi à des tests psychotechniques. À l’issue de cette sélection, ils reçoivent une formation de quinze jours, puis participent au service, sont armés et placés sur le terrain.
Notre dispositif est propice au recrutement, du fait de notre présence sur le territoire, de la variété et de l’intérêt des missions, de notre ouverture sur le monde civil, des possibilités de carrière qui sont offertes et de la publicité que font eux-mêmes les réservistes dans leur environnement immédiat, scolaire ou professionnel.
En outre, ce dispositif optimise les coûts. Nous sommes très vigilants sur l’emploi de notre budget. Or le fait que les réservistes soient employés à proximité de leur lieu de résidence évite des déplacements coûteux. Le coût unitaire journalier des réservistes est d’ailleurs relativement faible – en moyenne, 83 euros –, compte tenu de ce recrutement tourné vers le civil, avec de jeunes recrues dotées de grades subalternes moins onéreuses que des sous-officiers ou officiers. Ce système permet d’assurer une bonne mixité entre des anciens et des jeunes et d’optimiser la gestion en fonction des missions.
L’enjeu majeur pour nous est de fidéliser ces réservistes. Car plus longtemps nous les gardons, moins ils nous coûtent, en formation notamment, et plus ils sont efficaces, compétents et désireux de poursuivre leur carrière dans notre arme. Pour atteindre cet objectif, nous nous appuyons sur un triptyque : l’effectif, le budget et le taux d’emploi moyen annuel de chaque réserviste. Si nous voulons en effet fidéliser les réservistes, il faut non seulement leur confier des missions intéressantes mais aussi les employer pour un nombre de jours assez conséquent – certains s’étant plaints de n’être employés que cinq à six jours par an par exemple. Dans le contexte actuel, le bon niveau pour nous est de 20 jours par an en moyenne par réserviste, certains pouvant travailler 5 jours, d’autres 80.
D’où notre attention à ne pas chercher à augmenter l’effectif global de réservistes au-delà du raisonnable, ce qui pourrait réduire le taux d’emploi moyen. Nous en avons aujourd’hui 24 000, alors que le plafond fixé par le directeur général de la gendarmerie est de 30 000.
En 2014, nous avons terminé l’année avec un budget de 40 millions, ce qui nous a permis d’assurer un taux d’emploi moyen de 20 jours.
Il n’y a pas de budget dédié à la réserve : c’est le directeur général de la gendarmerie qui, sur son budget, décide de la part qu’il y consacrera. La dotation initiale du début d’année n’est de fait pas à la hauteur des besoins identifiés, mais le budget est abondé au fur et à mesure en cours d’année. C’est un des rares postes pour lequel le directeur général dispose d’une marge de manœuvre. Ainsi, en 2014, nous avons commencé avec un budget de 31 millions d’euros, qui, à la suite d’abondements successifs, a abouti à 40 millions. Et, en 2015, nous commençons avec un budget de 32 millions d’euros, mais avec la perspective de bénéficier d’abondements d’ici l’été – car c’est une des priorités du directeur général.
En matière de fidélisation, la situation est plutôt rassurante, puisque nous sommes passés d’une durée moyenne de contrat de trois ans en 2011 à pratiquement cinq ans aujourd’hui.
En début d’année, je ventile le budget des réserves entre les 22 régions et l’outre-mer en fonction d’un certain nombre de critères. Puis les commandants de région reventilent les crédits entre les départements et les commandants de groupement les gèrent ensuite à leur guise, selon une planification annuelle tenant compte des événements prévisibles.
Mais le système n’est pas figé, car les commandants de région peuvent à tout moment décider une manœuvre régionale ou interrégionale pour faire face à un événement important.
Le directeur général de la gendarmerie peut également décider de conduire une manœuvre conséquente au niveau national, comme il l’a fait en septembre 2014, face à la situation de la délinquance et notamment à l’augmentation des cambriolages, au profit des 30 départements les plus sensibles. Ces départements ont ainsi été renforcés en permanence par des forces de gendarmerie mobile et des unités de réservistes – soit un peloton de 17 réservistes par jour pour ces 30 départements pendant quatre mois, du 15 septembre au 15 janvier, ce qui représente un effectif journalier de 510 réservistes en tout pendant cette durée. Pour cet effort conséquent, un budget de 4,2 millions d’euros a été spécifiquement attribué.
