Mali
Q – Est-il prévu que M. Fabius se rende au Mali, après son déplacement à Abidjan ?
R – Non, pour l’instant, il se rend à Abidjan pour le Sommet de la CEDEAO.
Q – La France a-t-elle fixé un terme aux opérations militaires?
R – Il n’y a pas de terme, simplement parce que c’est le terrain qui décidera, en fonction de l’évolution de la situation sur place. La question a d’ailleurs été posée au président de la République, elle l’a aussi été à Laurent Fabius et à Jean-Yves Le Drian. Ils ont tous fait cette réponse, une réponse de bon sens : ce sera le temps nécessaire et pas plus, la France n’ayant pas vocation à rester de manière permanente dans ce dispositif au Mali.
Q – Allez-vous demander l’aide de vos partenaires européens et internationaux ?
R – Sur les différents volets des opérations au Mali, il y a déjà beaucoupde soutiens internationaux.
Sur le volet MISMA, c’est-à-dire le volet du déploiement de la force africaine en application de la résolution 2085 du Conseil de sécurité des Nations unies, un nombre croissant d’États africains ont annoncé officiellement leurs contributions à cette force. Non seulement les annonces sont faites, mais on voit maintenant arriver les premiers contingents. C’est le cas des contingents togolais et nigérian. Il y aura aussi des contributions d’autres États, je pense notamment au Bénin, au Tchad, au Sénégal. Il y a eu le 15 janvier une réunion des chefs d’état-major de la CEDEAO, en présence du général nigérian et de son adjoint nigérien qui commanderont cette force. Il y aura samedi le Sommet de la CEDEAO que j’ai déjà mentionné.
Sur le volet de l’opération européenne (EUTM), là aussi les choses se sont très fortement accélérées ces derniers jours. C’est ce qui ressort très clairement de la réunion exceptionnelle du Conseil Affaires étrangères qui s’est tenue hier à la demande de la France. Non seulement il y a eu la manifestation d’un soutien politique unanime à l’intervention française, mais aussi une accélération des annonces de contributions faites par les Européens. Tout cela va se préciser dans les jours qui viennent. D’ores et déjà le général Lecointre qui est français et va commander cette opération, se rendra sur place entre le 20 et le 23 janvier, avec l’objectif d’un premier déploiement d’une petite unité au début du mois de février puis une montée en puissance progressive à partir de mi-février.
Sur le troisième volet, l’opération Serval, là aussi le soutien international est unanime et des contributions ont été confirmées soit dans le cadre européen, soit dans un cadre plus large, je pense notamment à l’aide qui est apportée par le Canada en termes de transport ou par les États-Unis en terme de transports et de renseignements. Tout cela sera complété au fur et à mesure dans les jours qui viennent par les annonces qui seront faites par les uns ou les autres.
Q – Est-ce que des pays européens pourraient s’engager militairement aux côtés de la France ?
R – Des déclarations ont été faites hier, notamment par Mme Ashton, confirmant non seulement un soutien politique, mais aussi logistique – à ce titre je pense par exemple au domaine médical et à ce qu’ont d’ores et déjà annoncé les Allemands. Je cite Mme Ashton : «un certain nombre de pays ont
dit très clairement qu’ils étaient prêts à soutenir la France par tous moyens et ils n’ont pas exclu un soutien militaire». On va voir maintenant ce que sont susceptibles de proposer les uns et les autres, c’est une décision qui appartient à ceux de nos partenaires qui souhaiteraient aller plus loin que ce qu’ils ont d’ores et déjà annoncé, notamment pour l’envoi de troupes combattantes.
Q – Déployer les premières missions européennes à la mi-février, cela fait loin tout de même ?
R – Je vais reprendre le calendrier, en soulignant que son accélération est une excellente nouvelle. Première remarque : je rappelle que cette force européenne a pour mission de former les forces armées maliennes. Deuxième remarque : encore une fois, le général Lecointre sera sur place dès le 20 janvier et le premier détachement de personnel européen devrait être prépositionné à Bamako, d’après mes informations, dès le début du mois de février. Ensuite, c’est un déploiement progressif et une montée en puissance: tout cela ne se fait pas du jour au lendemain. La force comptera au total
presque 500 hommes, avec les formateurs et les personnels chargés de sa protection.
Q – La France arrive à mettre 1.400 hommes en 4 jours au Mali et l’Europe va mettre 1 mois presque pour mettre 500 conseillers, dont le rôle ne sera pas de combattre mais de conseiller l’armée malienne…
R – La mission de la force telle que définie dans les conclusions du Conseil Affaires étrangères de décembre, c’est en effet la formation et la restructuration des forces armées maliennes. Il y a au sein de l’armée malienne un certain nombre d’unités qui sont en état de combattre et qui combattent aujourd’hui. Il y a d’autres unités qui ne sont pas en état de combattre, donc c’est celles-ci qu’il va falloir former, restructurer. Il y a tout un volet d’équipement aussi. C’est un diagnostic qui est partagé par tous : l’armée malienne a besoin de formation, de conseils, pour tout ce qui
touche à la chaîne de commandement, à l’entraînement, etc. Le besoin tel qu’il a été défini en décembre perdure et il est toujours pertinent de déployer cette force.
Sur le deuxième volet de votre question, il faut faire les choses de manière ordonnée. L’Union européenne a l’habitude de ce genre de mission. Ce n’est pas la première fois qu’au titre de la politique européenne de défense et de sécurité elle déploie une mission de ce type là, notamment en Afrique. Il y a une première étape de diagnostic et de définition précise des besoins, c’est ce que va faire très vite le général Lecointre. Ensuite, les formateurs et la force seront déployés progressivement de manière ordonnée.
Q – Quelles sont les possibilités que les États-Unis n’envoient pas seulement une aide logistique au Mali, mais aussi des soldats ? Qu’attendent-ils ?
R – Il s’agit de discussions que nous avons en ce moment avec les Américains, c’est à eux, comme à tout autre pays, de prendre leurs décisions. Ils nous apportent déjà une aide très importante en termes de transport et de renseignement. Il s’agit d’une contribution essentielle que nous apprécions.
Ensuite, c’est à eux de décider s’ils veulent aller un cran plus loin. C’est leur décision souveraine.
Q – Il y a un an, la France avait fourni des armes aux rebelles libyens du Djebel Nefoussa pour éviter leur annihilation devant les forces de Kadhafi. On parle beaucoup d’armes libyennes qui circulent partout. Est-ce qu’on est raisonnablement sûr que ce lot-là n’a pas circulé dans la région ?
R – Sur ce lot-là en particulier, je ne sais pas. Ce que nous savons en revanche, c’est que ces groupes présents dans le Nord-Mali avaient récupéré d’une manière ou d’une autre des armes de Libye. Soit parce que certains groupes, notamment certaines milices libyennes sont passées avec armes et bagages au Nord-Mali. Soit parce que ces groupes ont acheté des armes provenant des stocks libyens. C’est ce qui nous fait dire depuis longtemps, et encore très récemment, que ces groupes étaient puissamment armés, d’armes qui sinon pour toutes, du moins pour certaines, venaient des stocks libyens