Audition du général Jean-François Parlanti, directeur du centre interarmées de concepts, de doctrines et d’expérimentations 2

Commission de la défense nationale et des forces armées

Mercredi 3 décembre 2014

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 26

Présidence de M. Philippe Nauche, vice-président

La séance est ouverte à neuf heures trente.

M. Philippe Nauche, président. Je suis heureux d’accueillir le général Jean-François Parlanti, directeur du centre interarmées de concepts, de doctrines et d’expérimentations (CICDE).

Mon général, vous avez pris la direction de ce centre après avoir dirigé le centre de doctrine et d’emploi des forces de l’armée de terre (CDEF), dont un de vos lointains prédécesseurs, le général Gérard Bezacier, avait été auditionné par notre commission en 2005.

Depuis lors, nos forces ont connu une activité extrêmement riche et diverse, et il convient de mettre à profit la somme des enseignements qui en ont été tirés. Aussi nous a-t-il paru naturel de nous tourner vers vous pour savoir de quelle manière ce retour d’expérience des opérations récentes est analysé et pris en considération par les armées.

Général Jean-François Parlanti, directeur du centre interarmées de concepts, de doctrines et d’expérimentations. Je voudrais en tout premier lieu vous remercier de me donner l’occasion de m’exprimer devant vous ce matin, moi qui suis donc en charge de l’élaboration de la doctrine d’emploi des forces au niveau interarmées après l’avoir été au niveau terrestre. Cela d’autant plus que l’audition d’un général pour aborder ce sujet précis n’est pas courante.

Je mesure donc tout l’intérêt de cet échange direct avec la représentation nationale sur ce thème de la doctrine, souvent austère, reconnaissons-le, et sur celui, il est vrai plus attractif, du retour d’expérience dans nos armées – en ce jour où est aussi organisé cet après-midi, rue de l’université, le séminaire de doctrine de l’armée de terre au cours duquel s’exprimeront notamment la sous-chefferie opérations de l’état-major des armées (EMA) et le chef d’état-major de l’armée de terre (CEMAT).

Mon intervention de ce matin s’effectue aussi au moment où notre doctrine d’emploi des forces est appliquée réellement sur l’ensemble des théâtres d’opération, où nos forces ne sont pas seulement, comme on dit, « engagées », mais où elles engagent elles-mêmes le combat face à des adversaires déterminés qui apprennent et s’adaptent vite.

Deux remarques liminaires sur les conséquences de ces engagements. D’une part, ils exigent de nous la maîtrise collective de savoir-faire précis et multiples, dont la doctrine constitue une base indispensable. D’autre part, ils confèrent aux armées le bénéfice d’une expérience opérationnelle exceptionnelle et tangible « face au feu » et au milieu de populations qui sont aujourd’hui les véritables enjeux des conflits armés.

Avant de me soumettre à vos questions, j’aborderai le plus clairement possible, dans un premier temps, la fonction doctrinale et notre manière de la mettre en œuvre en « collant » aux opérations, puis l’exploitation de notre précieux et envié retour d’expérience opérationnelle. Je conclurai en disant quelques mots sur le processus de prospective opérationnelle.

Le CICDE, qui aura dix ans en 2015, avec environ trente-cinq personnes au sein de l’école militaire, situe son action au niveau interarmées, celui du chef d’état-major des armées (CEMA). C’est, en effet, le niveau où se joue la performance opérationnelle grâce à la cohérence globale de toutes les composantes et fonctions opérationnelles au sein des différents champs d’affrontements, terrestre, aérien, maritime et aujourd’hui spatial et informationnel. C’est donc aussi le niveau où s’exerce en corollaire la complexité avec l’intégration et la combinaison d’acteurs, tout aussi importants les uns que les autres, mais qui seraient globalement inefficaces les uns sans les autres. On parle ici d’interopérabilité, véritable clé de la performance de nos armées.

Cette interopérabilité, ou plutôt ces interopérabilités – interarmées, interalliées, interministérielles ou avec les acteurs de l’approche globale – sont au cœur de la démarche doctrinale.

Le CICDE élabore sa doctrine au niveau interarmées en lien direct avec l’EMA et, plus particulièrement, sa sous-chefferie opérations, mais aussi avec les armées, dont l’expertise « métier » reste précieuse, et bien sûr avec l’OTAN, dont la doctrine a été instituée comme la référence de notre corpus doctrinal.

Permettez-moi ici d’ouvrir une parenthèse pour préciser ce qu’est ou ce que n’est pas la doctrine.

Il s’agit, en effet, de dépasser certains préjugés qui pourraient encore exister dans l’esprit de nombre d’observateurs lorsqu’on en parle : abri confortable ou carcan de la pensée pour les uns, dogmatisme, conceptualisation éloignée des réalités du terrain ou atténuateur de l’intuition, voire rempart de l’intelligence, pour les autres. Dès lors, le temps consacré à son appropriation en école imposerait des efforts pour le moins fastidieux au regard des bénéfices attendus. Pire, son application, excluant tout discernement par ses utilisateurs, serait synonyme de pesanteur inutile en termes de planification comme de dispositifs déployés.