À la fin de 2014, cette opération a donné lieu à un bilan : les résultats étant probants, le directeur général a décidé de prolonger le dispositif pour toute l’année 2015. Mais des ajustements ont été réalisés, quatre départements ayant été retirés de la liste au profit de quatre autres, pour tenir compte de l’évolution de leur situation. À cette souplesse, s’en est ajoutée une autre : j’ai proposé, ce qui a été accepté, que les pelotons passent de 17 effectifs à 12 pour tenir compte de la disponibilité de nos réservistes – la limite d’emploi de ceux-ci étant de 30, avec possibilité d’aller jusqu’à 60 ou 90 jours et, dans des situations extrêmes, 150 jours.
S’agissant du logiciel Minotaur, qui a été créé il y a deux ans, il nous apporte en effet souplesse et réactivité, grâce à un contact permanent avec les réservistes. Ceux-ci peuvent se connecter de chez eux sur le logiciel, quand ils le souhaitent, et font connaître au gestionnaire leurs disponibilités jusqu’à huit mois. Le gestionnaire a connaissance de celles-ci en temps réel, ce qui lui permet de mettre en place un dispositif cohérent, mixant les compétences, en tenant compte du taux d’emploi de chacun. Il fait ensuite savoir aux réservistes s’ils sont retenus, de même que la nature de la mission, sa durée, le lieu de rendez-vous et diverses autres précisions. Il s’agit d’un internet adossé à un intranet de gestion, où figurent aussi les états de service des réservistes, directement actualisés, et le coût des missions. Cet outil remarquable nous permet de savoir ainsi combien de jours nous avons employé tel réserviste, combien cela nous a coûté et où nous en sommes de l’engagement du budget.
En conclusion, nous disposons, avec cette réserve opérationnelle de 24 000 hommes et femmes, d’un outil efficace et adapté à nos besoins et aux enjeux de sécurité intérieure de nos territoires.
Mme la présidente Patricia Adam. On a tendance à limiter le budget de la réserve alors que les réservistes coûtent moins cher que les militaires sous contrat. Compte tenu de l’opération Sentinelle – qui mobilise 10 000 hommes –, n’aurait-on pas pu envisager d’augmenter le nombre de réservistes dans la gendarmerie pour répondre à cet enjeu de sécurité intérieure ?
Par ailleurs, quelle est la part de réservistes acceptés par rapport au nombre de candidatures ?
Général Alain Coroir. Je n’ai pas ce pourcentage, le recrutement se faisant au niveau de chacune des régions, en fonction de ses besoins. Nous avons à cet effet une maquette par région et par département permettant au gestionnaire de connaître ses droits ouverts. Le nombre de réservistes peut aller de 158 à 533 par département selon les cas.
Mme la présidente Patricia Adam. Y a-t-il globalement deux fois plus de demandes que de réservistes acceptés ?
Général Alain Coroir. Nous avons en effet beaucoup de demandes mais les régions et départements sont tenus de respecter leur maquette, déclinée en officiers, sous-officiers et militaires du rang. Chaque gestionnaire connaît sa cible et organise en conséquence un stage de préparation militaire pour former des réservistes et leur faire signer un contrat.
Mme la présidente Patricia Adam. Il n’y a donc pas de problème d’accueil des réservistes : ce sont plutôt les contraintes budgétaires et en termes de besoins qui le limitent.
Général Alain Coroir. Nous avons une démarche raisonnable en fonction du budget et de la répartition des réservistes sur le territoire. Il revient au commandant de région de décider d’organiser un stage de formation, qui est coûteux. Celui-ci se déroule généralement au mois de juillet, quand le cycle scolaire est terminé.
Nous avons travaillé ces derniers jours sur la montée en puissance de la réserve opérationnelle. Je rappelle qu’à côté de celle de premier niveau, nous avons une réserve de second niveau, qui comporte 28 000 personnes, constituées de retraités de la gendarmerie, lesquels sont astreints à répondre à une convocation pendant cinq ans à l’issue de leur cessation d’activité. La réserve de premier niveau est pleinement employée, notamment dans les 30 départements les plus sensibles, sachant qu’il faut éviter le risque de surchauffe. Nous sommes sollicités notamment pour la lutte contre les atteintes aux biens, qui est la mission prioritaire définie par le directeur général, mais aussi dans les zones de sécurité prioritaires (ZSP) et les zones d’affluence saisonnière. Nous avons aussi un partenariat avec la SNCF pour effectuer des patrouilles dans les trains, payées par celle-ci. La région Rhône-Alpes, qui est emblématique, est par exemple concernée pour six départements sur huit par les atteintes aux biens, les zones d’affluence saisonnière, les patrouilles dans les trains, les ZSP ainsi que par les missions relatives au permis de conduire.
