Réinsertion des blessés militaires en opérations extérieures

Question écrite n° 14234 de M. Daniel Laurent (Charente-Maritime – UMP) publiée dans le JO Sénat du 18/12/2014 – page 2788

M. Daniel Laurent attire l’attention de M. le ministre de la défense sur la réinsertion des blessés militaires sur le champ des opérations extérieures. L’intervention de la France en Afghanistan a coûté la vie à 88 soldats et généré 450 blessés physiques dont 247 pour la seule année 2011, ainsi que 500 victimes de « blessures invisibles » (troubles psychiques). Au Mali, ce sont 10 soldats tués au combat et, pour la seule année 2013, 40 blessés graves ont été à déplorer. Les blessés sont remarquablement pris en charge par le service de santé des armées, avec l’aide d’organismes officiels ou associatifs. Or, la question de la réinsertion se pose dans bon nombre de cas, c’est un sujet important qui nécessite un accompagnement afin de rechercher toutes les possibilités offertes au sein de l’armée ou dans le cadre d’emplois réservés au sein du ministère de la défense. L’administration a par ailleurs entrepris, en liaison avec des associations d’anciens combattants, la révision du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre (PMIVG). Aussi, il lui demande quelles sont les mesures envisagées par le Gouvernement en termes de réinsertion professionnelle, de reconnaissance des blessés et de pensions d’invalidité.

Transmise au Secrétariat d’État, auprès du ministère de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire

 

Réponse du Secrétariat d’État, auprès du ministère de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire publiée dans le JO Sénat du 02/04/2015 – page 749

Le Gouvernement porte une attention toute particulière à la situation des militaires ayant subi, au cours d’opérations menées sur ou à l’extérieur du territoire national, un traumatisme physique et/ou psychique, ainsi qu’à leur famille.

Concernant la réinsertion professionnelle, les militaires peuvent bénéficier, conformément à l’article L. 4139-5 du code de la défense, de dispositifs d’évaluation et d’orientation professionnelle destinés à préparer leur retour à la vie civile et, pour ceux qui ont accompli au moins quatre ans de services militaires effectifs, d’une formation professionnelle ou d’un accompagnement vers l’emploi.

Le code de la défense prévoit en particulier un congé de reconversion permettant de placer le bénéficiaire dans une situation administrative l’autorisant à se dégager des contraintes du service, ainsi qu’un congé pour la création et la reprise d’entreprise.

Les militaires blessés de retour d’opérations extérieures (OPEX), comme tout candidat à la reconversion, peuvent bénéficier de cette offre de service.

Pour mettre en œuvre ce dispositif, un organisme spécialement dédié à l’accompagnement des militaires, des civils et de leurs conjoints en transition professionnelle, a été créé en 2009.

L’agence de reconversion de la défense (ARD), dénommée « Défense Mobilité », est un service à compétence nationale, rattaché au directeur des ressources humaines du ministère de la défense, qui a notamment pour mission d’accompagner individuellement les militaires dans leur démarche de reclassement dans la vie civile.

Bien en amont de son départ de l’institution, l’information sur le dispositif ministériel d’accompagnement à la reconversion est dispensée à chaque militaire tout au long de sa carrière.

Dès qu’il a connaissance de la date de sa radiation des contrôles, le militaire se voit proposer un « entretien diagnostic » avec un conseiller de « Défense Mobilité », afin de cibler ses attentes et ses besoins et d’identifier les prestations les mieux adaptées pour préparer son retour vers la société civile.

L’étape suivante consiste à orienter le candidat en l’aidant à élaborer un projet professionnel en cohérence avec ses souhaits et capacités, et réalisable au regard du marché du travail dans la zone géographique choisie.

À la fin de ce parcours d’information et d’orientation, et en fonction de son projet professionnel, le militaire a la possibilité de bénéficier d’actions d’accompagnement vers l’emploi, d’actions de formation professionnelle, d’un accès direct à l’emploi au sein de la fonction publique ou dans le secteur privé.

S’agissant d’une reconversion dans la fonction publique, cinq formes de recrutement s’offrent aux militaires :

la procédure du détachement-intégration (article L. 4139-2 du code de la défense),

celle des emplois réservés (article L. 4139-3),

le détachement (article L. 4138-8),

l’accès par concours et le recrutement par contrat de droit public.

Quelle que soit la voie choisie pour accéder à un emploi public, le militaire peut suivre des formations sur les techniques de recherche d’un emploi dans la fonction publique ou des sessions d’information sur chacune des trois fonctions publiques, dispensées sous forme de sessions collectives ou d’un apprentissage individuel.

En 2013, la mise en œuvre de ce dispositif a permis à 2 324 militaires d’être reclassés dans les trois fonctions publiques.

Concernant plus particulièrement les emplois réservés, le Gouvernement s’est fixé pour objectif d’améliorer le dispositif à destination des personnes dites prioritaires, parmi lesquelles les militaires blessés titulaires d’une pension militaire d’invalidité (PMI), comme précisé à l’article L. 394 du CPMIVG.

En effet, l’ordonnance n° 2014-1567 du 22 décembre 2014 portant application de l’article 55 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale prévoit en son titre III une durée d’inscription spécifique sur les listes d’aptitude pour les personnes prioritaires.

Un décret en conseil d’État viendra, courant 2015, préciser que ces personnes prioritaires disposeront d’une inscription de cinq ans sur les listes d’aptitude au lieu des trois ans habituellement prévus pour les autres personnes susceptibles de bénéficier du dispositif des emplois réservés.

Sur la question de l’intégration au sein de la fonction publique des personnels militaires blessés, il est par ailleurs à noter que le ministère de la défense a signé une convention triennale (2013-2015) avec le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.

À ce titre, des actions favorisant le maintien en emploi des civils et des militaires en situation de handicap dans le cadre d’une reconversion professionnelle au sein de l’institution peuvent, entre autres, être financées.

Si le militaire souhaite s’orienter vers le secteur privé, ce dernier continue, au moment de sa recherche d’emploi, à bénéficier de l’appui de « Défense Mobilité », notamment grâce à des prospections ciblées, une aide à la rédaction de son curriculum vitae et de ses lettres de motivation ou encore la mise en relation avec des employeurs. Aussi, l’ARD s’attache à nouer des partenariats avec les grandes entreprises et développe des relations de proximité avec les PME et les PMI. À ce titre, depuis le 3 juillet 2013, l’ARD a intégré une procédure spécifique handicap en annexe dans toutes les conventions et accords de coopération conclus avec les entreprises.

En outre, parallèlement à un accompagnement en amont, l’ARD offre au militaire un suivi dans l’emploi jusqu’à 6 mois après son intégration en entreprise.

D’une manière plus générale, le secrétaire d’État chargé des anciens combattants et de la mémoire tient à préciser que dans le cadre de leur accompagnement, les militaires blessés de retour d’OPEX ne sont soumis à aucune limite de temps pour bénéficier des prestations de l’ARD, contrairement aux anciens militaires qui n’ont cette possibilité que jusqu’à trois ans après leur radiation des contrôles.

Par ailleurs, l’ARD a été amenée à intégrer la problématique particulière de l’emploi des blessés dans son organisation et ses procédures. Il a ainsi été identifié un référent « blessés » au sein de la direction de l’ARD, dans chacun de ses pôles « Défense mobilité » et au bureau d’aide à la reconversion de la Légion étrangère, soit 14 acteurs au total. Chacun d’eux a reçu une formation adaptée permettant à la fois d’appréhender l’accompagnement de ces militaires et de travailler en interaction indispensable avec les autres services qui sont chargés du suivi sanitaire et social des blessés, notamment le service de santé des armées, l’action sociale des armées, de même que les trois cellules d’aide aux blessés des trois armées.