Or, à l’analyse, il convient de comprendre que la doctrine n’est pas une finalité en soi, qu’elle ne constitue pas la solution opérationnelle – celle du livre – applicable quelles que soient les circonstances et en fonction d’une typologie prédéfinie de missions, et que c’est souvent lorsqu’on l’a considérée comme telle, ou aussi parce qu’on l’a dédaignée, que l’échec des armes fut patent. Ce fut le cas à de nombreux moments de notre histoire, depuis 1870 avec une absence de réflexion doctrinale, et notamment en 1914 et 1939 avec une doctrine perfectible et souvent mal assimilée.

En fait, son rôle premier est celui d’être une clé de compréhension des principes qui prévalent à l’intégration des différents acteurs contribuant à la réalisation de la mission.

La doctrine est donc un outil indispensable d’aide à la décision du chef militaire, permettant la cohérence initiale de l’action d’ensemble et le lien entre les acteurs, ainsi que contribuant à l’analyse des moyens dont il faudra disposer compte tenu des effets que l’on souhaite obtenir.

Elle ne définit pas la manœuvre que doit conduire le chef militaire car ce dernier a reçu une mission spécifique et les circonstances, les contingences de l’exécution de sa mission sont toujours nouvelles, particulières, sachant que l’affrontement est toujours celui de deux volontés.

C’est ce que le commandant de Gaulle signifiait dans Le Fil de l’épée, en parlant de « reconnaître à l’action de guerre le caractère essentiellement empirique qu’elle doit revêtir » tout en regrettant, mais c’était à l’époque, la répugnance de « l’esprit militaire français » à faire ainsi.

En revanche, c’est bien grâce à la connaissance de la performance potentielle collective, à la maîtrise des méthodes de raisonnement des problématiques opérationnelles et à la prise en compte des principes de l’action que le chef militaire est à même de concevoir le mode d’action le plus adapté. Il le fera sans omettre la part indispensable d’audace et d’adaptation. Car il s’agit toujours de prendre un risque, ce dernier étant inhérent à l’action militaire, de prendre l’ascendant sur un adversaire qui, aujourd’hui, comme le souligne le général Castres, n’est pas toujours caractérisé par la norme.

Dès lors, il convient d’apporter un soin particulier à l’élaboration de la doctrine, à sa diffusion et à son appropriation par les chefs militaires, notamment dans nos écoles pendant ces temps précieux de formation. Les enseignements de son application sur le terrain en opérations nous renforcent dans cette démarche.

La doctrine n’est donc pas dogmatique, pas plus qu’elle n’a vocation d’ailleurs à posséder un caractère normatif au sens juridique du terme. Elle n’est pas un ordre, ni une consigne.

En résumé, elle est une condition nécessaire mais non suffisante au succès opérationnel et constitue, plus que la connaissance de l’adversaire, toujours quelque peu aléatoire, un repère solide et fiable dans le « brouillard de la guerre ». Le cap à suivre reste le choix responsable du chef militaire, aidé en cela par son état-major. Les mots du Maréchal Foch restent donc pertinents concernant la doctrine : « un ensemble de principes fixes, à appliquer de façon variable, suivant les circonstances ».

Enfin, il est important de noter que la réflexion doctrinale sert aussi à penser la guerre, aux manières de la faire, nous préservant de la défaite intellectuelle qui a toujours été synonyme de surprise et de conséquences fâcheuses.

Cela dit, la doctrine d’emploi des forces armées françaises se construit par rapport au référentiel otanien.

Ce choix est, en effet, en cohérence avec notre retour plein et entier au sein de l’Alliance, où l’interopérabilité entre pays membres est un objectif permanent. Celle-ci permet de bénéficier d’un référentiel immédiat commun pour la défense collective – dans le cadre de l’article 5 –, mais aussi dans les opérations de gestion de crise : ce fut le cas en Afghanistan, en Libye, contre la piraterie au large de la corne de l’Afrique ou pour l’intégration de moyens de pays majeurs de l’OTAN, comme lors de l’opération Serval effectuée dans un autre cadre. Cette interopérabilité de l’Alliance est d’ailleurs aussi celle, en grande partie, des armées européennes.

Le principe est le suivant : quand le corpus doctrinal de l’OTAN existe, il est analysé et repris comme tel au niveau national pour tout ce qui nous apparaît correspondre à notre pensée. Il convient de noter que nous participons pleinement à son élaboration au sein d’une architecture importante constituée de différents groupes de travail où nos équipes s’efforcent, autant que faire se peut, d’influer sur les résultats souhaitables, en fonction de notre vision ou de l’avance dans nos réflexions.

Ainsi, lorsque des divergences ou des insuffisances apparaissent, lorsque des spécificités françaises existent – en termes d’organisation, de responsabilité, de souveraineté nationale ou de droit – et parce que nous sommes souvent engagés dans d’autres cadres, il est nécessaire d’élaborer des compléments français, voire un corpus français à part entière, ce qui est notamment le cas au niveau tactique pour l’armée de terre.

Cette année, nous avons également répondu aux besoins ponctuels de l’ONU pour participer activement à la rédaction de doctrines concernant les opérations spéciales, le génie et l’aéromobilité. Ceci devrait nous permettre une réelle interopérabilité avec les forces onusiennes qui seraient dès lors mieux susceptibles de nous relever dans ces domaines sensibles.