S’il devait y avoir une montée en puissance de cette réserve de premier niveau, elle ne se ferait donc pas instantanément.
M. Joaquim Pueyo. Certaines régions rencontrent-elles plus de problèmes de recrutement que d’autres ? Est-ce plus facile dans les zones rurales ?
Par ailleurs, y a-t-il des freins au recrutement vis-à-vis des employeurs – lesquels ne peuvent refuser aux réservistes de s’absenter pendant au maximum cinq jours ? Faut-il renforcer la législation à cet égard et prévoir une durée plus importante ? Pourquoi la limite d’âge est-elle de trente ans alors qu’elle est de soixante-cinq ans dans la police ? Faut-il repousser cette limite ?
Enfin, avez-vous des propositions pour renforcer la réserve citoyenne ?
M. Daniel Boisserie. Je partage tout à fait votre façon de voir les choses. À situation différente, mesures et budget différents. Il y a ainsi beaucoup plus de délinquance en zone rurale, ce qui est nouveau, alors que les effectifs sont assez constants.
Je comprends que vous avez des difficultés à recruter dans le milieu rural, qui est principalement celui de la gendarmerie, sachant qu’il y a aussi des problèmes de desserte numérique. Comment expliquez-vous cet état de fait et comment l’améliorer ?
Par ailleurs, les arrivées compensent-elles les départs ? Ne peut-on améliorer la réactivité du dispositif, permettant par exemple d’appeler des réservistes en un quart d’heure pour une opération ponctuelle ?
Enfin, quel est le budget consacré à la formation et à l’équipement ? Quel est, plus largement, pour vous, le budget idéal compte tenu de la situation actuelle ? Et qu’en est-il des critères de répartition des crédits ?
Général Alain Coroir. Je n’ai pas évoqué de difficultés de recrutement en milieu rural.
M. Daniel Boisserie. J’ai pourtant lu des notes de gendarmerie disant qu’elles existaient et que les réservistes venaient plutôt des zones urbaines.
Général Alain Coroir. Je m’inscris en faux contre cette vision des choses. De même que contre l’idée selon laquelle nous n’aurions pas suffisamment d’argent, puisque, comme je l’ai rappelé, le directeur général a régulièrement abondé le budget. Et, pour avoir dirigé la région Franche-Comté jusqu’en 2011, je puis vous dire que nous n’avions pas de difficulté pour recruter des jeunes. On m’a certes signalé quelques problèmes dans la Nièvre, mais cela n’empêche pas de recruter des réservistes dans les départements voisins et de faire face aux besoins sur l’ensemble de la région.
Vis-à-vis des employeurs, toutes les informations que nous avons montrent que les réservistes ne se dévoilent pas. Ils s’organisent tout seuls, en prenant sur leur temps libre. Beaucoup préfèrent ne pas en parler à leur employeur de peur que cela leur nuise à un moment ou à un autre. Mais ils ne s’en plaignent pas et ce n’est pas un frein.
Si la loi prévoyait dix jours de dispense au lieu de cinq, sans doute faudrait-il que l’approche des employeurs change aussi. Le risque est que, dans cette hypothèse, en cas de plan de licenciement, par exemple, les réservistes soient les premiers sur la liste.
Chaque commandant de groupement organise ses recrutements en fonction de sa maquette et procède donc au renouvellement de ses effectifs. Et ce n’est pas parce qu’un retraité de la gendarmerie fait part de son souhait de souscrire un contrat qu’il aura satisfaction.
Quant à la réactivité, elle est assurée par le logiciel Minotaur. En dehors des événements prévisibles, le gestionnaire peut en cas d’urgence envoyer un message, que le réserviste peut découvrir dix minutes après et auquel il peut répondre instantanément. Je rappelle que nous avons aussi des réservistes sans emploi, donc très disponibles.
Il n’existe pas de budget spécifique pour la formation. Et lorsque le commandant de région décide d’organiser un stage de formation, il le calibre selon son besoin et le finance sur son budget. L’été prochain, nous organiserons ainsi une grande préparation militaire à Saint-Astier pour 200 ou 300 personnes, les régions Aquitaine, Midi-Pyrénées, Limousin et Poitou-Charentes se groupant pour faire des économies d’échelle. Ce type de formation initiale permet d’apprendre à marcher au pas, les grades, à intercepter un véhicule, la protection individuelle et mutuelle, à interpeller quelqu’un ou le tir notamment. Il mobilise cinq ou six instructeurs réservistes.
