Destruction des biens meubles ayant servi à commettre des infractions

Question écrite n° 11985 de Mme Colette Giudicelli (Alpes-Maritimes – UMP) publiée dans le JO Sénat du 12/06/2014 – page 1367

Mme Colette Giudicelli attire l’attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur la question de la destruction des biens meubles ayant servi à commettre des infractions. L’article 41-4 du code de procédure pénale définit les pouvoirs du procureur de la République ou du procureur général en matière de restitution des objets saisis par la justice. La procédure de remise d’armes de la 1ère à la 8ème catégorie, saisies par les autorités judiciaires suite à des infractions, est régie par l’arrêté du 31 juillet 2001 (JORF 187 du 14/08/2001). Les confiscations prononcées transfèrent au Trésor public la propriété de ces armes ou de tout objet ainsi confisqué. La procédure de remise aux Domaines est obligatoire pour l’autorité judiciaire. Une fois en possession de ces armes ou objets, les Domaines organisent des ventes, le plus souvent en salles avec, depuis 2009, quelques appels d’offres réservés aux armuriers. L’autorité judiciaire ne peut donc disposer des armes saisies, l’arrêté de 2001 se bornant à désigner, en cas de refus des Domaines de les recevoir, les établissements de la Défense nationale appelés à les détruire. Dans ce cas, l’autorité judiciaire a la charge de les faire transporter jusqu’à l’établissement qui les détruira, ce qui suppose des opérations d’inventaire et d’estimation des stocks d’armes qui ont un coût, qui prennent du temps et qui exposent la sécurité des palais de justice. À la suite de quoi, une fois le tri réalisé, il reste encore à organiser le transport à frais de justice vers l’établissement de Défense nationale susceptible de les recevoir, parfois fort éloigné. Des logiques de gestion poussent cependant bien souvent les parquets à trouver des solutions de proximité auprès de société privées qui peuvent notamment être équipées de presses aptes à détruire ces matériels, bien évidemment en s’entourant de toutes les précautions et sous le contrôle d’un greffier en chef, mais en dehors de l’orthodoxie réglementaire. En outre, nombre de magistrats s’inquiètent de la remise sur le marché des armes ou objets divers ayant servi à commettre des infractions et acceptées par les Domaines, qui sont ainsi à nouveau disponibles pour en commettre d’autres. Elle souhaiterait savoir s’il ne lui apparaît pas nécessaire de mettre en place un dispositif qui soit à la fois moral -retirer définitivement du circuit des armes ou objets ayant servi à commettre des infractions- et économique, puisque bien souvent, la vente des armes par les Domaines n’équilibre qu’à peine le coût de leur traitement en amont, tout en posant des problèmes de sécurité.

Transmise au Ministère de la justice

Réponse du Ministère de la justice publiée dans le JO Sénat du 26/03/2015 – page 701

Le sort des armes placées sous scellés est explicité par l’annexe 1 relative aux « Armes et munitions » de la circulaire n° JUSB1134112C du 13 décembre 2011 relative à la gestion des scellés de la direction des services judiciaires (DSJ) et de la direction des affaires criminelles et des grâces (DACG).

Il en ressort que les armes, éléments d’armes, munitions et éléments de munitions devenus propriété de l’État (notamment en cas de confiscation par une juridiction de jugement) doivent faire l’objet d’un inventaire annuel qui est transmis à l’Institut national de la police scientifique (INPS). L’INPS établit alors un calendrier de visite afin de récupérer les armes qui intéressent les services spécialisés pour constituer leur collection, en application de l’article 6 de l’arrêté du 31 juillet 2001.

En effet, l’article 6 de l’arrêté interministériel du 31 juillet 2001 (NOR : DEFC0101507A – JO du 14-8-2001, p. 13124) relatif à la destination des matériels de guerre, éléments d’armes, munitions, éléments de munitions et autres produits explosifs appartenant à l’État et l’instruction du 5 novembre 2001 (NOR : DEFC0102043J – JO du 19-12-2001, p. 20129) prise pour l’application dudit arrêté prévoient que les armes devenues propriété de l’État et détenues par les greffes des juridictions peuvent être mises à la disposition de la direction générale de la police nationale ou de la direction générale de la gendarmerie nationale, sur leur demande.

Cette remise – qui se fait selon une procédure déterminée décrite par le point 1.2 de l’instruction du 5 novembre 2001 précitée – concerne les seuls matériels qui « présentent un intérêt pour la réalisation d’examens ou d’expertises techniques ou scientifiques dans le cadre de la police judiciaire » et qui alimenteront la collection nationale d’armes de la police et de la gendarmerie nationales.

Les armes remises par les juridictions à l’institut national de police scientifique (INPS) ne font en aucun cas l’objet d’une vente puisqu’elles sont conservées par l’INPS.

En 2013, 151 armes sont allées enrichir les collections de l’INPS contre 314 l’année précédente.

Pour les armes restantes, l’annexe de la circulaire précise que :

– les armes de la 1re à la 7e catégorie (désormais armes de catégories A, B, C et D, à l’exception du 2° d), e), f) et g) en application du décret n° 2013- 700 du 30 juillet 2013 portant application de la loi n° 2012-304 du 6 mars 2012 relative à l’établissement d’un contrôle des armes moderne, simplifié et préventif NOR : INTD1310029D) doivent faire l’objet d’une procédure systématique de destruction.

– les armes de la 8e catégorie (armes neutralisées, armes historiques et de collection, reproduction d’armes conçues avant le 1er janvier 1900, armes historiques et de collection dont le modèle est postérieur au 1er janvier 1900, désormais catégories D 2° d), e), f) et g) en application du décret du 30 juillet 2013 précité), qui peuvent présenter une grande valeur, tant pécuniaire qu’historique, sont remises aux services du Domaine et examinées par un expert mandaté par celui-ci. Les armes retenues sont vendues par les services du Domaine par appel d’offres restreint réservé aux professionnels et celles non retenues sont alors détruites par la juridiction.

En pratique, depuis 2012, aucune remise d’arme n’a été acceptée par les commissariats aux ventes du Domaine en application de normes internes diffusées en décembre 2011, à la fois pour des raisons d’éthique et de coût.

La vente d’armes génère de nombreux surcoûts qui s’ajoutent aux frais fixes liés à l’organisation des ventes : frais d’expertise (vérification de la catégorie et de l’état de marche), de sécurisation du transport et des locaux, qui affectent l’équilibre économique des ventes. C’est pourquoi, la destruction est systématiquement préférée.

S’agissant de la destruction, l’arrêté interministériel du 31 juillet 2001 prévoit que les armes de catégories A, B, C et D (substituées aux armes des 1re à la 8e catégorie par l’arrêté du 2 septembre 2013 portant mesures de coordination pour l’établissement d’un contrôle des armes moderne, simplifié et préventif en application de la loi n° 2012-304 du 6 mars 2012 NOR :NTD1321575A) détenues par les greffes des juridictions, qui n’ont pas fait l’objet d’une mise à la disposition des directions générales de la police ou de la gendarmerie nationales et dont la remise en vue de leur vente n’a pas été acceptée par l’administration des domaines, peuvent être remises aux établissements de la défense désignés à cet effet ou, depuis une modification par arrêté du 20 août 2010 (NOR : JUSD1017925A JO du 25/08/2010 texte : 0196 ;10 pages 15335/15336), à :

-des prestataires publics dans des conditions fixées par voie de protocole ;

-des prestataires privés dans des conditions fixées par voie de conventions et conformément aux dispositions du code des marchés publics.

À cet égard, la note SJ-10-352-DACG/DSJ du 16 novembre 2010, qui présente ces deux dernières dispositions, précise que les juridictions peuvent désormais remettre – pour destruction – les armes de 1re à 8e catégories (désormais catégories A, B, C et D), non mises à la disposition des directions générales de la police et de la gendarmerie et non récupérées par les domaines, soit à un établissement de défense (9e BMAT) soit à des prestataires publics (suite à la signature par la DSJ d’un protocole national avec la direction de la sécurité civile) soit à des prestataires privés (à titre subsidiaire lorsque les opérations de destruction ne peuvent être opérées par les deux premiers).

Depuis 2011, la direction des services judiciaires a engagé un plan d’action en faveur de l’apurement des scellés dits « sensibles » comportant un risque important en termes de sécurité, tant pour le stockage dans les locaux des juridictions que pour le transport vers les centres de destruction.

Dans la pratique, le transport de ces scellés sensibles vers des centres de destruction était assuré sous la protection d’une escorte de la gendarmerie nationale ou de la police nationale jusqu’au 31 décembre 2010.

Depuis cette date, des solutions diverses ont été trouvées par le ministère de la justice pour procéder au transport et à la destruction de ces scellés.

Il est néanmoins envisagé de faire évoluer les textes législatifs du code de la sécurité intérieure pour inclure dans les transports sécurisés (véhicules blindés et équipage en tenue et armé) celui des armes et stupéfiants, qui ne sont pas prévus en l’état des textes.

Source: JO Sénat du 26/03/2015 – page 701

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