Ainsi, vous comprenez que, pour les travaux effectués au sein de l’OTAN, ponctuellement au sein de l’ONU ou dans un cadre bilatéral – c’est le cas par exemple avec les Britanniques dans la force expéditionnaire conjointe (CJEF) –, comme pour les compléments nécessaires à nos propres besoins, il soit indispensable de conserver une capacité nationale d’élaboration de la doctrine, en fonction des niveaux traités – interarmées ou armées. C’est la raison d’être des centres ou des réseaux de doctrine existant dans nos armées.

En termes de rayonnement, cette capacité française d’élaboration de la doctrine, complétée par celle de son enseignement, nos écoles de formation et nos détachements de coopération, constituent un véritable atout en termes d’effet d’entraînement et de développement des interopérabilités régionales ou locales. Cela est de nature à faciliter la prévention des crises, à envisager l’accompagnement de nos actions militaires – comme on l’a vu avec les Tchadiens au début de l’opération Serval –, permettant le partage de l’effort et renforçant la légitimité et la visibilité politique, comme à accélérer la sortie de crise pour nos forces. La doctrine joue ainsi pleinement un rôle de vecteur d’influence et de canal d’échange avec nos principaux partenaires actuels ou à venir.

Parallèlement, le CICDE a l’occasion de recevoir de nombreuses délégations étrangères intéressées à la fois par notre organisation doctrinale, mais aussi bien sûr par notre doctrine elle-même, cela d’autant plus que cette dernière est régulièrement « combat proven ». Certains textes font l’objet d’une traduction en anglais et l’ensemble du corpus doctrinal de la France est disponible sur les sites inter et intranet du CICDE, formant un ensemble cohérent de documents OTAN, Union européenne, multinationaux – en particulier dans le cadre des relations franco-britanniques – et nationaux, complémentaires et indissociables, constituant le référentiel unique pour le niveau interarmées, avec des liens directs avec les doctrines d’armée au niveau tactique.

Enfin, la doctrine doit rester « vivante » pour pouvoir répondre aux besoins, parfois imprévus – dans l’opération Serval, par exemple, le besoin d’une doctrine sur la façon d’intervenir dans les milieux désertiques fut rapidement comblé, tout comme le fut celui concernant la mise en œuvre des hélicoptères de l’armée de terre à partir des BPC « Mistral » de la marine dans l’opération Harmattan – ainsi que pour réagir suite au retour d’expérience, que je me propose d’aborder maintenant et qui, là aussi, fait l’objet de toutes les attentions de nos partenaires et visiteurs étrangers.

S’agissant de ce qu’on appelle le Retex : depuis cet été, le CICDE s’est vu confier la mission de l’élaborer – toujours au niveau interarmées –, renforçant ainsi la cohérence de son action en regroupant trois fonctions complémentaires, consubstantielles, que sont l’élaboration de la doctrine, la mise en évidence des enseignements issus du retour d’expérience et la prospective opérationnelle, cette dernière étant partagée avec d’autres acteurs en lien avec la stratégie militaire et la prospective de défense.

Il s’agit donc de bénéficier de la richesse de notre expérience opérationnelle et de capitaliser en en tirant les enseignements précieux afin de renforcer la cohérence et d’améliorer la performance pour les opérations futures, ou en cours lorsque celles-ci se prolongent. Ce retour d’expérience concerne les engagements mais aussi nos exercices, qui complètent l’éventail de notre contrat opérationnel, les opérations en cours ne constituant pas la seule finalité de l’outil de défense.

Diffuser les bonnes pratiques opérationnelles constatées pour les maintenir et analyser les facteurs d’échec ou de fragilité afin de corriger les défauts identifiés sont les deux objectifs principaux poursuivis par le processus Retex.

Ces corrections couvrent bien sûr tous les aspects constitutifs d’une force armée : la pertinence de sa doctrine, mais aussi celle de son organisation, la constitution de ses ressources humaines, la qualité de ses équipements, la fiabilité de son soutien et la justesse de son entraînement. Je citerai, pour ce dernier, l’application du principe de différenciation des mises en condition avant projection directement tiré des enseignements de notre action en Afghanistan.

Le processus s’appuie notamment sur les comptes rendus de fin de mission des commandants d’opération, mais aussi, afin d’être réactif, sur les informations régulières provenant des théâtres.

Le Retex est donc une analyse des actions récentes conduite avec recul qui permet, avec l’analyse de l’évolution des menaces, de nourrir les réflexions en matière d’évolution de nos modes d’action enrichissant la prospective opérationnelle.

Toutefois, le Retex peut être « accéléré » pour coller avec la situation du terrain, amenant à des changements ponctuels plus urgents. Ainsi, en termes d’équipement, d’articulation des dispositifs, ou de soutien, il est naturel de pouvoir proposer et décider des ajustements.

Bien sûr, nous sommes également attentifs à ce qui se passe à l’étranger, notamment chez nos alliés, pour compléter notre expérience. Inutile de vous dire que ces mêmes armées étrangères sont très intéressées par notre Retex, d’autant plus que nous menons des actions très diversifiées depuis plusieurs années dans différents cadres avec des moyens maîtrisés et l’obtention de résultats militaires probants, conférant à la France une position militaire encore plus solide, notamment au sein de l’Alliance.

À ce titre, le degré de diffusion de notre expérience doit faire l’objet d’une attention particulière car il ne s’agit pas non plus de faciliter la tâche de nos adversaires en leur révélant nos vulnérabilités.

Les enseignements principaux de nos engagements en opérations extérieures de ces cinq à dix dernières années font l’objet de présentations régulières. Ces engagements constituent pour chacun d’entre eux, comme le souligne régulièrement le général Castres, « un véritable exercice de vérité pour nos armées, loin des indicateurs d’un contrôle de gestion ». Ils font apparaître la pertinence du choix d’un modèle d’armée complet capable de couvrir tout l’éventail des engagements, la justesse de ce modèle, au sens de juste suffisance, la qualité de l’adversaire asymétrique, « pauvre en technologie militaire » mais riche en concept, et se fondant dans un environnement connu de lui.

Ces enseignements soulignent aussi des paradoxes à surmonter et des impératifs à maîtriser pour garantir le succès.

Parmi les paradoxes, je pourrais citer : l’attente politique d’un résultat militaire rapide là où la résolution de la crise nécessite souvent globalité et durée ; les limites de nos interventions en termes quantitatifs avec la nécessité de continuité, de distribution et de profondeur de nos actions, sur des zones d’intervention très étendues – actuellement, nos déploiements tous confondus sont de 8 000 à 9 000 hommes en opérations extérieures sur une étendue que l’on pourrait comparer à celle de l’Australie, alors qu’au Kosovo, sur une superficie comparable à celle de la Gironde, il y avait 50 000 hommes – ; les nécessaires mesures de protection de nos soldats et dispositifs de soutien logistique de nos déploiements avec l’exigence absolue de mobilité voire d’ubiquité sans lesquelles nos actions ne seraient pas décisives ; enfin, l’utilisation de la force là où les perceptions sont en jeu, dans un contexte normatif asymétrique exigeant la discrimination des cibles pour éviter les dommages collatéraux.

Encore une fois, les enseignements nous amènent plus que jamais, face à nos adversaires, à compléter, voire à repenser certains schémas, avec des impératifs à prendre en compte afin de surprendre en frappant fort là – et juste là – où il faut, puis de conserver l’initiative – imposer l’incertitude –, tout en étant en mesure de nous adapter à l’imprévu.

Parmi ces impératifs, je peux mentionner : la connaissance des milieux pour notre personnel, sa culture expéditionnaire, sa préparation opérationnelle adaptée et rigoureuse et la qualité de son leadership ; la réactivité grâce à des dispositifs d’urgence et au pré-positionnement ; l’intégration interarmées jusqu’à un niveau extrêmement bas ; la maîtrise de l’empreinte au sol, notamment logistique, avec le principe de réversibilité ; la polyvalence et la robustesse de nos équipements ; notre capacité à reconfigurer rapidement une force en cours d’opération en fonction des missions données ; la connectivité avec les partenaires ; l’interopérabilité, en particulier en matière de commandement ; la mobilité et la distribution des effets ; l’intervention dans la profondeur et le ciblage, mêlant les actions dynamiques à celles sur les perceptions, car il s’agit en effet de rechercher et frapper les vulnérabilités critiques de l’ennemi pour détruire ses centres de gravité ; la permanence du renseignement et son exploitation la plus rapide ; sans oublier la rapidité du processus décisionnel français, qui est un atout important.

Mais ces impératifs à respecter ne sont partie prenante que de la réponse militaire au règlement de la crise. Or l’effet militaire, obtenu en termes de « sécurisation », n’est la plupart du temps que le préalable nécessaire à ce règlement. Il consiste à recréer les conditions de reprise possible du progrès dans les autres domaines que sont notamment le retour d’un État de droit et d’une forme de développement. Ces domaines exigent aussi des actions coordonnées et complémentaires afin que les populations retrouvent une espérance de vivre ensemble dans la paix. C’est donc bien l’approche globale dans la gestion de la crise qui en permet le règlement, ce dernier ne pouvant être que d’ordre politique, économique et social.

À ce titre, les actions d’assistance militaire opérationnelle et de coopération dans un cadre préventif ou lors des opérations contribuent à la stabilité du pays concerné, à la légitimité, voire à l’efficacité de notre action. Cette assistance constitue aussi un atout majeur pour le transfert de responsabilité au plus tôt conduisant à la sortie de crise pour nos forces.

Concernant enfin le territoire national et la naturelle contribution des forces armées à sa sécurité, nous prenons en compte les enseignements des opérations conduites par les armées, permanentes ou non – posture permanente de sûreté des espaces aériens, Vigipirate, action de l’État en mer, missions de circonstance d’aide à la population dans le cadre notamment de catastrophes naturelles en métropole et outremer –, ainsi que des différents exercices menés conjointement avec les forces de sécurité et autres services interministériels. Dans ce domaine aussi les interopérabilités sont indispensables.

Les leçons apprises de nos engagements, de nos exercices tout comme le regard porté sur les actions d’autres nations sont de fait précieuses aussi pour apporter une appréciation sur la pertinence des choix de défense, définis notamment dans la loi de programmation militaire (LPM), et pour conduire la réflexion visant à préparer ceux de demain : « comment faire mieux, et certainement autrement, demain ? » – mieux parce que l’adversaire évolue, autrement parce que les partenariats peuvent aussi évoluer et que les contraintes seront sans doute toujours prégnantes. C’est là que s’exerce naturellement le rôle d’expertise incontournable de nos armées, notamment dans les réponses à apporter aux questions suivantes : « Demain, contre quelle forme d’engagement de nos adversaires ? Par quelle forme d’engagement pour nos forces ? Avec quels partenaires répondant aux meilleurs critères opérationnels ? ».