Il ne m’appartient pas de dire quel serait le budget idéal. Mais celui de la fin 2014 me convient. Car il répond à ma préoccupation de motiver, d’intéresser et de fidéliser nos réservistes. Je rappelle qu’en 2013, le taux d’emploi moyen par réserviste était de 17 jours par an.
Quant aux critères de répartition, ils sont au prorata des effectifs du personnel d’active et tiennent compte de l’activité. Les départements qui en emploient le plus sont par exemple l’Isère ou la Gironde, avec plus de 500 , et ceux qui en emploient le moins, la Creuse, la Lozère ou l’Ariège, avec plus de 150. Il est vrai que l’Isère, la Drôme ou le Rhône sont en surchauffe et, dans ces départements très sollicités, le gestionnaire doit faire du sur-mesure.
Là encore, le dispositif est très souple : dans des départements comme la Creuse ou l’Ariège, le commandant de groupement peut mobiliser 50 à 60 réservistes en vingt-quatre heures si un événement le justifie. Et si le jour suivant, celui-ci est terminé, il n’a plus besoin de faire appel à eux.
M. Jean-Jacques Candelier. Tous les réservistes sont-ils obligés de faire des stages ? Selon quelle périodicité ?
Par ailleurs, quel est le niveau réel d’engagement de la réserve dans l’opération Vigipirate ?
Mme Geneviève Gosselin-Fleury. Quel est l’effectif de la réserve citoyenne pour la gendarmerie et quelles sont les tâches qui lui sont confiées ?
Général Alain Coroir. Le stage est une préparation initiale pour les jeunes arrivant du civil. Une fois terminé, il donne lieu à la signature d’un contrat et permet d’être employé. Chaque réserviste peut, s’il souhaite progresser en grade, passer le diplôme d’aptitude à la réserve (DAR), puis le diplôme d’adjoint police judiciaire (APJA). Des formations lui sont proposées à cet effet, avec des possibilités d’enseignement à distance sous forme de modules, ce qui permet de limiter la présence en stage à cinq jours, contre quinze jours ou plus prévus au départ. Les connaissances acquises en amont sont alors vérifiées le premier jour du stage.
Il y a aussi la préparation militaire supérieure gendarmerie (PMSG) pour être officier de réserve, qui est centralisée au plan national et se déroule une fois par an l’été à l’École des officiers à Melun. Elle porte sur une trentaine ou une quarantaine de personnes, en fonction de nos besoins.
Pour Vigipirate, nous avons été sollicités par le ministère de l’Intérieur pour connaître nos besoins opérationnels, en emplois de personnels comme en matériels. Pour les réserves, nous avons évoqué deux sujets : des crédits supplémentaires afin de pouvoir employer plus massivement nos réservistes – nous avons eu à ce titre une enveloppe de huit millions d’euros – ; les gilets pare-balles, qu’il faut avoir en nombre important pour tenir compte de la taille et du sexe des intéressés – nous avons eu dans ce cadre une dotation de 1 000 gilets. D’ailleurs, pour la lutte contre le terrorisme notamment, chacun a bien intégré l’idée qu’il fallait équiper tout le monde, active et réserve de la même façon pour employer plus massivement les réservistes, quels que soient les territoires.
Par ailleurs, nous avons aujourd’hui 1 300 réservistes citoyens sur 3 500 pour l’ensemble des forces armées. Cela correspond au vœu du directeur général, qui ne souhaite pas aller au-delà, car nous avons à faire avec une population volontaire et il faut que nous soyons capables d’animer le réseau. Or il a pu y avoir des excès de recrutement localement, comme en Rhône-Alpes, où le nombre de ces réservistes s’élève à 344. Le directeur général souhaite, dans des domaines précis intéressant la gendarmerie, pouvoir attirer des compétences, voire des expertises, dans les milieux publics et privés – grâce à de hauts dirigeants et hauts fonctionnaires notamment –, de même que dans le secteur des nouvelles technologies, l’immobilier ou les ressources humaines, notamment la reconversion.
Nous avons à ce sujet élaboré un concept de « réserve inversée », à distinguer de la reconversion. Nous allons avoir en effet une « bulle » de gestion avec les officiers, à la suite de l’allongement de l’âge de départ à la retraite. L’idée consiste à mettre à la disposition d’un certain nombre d’entreprises un officier pendant six mois, au cours desquels la gendarmerie continue à le rémunérer et à le loger ; puis, à l’issue de ce délai, soit l’entreprise le recrute, soit il retourne dans la gendarmerie.
