Vo Nguyen Giap, héros militaire de l’indépendance vietnamienne et artisan de la débâcle française à Dien Bien Phu, est mort ce vendredi à l’âge de 102 ans. Le jour même, Claude Blanchemaison, ancien ambassadeur de France au Vietnam, envoyait à l’imprimerie les épreuves de son ouvrage « La Marseillaise du général Giap » (éd. Michel de Maule, en vente le 10 octobre). Nous publions quelques extraits avec son aimable autorisation.
« Ma première rencontre avec le général Giap qui avait autrefois réussi le triple exploit de harceler l’occupant japonais, de battre la puissance coloniale française puis de chasser les américains eut lieu au début du mois d’avril 1989 à Hanoï. J’avais pris mes fonctions d’ambassadeur de France au Vietnam quelques semaines plus tôt ;
Quelque peu intimidé, j’allai au rendez-vous fixé, en me remémorant ce que j’avais lu sur ce personnage hors du commun, dont il n’existait toujours pas de véritable biographie. Le héros de l’indépendance nationale pouvait aussi être vu comme un chef de guerre peu soucieux des vies humaines.
L’homme qui s’avance à ma rencontre me frappe par sa petite taille, son œil vif et son grand front surmonté d’une crinière blanche– le volcan sous la neige, disaient les journalistes. Il est en tenue militaire d’été très simple, de couleur kaki tirant sur le vert olive, avec une chemisette portant des écussons rouges étoilés sur le rebord du col.
Il fait tout pour se montrer aimable et pour me mettre à l’aise. Devinant sans doute mon appréhension et désireux de couper court à tout discours introductif embarrassé, il m’a pris le bras familièrement et m’a dit combien il appréciait la littérature française.
Manifestement heureux de parler notre langue, le vieux Général accueillait un ambassadeur de quarante-cinq ans, qui ne pouvait évidemment pas être nostalgique d’une époque qu’il n’avait pas connue.
D’entrée de jeu, il évoqua les affinités culturelles entre nos deux pays, l’importance de la francophonie et la nécessité de regarder vers l’avenir : il était grand temps, me dit-il, d’envisager de construire une coopération substantielle dans le domaine économique. La France pouvait aider le Vietnam à s’insérer dans un contexte international qui évoluait rapidement. Elle devrait aussi jouer un rôle beaucoup plus important dans la formation de ses cadres.
Il s’est cependant cru obligé d’évoquer l’histoire. Bien sûr la grande Révolution française, puisque c’était ici une référence permanente, mais aussi la colonisation, y compris dans ses aspects les plus décalés, comme par exemple l’existence d’un masque tragique de guerrier gaulois à grande moustache dans le décor en stuc au-dessus du rideau de scène à l’opéra de Hanoï.
Il mentionna ironiquement le fait qu’entre 1940 et 1944 les élèves du lycée Albert- Sarraut chantaient tous les matins Maréchal nous voilà ! , sur ordre de l’amiral gouverneur général de l’Indochine. d’une manière générale, celui-ci appliquait scrupuleusement les directives de Vichy, souligna mon interlocuteur. »
« Il faut toujours garder ses distances avec les Chinois »
« Il parla aussi des mille ans d’occupation chinoise. il ajouta en souriant qu’il fallait toujours garder ses distances avec les chinois. Sans nier l’importance de leur soutien logistique massif dans la lutte pour l’indépendance, il expliqua qu’il ne les avait jamais suivis aveuglément.
Certes, il avait failli accepter l’idée…
Lire la suite sur le site en cliquant [ICI]