Affaire VIDOT : Tribunal des pensions ou tribunal tout court ?

Pour en savoir plus, lire

l’article du Canard enchaîné du Mercredi 13 novembre,
l’article de France Soir du Jeudi 14 novembre.
l’article du Journal du Centre du Samedi 16 novembre. l’article du Journal du Dimanche du Dimanche 17 novembre.

Depuis quelques années, il devient particulièrement difficile de faire reconnaître un droit aux diverses pensions inhérentes aux infirmités consécutives à des accidents « du fait du service ».

La plupart des candidats à pension d’invalidité découvrent qu’il n’ont pas été réellement blessés en service, ou que leur dossier est dépourvu de papiers essentiels, sur la rédaction desquels ils n’avaient aucun pouvoir à l’époque des faits.

Les ayants droits perçoivent tardivement que l’époux ou le père que l’on croyait en mission quelque part sur la planète, coulait des jours paisibles, sans liens avec sa profession et dans des endroits confortables. Quand on n’explique pas à tous ces gens que les activités militaires, parfois extrêmes, constituaient « des conditions normales de service » dont ils auraient tort de se plaindre.

Quand, par miracle, le dossier est complet, c’est l’imprécision même du rapport circonstancié qui transforme l’accident en « maladie », avec pour corollaire de nécessiter une infirmité plus élevée pour s’en voir dédommager (30% au lieu de 10%). Oser qualifier une fracture ou une rupture tendineuse de « maladie », il fallait le faire,… c’est fait.

L’agacement, mais aussi l’amertume de voir ainsi éluder la responsabilité de l’institution dans la reconnaissance d’infirmités apparemment imputables au service fait place à l’exaspération quand ces droits élémentaires sont niés à la veuve et aux orphelins de nos camarades, venant à décéder à des milliers de kilomètres de leur domicile.

Il y a eu l’affaire MANONI, cet officier marinier victime d’un accident au cours d’un « safari » en escale, contre la veuve duquel la machine juridique du ministère de la défense s’est acharnée à faire annuler deux jugements favorables à la thèse de l’accident en service. Dans cette histoire, le militaire « encadrant » les marins était en service alors que les militaires « encadrés » ne l’étaient plus.

On connaît moins l’affaire VIDOT, rappelée ce mercredi par le canard enchaîné sous l’excellente plume acérée de Brigitte Rossigneux. Le maréchal des logis chef VIDOT, 34 ans, a commencé à mourir sur le palier d’un immeuble de DJIBOUTI le mardi 23 avril 1991, et fut évacué dans un coma irréversible sept longs jours plus tard, sans que les soins apportés par le centre hospitalier militaire local n’aient pu ou su inverser le cours des choses.

Le dossier, sans doute largement incomplet, révèle à tout le moins qu’une série d’erreurs ont peut être été commises, tant sur le diagnostic qui s’obstina à rester différent de celui posé par le service de santé des armées, que sur la thérapeutique dispensée à l’hôpital et dont l’objectif essentiel semble avoir été de « calmer » un malade « agité ».

Cette « agitation », tout comme l’ensemble des autres éléments cliniques dûment constatés signait une autre pathologie, erreur d’appréciation dont les experts commis beaucoup plus tard on pu soulever la responsabilité dans l’inadéquation du traitement proposé.

Au moment où les juristes du ministère de la défense firent appel de la décision du tribunal des pensions, favorable aux ayants droits de la victime, ils avaient connaissance de la totalité des éléments. Le ministère de la défense aurait pu relativiser, laissant à cette famille endettée par le coût des soins, le bénéfice du doute et de la maigre pension.

On s’inquiète actuellement sur les bancs des facultés de médecine, et jusque dans les cabinets médicaux, de la recrudescence des actions judiciaires à l’encontre des thérapeutes. Le rappel de telles affaires montre que les patients, militaires ou non, ont parfois de solides raisons d’être méfiants.

Dans cette affaire, et au vu des éléments du dossier, la voie pénale, tant redoutée des praticiens avait quelques chances supplémentaires d’aboutir alors que, face à une équipe juridique institutionnelle disponible et bien rodée, la voie administrative conduisait à l’impasse et l’iniquité.

C’est une leçon à retenir.

Nota bene : Madame Nadine VIDOT est membre de l’ADEFDROMIL. Vous pouvez réagir à ces articles pour l’encourager ou, pour ceux qui connaissent les circonstances exactes du décès du Sergent-chef Jean-Pierre VIDOT, pour en témoigner en écrivant à contact@defdromil.org ou par courrier postal à ADEFDROMIL, 14 rue Fould Stern 60700 Pont Sainte Maxence.

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