Bilan de l’application de la loi contre la vie chère en outre-mer

Question d’actualité au gouvernement n° 0165G de M. Serge Larcher (Martinique – SOC-A) publiée dans le JO Sénat du 24/05/2013 – page 4512

M. Serge Larcher. Ma question s’adresse à M. le ministre des outre-mer.

La problématique de la vie chère constitue un sujet de débat et de mobilisation sociale lancinant dans nos outre-mer. Il s’agit non pas d’un simple ressenti, mais bien d’une réalité statistique. Ainsi, l’INSEE estime que le niveau général des prix dans les départements d’outre-mer est supérieur de 6 % à 13 % à celui que l’on mesure dans l’Hexagone, l’écart atteignant même près de 40 % pour les produits alimentaires.

Monsieur le ministre, le Gouvernement a fait de la lutte contre la vie chère outre-mer une de ses priorités, comme l’a illustré le vote, moins de six mois après sa prise de fonctions, de la loi relative à la régulation économique outre-mer. La mise en œuvre des dispositions de ce texte, dont j’ai eu l’honneur d’être le rapporteur pour le Sénat, commence à produire des résultats. Les négociations engagées avec la grande distribution ont ainsi permis une baisse de plus de 10 % des prix des produits relevant du « bouclier qualité-prix », ainsi qu’un essor de certaines productions locales.

Au-delà du cas des produits alimentaires, le prix des carburants pèse lourdement sur le pouvoir d’achat des ménages ultramarins. Il a d’ailleurs été le déclencheur de la grave crise sociale qui a touché nos outre-mer au début de l’année 2009. Il s’agit pourtant d’un prix réglementé.

Le précédent gouvernement a publié, en novembre 2010, un décret organisant, sur la base d’un savant calcul, la compensation du manque à gagner des compagnies pétrolières locales, filiales de Total. En application de ce décret, l’État a dû faire à ces compagnies un chèque de 144 millions d’euros pour la période 2009-2012 ! Lors des débats sur la loi relative à la régulation économique outre-mer, vous vous étiez engagé, monsieur le ministre, à modifier ce décret. Où en est-on six mois plus tard ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Réponse du Ministère des outre-mer publiée dans le JO Sénat du 24/05/2013 – page 4513

M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur, je comprends votre impatience, que je sais partagée par nombre de nos compatriotes des outre-mer. Cependant, permettez-moi de relativiser quelque peu la situation.

Six mois après l’adoption de la loi relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, la plupart des décrets et des projets de décret sont prêts. À titre de comparaison, je rappellerai que vingt et un mois se sont écoulés entre la publication, en mars 2009, du rapport de l’Inspection générale des finances sur le prix des carburants et celle, en décembre 2010, du décret que vous avez mentionné et que nous souhaitons réviser.

Le Premier ministre a validé voilà quelques jours les grandes orientations de la réforme. Nous procédons actuellement à quelques vérifications techniques afin de préciser la rédaction du projet de décret, avant de soumettre celui-ci aux collectivités, qui doivent nécessairement être consultées, à l’Autorité de la concurrence et, bien entendu, au Conseil d’État.

J’en viens maintenant au fond et aux grandes orientations retenues.

D’abord, tout doit être fait pour assurer la transparence, la formation loyale des prix, afin que chacun des opérateurs s’y retrouve.

Ensuite, les prix d’importation des hydrocarbures seront rendus plus transparents, en accordant un rôle central aux prix de marché, c’est-à-dire aux cotations publiques.

Par ailleurs, les comptes annuels des entreprises régulées seront désormais contrôlés chaque année, ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent, afin de détecter la constitution de revenus supérieurs aux prévisions et d’apporter le cas échéant les corrections nécessaires. Je rappelle que les prix sont fixés selon des budgets prévisionnels. Ce n’est à l’heure actuelle jamais contrôlé.

Enfin, une marge spécifique accordée aux gérants de stations-services sera distinguée, afin de bien identifier ce qui leur revient en propre et ce qui revient aux propriétaires des stations. Nous souhaitons connaître les marges nettes et non plus seulement, comme c’est le cas aujourd’hui dans les outre-mer, les marges brutes. Je rappelle que le facteur déclencheur des émeutes survenues en Guyane fut le prix du carburant, qui s’établissait alors à 1,77 euro le litre, ce qui constituait un record mondial !

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre.

M. Victorin Lurel, ministre. D’autres mesures importantes seront prises, comme la régulation séparée des stocks stratégiques et un retour à un taux de rémunération unique de la Raffinerie des Antilles et de la Société réunionnaise de produits pétroliers.

Enfin, j’ai demandé aux préfets d’engager des concertations en vue de la prise des nouveaux arrêtés de méthode. Le décret sera prêt avant la fin de l’été. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. André Gattolin applaudit également.)

Source: JO Sénat du 24/05/2013 – page 4513

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