Le lien avec la prospective opérationnelle est donc manifeste.

Il s’agit de préserver dans l’avenir la liberté d’action du CEMA – qui doit avoir la capacité d’apporter des options militaires toujours crédibles au Président de la République – et des commandants d’opération pour assurer le succès militaire des crises, qui est un prérequis de leur règlement global.

En ce sens, nourris notamment du Retex, nous nous efforçons de mesurer et d’anticiper les conséquences prévisibles de l’évolution de la menace, de la technologie, du cadre juridique, et de définir des recommandations opérationnelles en termes de modes d’action pour nos armées.

Cette prospective prend en compte une période large, entre un besoin de court terme, d’ici deux à cinq ans, et celui d’éclairer les choix de moyen et long terme. Elle fait donc l’objet d’études sur des points particuliers de réflexion en matière doctrinale, voire d’expérimentations en termes de simulation de capacités ou de scénarios. Ces actions sont entreprises en partenariat avec les milieux nationaux, institutionnels ou non, et internationaux parfois, qui réfléchissent sur ces sujets ou détiennent une compétence complémentaire. Parmi ceux-ci, je peux citer la direction du renseignement militaire (DRM), la direction aux affaires stratégiques (DAS), les think tanks ou le milieu universitaire.

Notre attention est tournée notamment sur ce que nous considérons comme étant les défis à relever pour le succès futur des opérations. Ceux-ci sont décrits dans le concept d’emploi des forces qui est la déclinaison militaire des orientations du Livre blanc sur la défense et sécurité nationale. Ces défis sont la maîtrise du tempo opérationnel, la capacité à distribuer les effets simultanément, celle à agir sur les perceptions, l’efficacité de l’action face à l’asymétrie – notamment normative -, les interopérabilités et l’innovation.

Le sens et l’esprit de l’action du CICDE en termes de doctrine, de retour d’expérience et de prospective résident dans l’emploi opérationnel des forces, aujourd’hui et demain. Ils prennent leur source principalement dans les missions et les objectifs opérationnels fixés à nos armées, mais aussi dans les enjeux que constituent pour elles la performance opérationnelle collective, son efficience – la satisfaction du besoin au moindre coût – et sa capacité à préparer l’avenir pour rester pertinent, performant et efficient – ce qui correspond d’ailleurs aussi aux attributions naturelles du CEMA.

M. Gilbert Le Bris. Plusieurs éléments échappent à la doctrine de l’OTAN, comme la doctrine nucléaire stratégique, qui est spécifiquement française, ou lorsqu’on mène une opération contre la piraterie dans l’océan Indien avec, d’un côté, l’opération Ocean Shield et, de l’autre, l’opération Atalanta. L’influence des positions françaises en matière d’emploi des forces s’est-elle accrue depuis notre retour dans le commandement intégré de l’OTAN ? La doctrine française devient-elle un élément majeur dans ce cadre ?

Mme Geneviève Gosselin-Fleury. La doctrine interarmées de coopération civilo-militaire publiée en juillet 2012 a-t-elle été bien appliquée au cours des dernières interventions militaires que la France a menées ? La lutte contre le terrorisme peut-elle faire l’objet d’une doctrine particulière, alors qu’il s’agit d’une menace plutôt protéiforme ?

M. Philippe Vitel. Merci pour ce brillant exposé.

Les conflits sont devenus asymétriques et nous sommes maintenant confrontés à ce qu’on appelle la guerre hybride – comme le montre le conflit ukrainien –, caractérisée par la mise en œuvre des moyens de destruction, d’intrusion ou d’espionnage du cyberespace en vue d’affaiblir ceux qu’on attaque. L’OTAN a pris en compte cet aspect lors du sommet du Pays de Galles en intégrant la politique de cyberdéfense renforcée dans le cadre de la défense collective. D’ailleurs, les cyberattaques relèvent aujourd’hui du champ de l’article 5 du traité de Washington. Quel est votre sentiment au regard de l’évolution de nos doctrines à cet égard ?

Mme Catherine Coutelle. Hier, nous étions à Brest en mission avec Francis Hillmeyer et Jean-Michel Villaumé au sujet des écoles de formation militaire, où l’on nous a fait part du changement complet des interventions sur le terrain. Si nos ennemis n’ont pas notre capacité technologique, ils mènent des combats d’une tout autre nature et cherchent le plus possible le contact. Le Retex alimente-t-il suffisamment les écoles de formation militaire pour que les soldats arrivant sur le terrain en soient imprégnés ?

Général Jean-François Parlanti. La doctrine de l’OTAN est pour nous une référence, car des réflexions de haut niveau et utiles y sont menées. Elle est aussi le produit d’un consensus entre les nations. Or celles-ci ne conduisent pas les mêmes opérations, ni n’ont toujours les mêmes intérêts concernant la gestion des crises. Elles ne possèdent pas non plus la même expérience et donc parfois le même niveau de connaissance et de maîtrise dans un certain nombre de domaines. Il peut donc y avoir des divergences. Il existe aussi des spécificités propres à chaque pays. C’est le cas pour la France : nous avons une organisation particulière très optimisée et « interarmisée », souvent très en avance en termes d’intégration des processus notamment sur le plan logistique. Nous avons aussi des spécificités en termes de droit, de type d’unité comme par exemple celle tenant à notre gendarmerie. Par ailleurs, nous veillons à la préservation de notre souveraineté, notamment en matière de renseignement afin de conserver notre liberté d’appréciation de situation et de décision. Ces particularismes justifient des compléments particuliers en matière de doctrine.

En termes d’influence, le colonel Peugnet ici présent, qui est le sous-directeur doctrines du CICDE, consacre beaucoup de temps avec ses équipes au sein des groupes de travail de l’OTAN à élaborer la doctrine de cette organisation et à faire valoir nos vues, de manière à bénéficier aussi d’une interopérabilité la plus compatible avec nos approches. À défaut, nous en restons à des compléments français que ses équipes rédigent avec les armées. En tout cas, nous exerçons, depuis notre retour dans le commandement intégré, une influence bien supérieure. Nous nous rendrons d’ailleurs la semaine prochaine aux États-Unis au sein du commandement de la transformation de l’Alliance actuellement sous les ordres du général Paloméros, pour confronter nos approches avec nos partenaires lors de la conférence annuelle sur la transformation. J’ajouterai que nous jouissons aujourd’hui d’une écoute et d’une capacité d’influence très solides grâce à notre crédibilité opérationnelle démontrée au quotidien, ce qui intéresse les nations ayant des moyens plus proches de notre échelle. S’agissant d’une doctrine civilo-militaire, nous avons un centre interarmées d’action civilo-militaire, qui a aussi une responsabilité en matière d’opérations d’information. Nous avons plusieurs doctrines permettant de lutter, non contre le terrorisme, mais contre les leviers qu’utilisent les organisations terroristes. Il convient de trouver un équilibre cohérent entre l’action « dynamique » comme les bombardements et les actions sur les perceptions. Par exemple, contrer Daech, nécessite aussi d’être en mesure d’agir sur les leviers utilisés par celui-ci, notamment pour diffuser sa propagande et renforcer sa capacité à recruter.

La cyberdéfense est évidemment un sujet important : nous avons un officier général, l’amiral Coustillière, chargé des actions du champ cybernétique en lien direct avec le CPCO, et le domaine est en pleine expansion dans nos armées et au sein du ministère. L’OTAN travaille surtout sur le volet défensif de la sécurité des systèmes d’information face aux cyberattaques. En effet, c’est un domaine, vous le savez, qui est particulièrement sensible, et l’approche adoptée pour en traiter les différents aspects reste encore naturellement prioritairement nationale. Pour ce qui concerne l’action sur les perceptions, nous avons récemment élaboré une doctrine interarmées pour le domaine des opérations d’information.

Concernant nos écoles de formation, nous prenons en compte l’ensemble de l’éventail des menaces potentielles et du spectre de nos missions. Comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, les opérations en cours ne constituent pas la seule finalité de l’outil de défense. De même, il convient de ne pas oublier les méthodes propres aux engagements de plus grande voire de haute intensité. Il ne faut donc pas s’en tenir aux guerres asymétriques ou hybrides, car dans l’hybridité, il peut y avoir une part symétrique conventionnelle avec le déploiement de blindés lourds parallèlement à celui de forces spéciales ou légères.

On parle toujours d’asymétrie en notre défaveur, utilisée par nos adversaires pour contourner ou niveler notre supériorité grâce notamment aux technologies du marché allant des réseaux sociaux aux engins explosifs improvisés tout en n’hésitant pas à l’utilisation de la population environnante pour nous interdire l’usage de la force. Mais, nos adversaires sont donc aussi avant tout confrontés à une asymétrie technologique en notre faveur. Il nous faut donc conserver cette supériorité, notamment pour savoir, pour distribuer simultanément des effets contraignant loin de nos bases, pour discriminer les cibles, pour évaluer nos actions ou encore protéger nos forces lorsque celles-ci sont au contact, sans oublier pour être en mesure de commander. Revenant sur l’enseignement dans nos écoles, le temps y est précieux pour faire s’approprier par nos futurs chefs militaires leur culture, celle des opérations. À ce titre, le Retex y a toute sa place, car c’est souvent lui qui facilitera la compréhension de la doctrine à partir des exemples du terrain.

M. Christophe Guilloteau. La doctrine est évolutive. On a bien vu que l’expérience en Afghanistan avait joué dans l’élaboration des concepts tactiques au Mali. Aujourd’hui, chaque combat conduit à une vision différente. J’imagine que ce que font nos partenaires vous sert aussi dans vos réflexions. Ces évolutions sont-elles intégrées au jour le jour dans vos travaux ?

M. Gwendal Rouillard. Dans quelle mesure l’expérience de nos militaires en Afghanistan est-elle prise en compte au Mali et en Centrafrique ?

Par ailleurs, quel est le lien entre la doctrine et l’évolution de la logistique ?

Enfin, j’ai visité notre dispositif RECAMP à Dakar et Libreville : dans quelle mesure est-il pertinent selon vous ? Quelles évolutions peut-on en attendre ?