M. Philippe Nauche. L’opération Sentinelle va durer et il est probable que nous soyons au début d’un cycle long d’évolution des besoins en matière de défense et de sécurité. Or on s’interroge aujourd’hui sur une réserve opérationnelle permettant de concourir à la sécurité de notre pays, de type garde nationale. Qu’est-ce qui est transposable de la réserve opérationnelle de la gendarmerie dans une réserve opérationnelle plus militaire, offrant une souplesse comparable et permettant une montée en puissance ?
M. Francis Hillmeyer. Un stage de formation de quinze jours est-il suffisant au regard des dangers que présente parfois la profession ? Quelle est la part accordée au maniement d’armes ? Enfin, de quel type de milieu professionnel viennent la plupart de vos réservistes ?
Général Alain Coroir. Les missions que nous proposons sont très variées, attractives et encadrées, nos réservistes travaillant en unités constituées avec un encadrement expérimenté de réservistes et des personnels d’active. En outre, les réservistes sont recrutés au plus près de leur résidence, dans un milieu qu’ils connaissent. Par différence, la mission Sentinelle est déracinée car elle s’exerce sur les points les plus sensibles, notamment dans les grandes villes ; elle est répétitive et statique. Elle exige en outre une formation particulière, dans la mesure où elle repose souvent sur des petites structures, binômes ou trinômes, qui demandent d’autres réflexes et aptitudes. Je rappelle aussi que nous n’avons pas aujourd’hui suffisamment de matériel pour équiper tous nos réservistes, ce à quoi il faudrait remédier, d’autant que la mission Sentinelle expose particulièrement les soldats.
Par ailleurs, l’armement des autres forces armées est le Famas, qui est un fusil automatique, alors que nos réservistes sont formés seulement au pistolet automatique, le personnel d’active étant seul habilité à détenir le fusil à pompe ou mitrailleur – hormis les réservistes retraités de la gendarmerie qui ont été formés à ces armes. Le critère de détention des armes est la formation à leur maniement et notre formation répond au juste besoin. De plus si nous devions nous substituer à nos camarades des trois autres armées, il faudrait prendre en compte le fait que notre réserve est déjà très employée et dispersée sur le territoire : si on voulait faire venir nos réservistes à Paris, Lyon ou Marseille, il faudrait les déplacer, les cantonner, les équiper et les encadrer avec du personnel d’active, qui serait ainsi hypothéqué. Le dispositif n’est donc pas facilement transposable.
M. Philippe Nauche. Il est important que nous sachions aussi ce qui n’est pas transposable.
Général Alain Coroir. Notre réserve est un système intégré de proximité qui limite au maximum les risques. Une transposition impliquerait d’extraire les réservistes de leur milieu pour une mission qui n’est pas la leur.
Quant à la formation, je répète que nous essayons de l’adapter au juste besoin. Elle nous semble adaptée, car nous n’avons pas de difficulté avec nos réservistes.
Je précise enfin que, jusqu’à présent, ceux-ci ne tiraient qu’une fois par an, trente cartouches. Mais, dans le cadre des abondements liés à Vigipirate, nous avons obtenu une dotation en munitions supplémentaire qui nous permettra de réaliser chaque année deux tirs de trente cartouches, ce qui constitue un effort conséquent.
Mme la présidente Patricia Adam. Je vous remercie.
La séance est levée à dix-huit heures trente.
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Membres présents ou excusés
Présents. – Mme Patricia Adam, M. Jean-Jacques Candelier, Mme Nathalie Chabanne, M. Guy Chambefort, M. Yves Fromion, Mme Geneviève Gosselin-Fleury, M. Francis Hillmeyer, M. Marc Laffineur, M. Jacques Moignard, M. Alain Moyne-Bressand, M. Philippe Nauche, M. Joaquim Pueyo, M. Gwendal Rouillard, M. Jean-Michel Villaumé
Excusés. – M. Olivier Audibert Troin, Mme Danielle Auroi, M. Claude Bartolone, M. Philippe Briand, M. Alain Chrétien, M. Jean-David Ciot, M. Lucien Degauchy, Mme Marianne Dubois, M. Serge Grouard, M. Christophe Guilloteau, M. Éric Jalton, M. François Lamy, M. Charles de La Verpillière, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Frédéric Lefebvre, M. Bruno Le Roux, M. Maurice Leroy, M. Alain Marty, M. Damien Meslot, M. François de Rugy, M. Michel Voisin
Source: Assemblée nationale
Le compte rendu au format PDF: