L’Adefdromil se réjouit avec les frères Guissé que la justice a décidé en toute conscience de constater la prescription de l’action en contestation de leur nationalité.
Pouvait-elle faire autrement ?
Imagine-t-on un instant, dans l’hypothèse où ils auraient été déchus de leur nationalité française, que les frères Guissé soient raccompagnés à l’avion menant à Dakar par un membre du gouvernement leur présentant les excuses de la France. Le plus qualifié pour effectuer cette noble tache aurait été, sans contestation possible, Mme Rama Yade, soi même !
Une nouvelle fois, tout le monde s’est beaucoup agité sur un problème qui aurait été résolu de toute façon et d’une manière ou d’une autre, par la reconnaissance de la nationalité française des frères Guissé.
A cet égard, le président de l’Adefdromil se souvient du cas d’un caporal-chef d’origine vietnamienne, débarqué après 1975 comme « boat people » et qui s’était engagé sous le drapeau tricolore au vu d’une simple fiche familiale d’état-civil et de nationalité française dont on avait omis de rayer les mots « et de nationalité française ».
Après quinze ans de bons et loyaux services, il fit valoir ses droits à la retraite et l’administration exigea qu’il rapporte la preuve de l’acquisition de la nationalité française. En effet, la consonance de son nom intrigua les fonctionnaires du service des pensions qui lui donnèrent un délai d’un an pour prouver qu’il était français. Saisi de cette affaire, le juge du tribunal d’instance refusa de régulariser la situation de ce caporal chef, partant du principe que selon la loi, seul un français peut s’engager dans l’armée française. Puisqu’il avait été engagé, c’est donc qu’il était français… c’est l’histoire du serpent qui se mord la queue.
L’affaire remonta alors jusqu’au Premier Ministre de l’époque. Et elle fut réglée sans tambours, ni trompettes dans les quinze jours qui suivirent : la nationalité française était accordée au caporal chef !
Au moment où le débat sur l’identité française est ouvert, l’affaire « Guissé » démontre donc la nécessité de revoir complètement le droit des étrangers qui servent à ce jour dans l’armée française.
Plusieurs questions fondamentales se posent.
1 – Indépendamment de l’histoire et de la tradition qui ne remonte qu’à 1830, doit-on autoriser des étrangers à servir dans l’armée de la France, état membre de l’Union Européenne ?
Selon les chiffres fournis en 2008 par le commandant de la Légion, pour 1000 contrats signés, il y aurait chaque année 8000 candidats à l’engagement, dont 3000 environ seraient originaires de pays hors Union Européenne, en appliquant les quotas affichés par la Légion elle-même. Il y aurait donc un peu moins de 400 légionnaires recrutés annuellement qui seraient originaires d’un pays hors Union Européenne.
On peut penser -même si aucune enquête n’a été effectuée- qu’une bonne part des 2600 candidats malheureux séjourne ensuite illégalement en France ou dans l’Union. Ainsi, l’offre d’engagement à la légion étrangère constitue un encouragement indirect, mais réel à l’immigration illégale. Cet état de fait est en opposition totale avec la politique de maîtrise des flux migratoires affichée par la France.
2 – Si les étrangers sont autorisés à servir la République, ne doit-on pas privilégier justement le recrutement en provenance des autres états membres de l’Union ?
3 – Quelles peuvent-être les règles d’harmonisation d’un tel recrutement avec celui des autres armées des états membres ? On sait, à titre d’exemple, que l’armée belge recrute déjà dans tous les pays européens et qu’il existe une légion espagnole qui recrute parmi les hispanophones. On sait moins que certains pays, membres de l’Union, sanctionnent pénalement l’engagement sous un autre drapeau, fut-il celui d’un autre état-membre d’un de leurs ressortissants.
4 – Y a-t-il des raisons objectives qui imposent que les militaires non français servent dans une unité particulière, qui est actuellement la légion étrangère ? L’objectif d’intégration et la communauté des valeurs que nous partageons et nous défendons imposeraient plutôt de privilégier « l’amalgame » et de ne pas discriminer les étrangers en les concentrant dans un seul corps.
5 – Se pose bien évidemment le problème du séjour sur le territoire national et européen des étrangers ayant servi sous le drapeau tricolore à l’issue de leur temps de service.
S’ils ont la nationalité d’un état-membre de l’Union, le problème ne se pose pas, puisque le principe du libre établissement dans n’importe quel Etat membre s’applique. En revanche, l’Adefdromil continue de recevoir de nombreux légionnaires, originaires d’un pays hors de l’Union Européenne, qui sont menacés de reconduite à la frontière, simplement parce qu’ils n’ont pas obtenu le fameux « certificat de bonne conduite » pour des motifs internes à la Légion, motifs qui ne remettent nullement en cause leur adaptabilité à séjourner en France et à vivre dans la société française, voire à acquérir à terme la nationalité de notre pays.
Ce sont donc les dispositions de l’article L 314-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile qui disposent que :
« Sauf si la présence de l’étranger constitue une menace pour l’ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour :….7º A l’étranger ayant servi dans la Légion étrangère, comptant au moins trois ans de services dans l’armée française, titulaire du certificat de bonne conduite ; »
Qu’il convient de modifier.
Dans les faits, ces dispositions confèrent au commandant de la légion étrangère le pouvoir exorbitant de délivrer des titres de séjour sans aucun contrôle de l’autorité administrative. Dans la réalité, il est utilisé fréquemment comme moyen de chantage à l’égard des légionnaires, originaires d’un pays hors Union Européenne qui ne souhaitent pas souscrire un nouvel engagement. De plus, rien n’est prévu pour les légionnaires n’ayant pas vraiment démérité et auxquels le commandant de la légion a refusé la délivrance de ce document.
M. Morin s’est réjoui, parait-il- de l’heureuse issue de l’affaire Guissé. Pourrait-il, dans un premier temps, se pencher avec son collègue Besson sur le problème des anciens légionnaires originaires d’un pays hors Union Européenne et n’ayant pas obtenu le certificat de bonne conduite ?
Il conviendrait ensuite de réfléchir avec la représentation nationale, puis de traiter sans a priori les problèmes que nous soulevons. Comme toujours, nous sommes à sa disposition.
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