M. Francis Hillmeyer. Les combattants que nous avons actuellement en face de nous font fi de notre avantage technologique et tentent de le pallier en favorisant les combats au corps à corps. Vous orientez-vous vers une formation de nos militaires envisageant des combats différents de ceux menées entre deux armées conventionnelles ?

En outre, de quelle façon est pris en compte le cloisonnement entre opération militaire et action civile sur les terrains de conflit ? Quelle est la relation retenue dans l’approche globale avec les acteurs humanitaires et les ONG ?

M. Jacques Lamblin. Nous sommes confrontés à un terrorisme polycentrique, mais ayant une idéologie en commun et cherchant à s’unir. Doit-on considérer les terroristes comme une armée sans frontière, une communauté sans État, et les traiter comme tels, c’est-à-dire une armée qu’il convient de battre dans un combat dans lequel nous pouvons avoir l’initiative pour essayer de traiter globalement le problème ?

À l’intérieur de nos frontières, il peut y avoir des opérations paramilitaires terroristes : on a vu ce qui s’est passé récemment au-dessus de nos centrales nucléaires. À ce sujet, il ne faut sans doute pas se focaliser sur l’incident nucléaire initial, mais sur des sabotages sur des parties des centrales pouvant entraîner une catastrophe sur le plan énergétique. Cette évolution du risque est-elle prise en compte dans vos réflexions en termes de doctrine ?

M. Philippe Nauche, président. Quelle est la crédibilité d’une doctrine de l’OTAN sur la cyberdéfense quand on sait que nos alliés ne sont pas forcément nos amis dans ce domaine ? Quelle est l’approche spécifique de notre pays, sachant que nous sommes un peu isolés, chacun épiant les autres ?

Général Jean-François Parlanti. Il est évident que nous avons pris en compte l’expérience afghane dans les opérations menées au Mali. L’Afghanistan nous a replacés face à une réalité et un adversaire redoutables : nous avons en conséquence intégré le Retex, notamment en matière d’entraînement et d’équipement, et nous continuons de le faire, sachant que les opérations en Afrique comportent aussi quelques différences. Il convient aussi de nous adapter à toute évolution des formes de menace.

Ce que font nos partenaires nous sert également. Comme je l’ai dit, nous recevons beaucoup de délégations étrangères. Monsieur Guilloteau, tous les jours, le colonel Le Bouil ici présent et en charge du pilotage du Retex, tient compte des opérations en cours. Mais il faut aussi faire preuve du recul suffisant et mettre les informations en perspective. Le CICDE est connecté aux systèmes d’information reliés aux CPCO et aux opérations, et nous avons nos entrées partout, et notamment à la DRM.

S’agissant du lien avec la logistique, nous avons fait d’énormes progrès. L’empreinte logistique est toujours synonyme de volumes, de stocks, souvent donc de zones où entreposer le matériel, les vivres, l’eau ou les rechanges, d’infrastructures, de vecteurs pour assurer les flux au sein de convois. Pour incontournable qu’elle soit dès lors qu’il y a force au sol (terrestre, aérienne notamment), elle est donc souvent redoutée pour sa potentialité de pesanteur, de lenteur et de prévisibilité. Or, il s’agit désormais de faire effort sur la surprise, sur la capacité à reconfigurer rapidement une force pour l’adapter à une mission nouvelle donnée en cours de déploiement ou de mandat, sur la recherche de souplesse et la faculté de réversibilité. Nous travaillons sur ces points grâce notamment aux expériences d’Afghanistan et du Mali. L’analyse des enseignements a permis une révision de la doctrine et de l’organisation logistique. Je peux citer le regroupement des deux entités interarmées en charge de la logistique et des déploiements en un seul commandement du soutien des opérations et des acheminements (CSOA) permettant d’optimiser et de fluidifier les flux, la mise en place du groupement de soutien interarmées de théâtre (GSIAT) pour organiser les fonctions logistiques de manière plus souple, ou encore l’approche rénovée en matière de sauvetage au combat des blessés par le service de santé des armées (SSA). Notre désengagement en Afghanistan, qui s’est effectué efficacement et proprement en un peu plus d’un an, a également été source d’enseignements. Je rappelle à cet égard que pour un engagement d’un volume semblable au Mali, cela ne prit que trois à quatre semaines.

Il est important pour nos forces de disposer de matériels homogènes entre les forces pré positionnées et celles de métropole. Le concept RECAMP visant à faciliter l’appropriation par les Africains des enjeux de sécurité sur leur continent et à favoriser leur participation aux opérations de maintien de la paix, comme les moyens pré-positionnés qui y sont consacrés, conservent toute leur pertinence. Toutefois, afin de nous adapter aux nouvelles réalités financières, sécuritaires et organisationnelles d’une part, et pour répondre aux véritables besoins de nos partenaires, d’autre part, une réorganisation du concept et des parcs devrait intervenir d’ici début 2016. Par ailleurs, l’Europe s’est approprié ces problématiques via le concept EURORECAMP de partenariat entre l’UE et l’UA, au travers des cycles d’entraînement AMANI AFRICA.