Ce sont ainsi 172 militaires blessés en OPEX, toutes armées confondues, qui sont actuellement accompagnés dans le cadre de ce dispositif.

En outre, plusieurs initiatives sont actuellement menées en vue de favoriser encore davantage les chances de réinsertion sociale par le travail de ces militaires blessés.

Ainsi, l’ARD et l’association Castel Mauboussin mettent en place une convention de partenariat dans l’objectif commun de faciliter la transition professionnelle des personnels militaires blessés vers les métiers du secteur aéronautique.

De même, des conventions sont en cours d’élaboration avec les cellules d’aide aux blessés des armées, la délégation nationale du handicap du ministère de la défense et l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC-VG) en vue de mieux coordonner l’action au profit des blessés. L’ONAC-VG constitue en effet un acteur majeur de la politique de reconversion des militaires au sein du ministère de la défense.

Des aides à l’insertion professionnelle sont accessibles à ses ressortissants au nombre desquels figurent notamment les militaires et les anciens militaires titulaires du titre de reconnaissance de la Nation ou de la carte du combattant. À cet égard, une convention de partenariat a été signée entre l’Office et l’ARD pour faciliter l’accès des militaires en reconversion aux neuf écoles de reconversion professionnelle de l’ONAC-VG.

Parallèlement, l’ONAC-VG s’est vu confier le suivi, dans la durée, des militaires blessés en opérations.

Dans ce cadre, l’établissement public développe une politique d’accompagnement social et d’insertion professionnelle des militaires de la nouvelle génération du feu. Il s’appuie pour cela sur le réseau de ses services départementaux, sur une coordination renforcée avec les armées et sur une étroite collaboration avec les associations d’entraide.

Plusieurs autres actions sont en cours au profit des personnes ayant subi un préjudice au nom de l’intérêt général.

Parmi ces actions, il peut être noté la création d’un congé spécifique au profit des militaires blessés ou ayant contracté une maladie en OPEX, dénommé le congé du blessé. D’une durée maximale de 18 mois, il permet à ses bénéficiaires de rester affecté dans leur formation d’origine avec bénéfice de la solde intégrale et des accessoires de soldes, de se maintenir le cas échéant dans le logement concédé par nécessité absolue du service et d’accéder au centre médical des armées de la formation d’affectation.

De même, l’élaboration d’un passeport du blessé est actuellement à la réflexion.

L’objectif est de créer un document reliant les différents acteurs du parcours médico-administratif du blessé, faisant ainsi le lien entre les cellules d’aides, les accompagnants institutionnels du ministère de la défense et l’ONAC-VG, l’ARD ou encore le service de santé des armées et les mutuelles.

S’agissant des pensions militaires d’invalidité (PMI), il peut être précisé qu’un plan d’action ministériel relatif à la modernisation du traitement des PMI a été présenté aux associations de blessés et de mutilés de guerre le 26 novembre 2014. Il concerne notamment le traitement administratif et le contentieux des PMI.

Dans le domaine du traitement administratif des PMI, le plan d’action a pour vocation de renforcer l’information des demandeurs, notamment par l’élaboration de guides, et celle des agents de l’administration par la mise en place de formations. Il prévoit également d’améliorer la qualité de la relation avec les usagers, par la dématérialisation de certains formulaires, et de réduire les délais de traitement des demandes de PMI.

Dans le domaine du contentieux, le ministère de la défense, en relation avec le ministère de la justice, souhaite améliorer les procédures en sensibilisant les auditeurs de justice à la problématique du contentieux des PMI.

Enfin, le secrétaire d’Etat chargé des anciens combattants et de la mémoire confirme à l’honorable parlementaire que le code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre est en cours de refonte.

Cette refonte est opérée à droits constants et vise principalement à réorganiser le plan de ce code et à abroger certaines de ses dispositions devenues obsolètes.

SourceJO Sénat du 02/04/2015 – page 749

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