J’ai rappelé dans mon propos la nécessité de coordonner et de compléter les actions militaire et civile : on peut travailler longtemps à la sécurisation, mais s’il n’y a pas de normalisation avec le retour à l’État de droit et à la confiance, cela reste vain. Le Livre blanc a fait des recommandations nationales en matière d’approche globale et de gestion de crise. Nous nous efforçons de coordonner nos actions, qui relèvent du volet « sécurité » de l’approche globale, avec celles des volets « développement » et « gouvernance », qui sont du ressort d’acteurs civils. Cela passe essentiellement par la fonction de coopération civilo-militaire, et par les relais que constituent nos ambassades.

S’agissant de Daech, nous sommes face à une menace asymétrique mais qui cherche à terme une certaine symétrie, puisqu’il veut s’étatiser. Cependant, actuellement avec les bombardements, nos adversaires cultivent l’asymétrie en cherchant notamment à se confondre avec la population civile ou les milices opposées. Il n’est donc pas si simple de vouloir détruire cette « armée » dans un combat frontal. Il faut analyser leurs leviers, qui ne sont pas seulement militaires, mais sur lesquels les militaires peuvent néanmoins peser. Daech n’aura de succès que s’il convainc la population qu’il est meilleur sur le plan du développement économique et social que le gouvernement précédent. Je rappelle que les flux dont il a besoin ne sont pas simplement constitués de combattants, mais aussi de « matière grise » afin de conduire des actions d’influence lors de la phase de stabilisation/retour à la normale.

La situation est plus compliquée s’agissant de la bande sahélo-saharienne, car on y trouve plusieurs entités différentes, avec des objectifs plus diffus.

S’agissant des centrales nucléaires, qui présentent déjà par conception un excellent niveau de robustesse technique, des mesures de protection particulière ont déjà été décidées par le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, en charge de cette question, et la réflexion se poursuit en urgence s’agissant des meilleures parades à mettre en œuvre. Les armées contribuent actuellement aux mesures par un dispositif d’alerte avec des radiogoniomètres et des patrouilles d’hélicoptères.

Quant aux cas de sabotage ou d’attaque terroriste sur les centrales, ils relèvent en premier chef de la responsabilité du ministère de l’Intérieur et de celle de l’exploitant, même s’il peut y avoir un appoint militaire – la règle étant que, sur le territoire national, le moyen militaire vient, lorsque la nécessité est avérée, suppléer le moyen civil lorsque celui-ci fait défaut. Cela n’empêche pas de mener des réflexions dans un cadre interministériel, notamment s’agissant des contributions possibles des armées pour la protection des populations.

La cybernétique est, comme la dissuasion nucléaire ou le renseignement, un sujet sensible relevant de la souveraineté nationale. L’OTAN est en train d’élaborer une doctrine, axée sur l’aspect défensif. La France, notamment sa défense, est en avance en la matière.

M. Jean-Yves Le Déaut. Nous venons d’organiser une audition des principaux acteurs de ce dossier au sein de l’OPECST. Ces survols de centrales nucléaires par des drones posent le problème plus large de l’adaptation aux nouvelles menaces. On peut d’ailleurs s’interroger sur l’absence de moyens de détection adaptés, alors que l’institut de Saint-Louis et d’autres organismes travaillant dans l’orbite de la défense avaient proposé des études en la matière.

Général Jean-François Parlanti. J’en ignore la raison ; pour notre part, nous effectuons des études techniques et tactiques sur ce sujet, davantage il est vrai dans un contexte « guerrier », par exemple sur les menaces que pourraient engendrer l’utilisation de drones par essaims. En matière de prospective, il y a toujours des incertitudes. À n’en pas douter, il y aura du Retex au sujet de ces vols de drones.

M. Philippe Nauche, président. Je vous remercie.

La séance est levée à onze heures.

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Membres présents ou excusés

Présents. – Mme Sylvie Andrieux, M. Sylvain Berrios, M. Malek Boutih, Mme Nathalie Chabanne, M. Guy Chambefort, M. Alain Chrétien, Mme Catherine Coutelle, Mme Marianne Dubois, M. Yves Foulon, M. Sauveur Gandolfi-Scheit, Mme Geneviève Gosselin-Fleury, M. Serge Grouard, M. Christophe Guilloteau, M. Francis Hillmeyer, M. Marc Laffineur, M. Jacques Lamblin, M. François Lamy, M. Charles de La Verpillière, M. Gilbert Le Bris, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Frédéric Lefebvre, M. Christophe Léonard, M. Alain Marleix, M. Alain Marty, M. Damien Meslot, M. Jacques Moignard, M. Alain Moyne-Bressand, M. Philippe Nauche, Mme Émilienne Poumirol, M. Joaquim Pueyo, Mme Marie Récalde, M. Gwendal Rouillard, M. Alain Rousset, M. Stéphane Saint-André, M. Jean-Michel Villaumé, M. Philippe Vitel, M. Michel Voisin

Excusés. – Mme Patricia Adam, M. Olivier Audibert Troin, Mme Danielle Auroi, M. Claude Bartolone, M. Daniel Boisserie, M. Philippe Briand, M. Jean-Jacques Bridey, M. Jean-Jacques Candelier, M. Jean-David Ciot, M. Bernard Deflesselles, M. Lucien Degauchy, M. Éric Jalton, M. Bruno Le Roux, M. Maurice Leroy, M. Eduardo Rihan Cypel, M. François de Rugy.

Lire le compte rendu au format pdf: https://www.adefdromil.org/wp-content/uploads/2015/01/CR-26.pdf

Source: Assemblée nationale

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