Présentation du Rapport moral lors de l’Assemblée Générale Extraordinaire du samedi 14 septembre

Mesdames, Messieurs, mes chers amis,

C’est naturellement avec beaucoup d’émotion que je prends la parole aujourd’hui, ici, à PARIS, pour vous présenter le premier Rapport moral de l’Association de défense des droits des militaires.

Permettez moi tout d’abord de vous dire avec beaucoup de simplicité et de sincérité : merci. Merci d’être présents à cette AGE, merci d’avoir rejoint l’ADEFDROMIL pour défendre vos convictions.

C’est l’occasion également pour moi de mettre enfin, un visage derrière une adhésion ou un email !

Comme vous le savez, l’ADEFDROMIL a pris naissance le 13 avril 2001, date à laquelle j’ai déposé ses statuts à la sous-préfecture
de SENLIS dans l’Oise. Elle a obtenu sa capacité juridique par insertion de
sa déclaration au journal officiel en mai 2001.

Cela fait donc un an que le Major RADAJEWSKI et moi-même
avons créé cette association. Je profite du moment présent pour remercier
très chaleureusement mon camarade RADA d’avoir accepté de me suivre dans
cette aventure à hauts risques.

Pourquoi avoir créé l’ADEFDROMIL ?

Dès mon premier engagement dans les armées, je me suis
rendu compte que les droits des militaires étaient ignorés du plus grand
nombre, ce qui permettait, trop souvent, qu’ils soient bafoués par la
hiérarchie.

Il faut bien le reconnaître, quelques privilégiés du
système connaissant toutes les astuces se ménagent de brillantes carrières au
détriment de leurs camarades ou subordonnés.

Mes emplois successifs : Commis greffier auxiliaire dans
un Tribunal Militaire, chancelier, officier des effectifs, trésorier puis
officier budget m’ont trop souvent permis de côtoyer les jugements
arbitraires, les passe-droits, l’injustice, les détournements de fonds,
bref ce que l’on appelle familièrement entre nous dans nos
armées : « les magouilles ».

De sévères mises en cause m’ont contraint à exercer mes
droits à la défense en intentant quatorze recours devant le Conseil d’Etat,
les Tribunaux administratifs et la Cour Européenne des Droits de l’Homme.

Les répressions qui furent exercées n’ont rien d’original.
Beaucoup d’entre vous les connaissent pour les avoir subies : changement
arbitraire de spécialité, déplacement d’office, interdiction de prendre un
commandement car jugé trop dangereux pour la cohésion d’une unité,
humiliation en m’interdisant à la dernière minute un accès pourtant prévu
à la base des sous marins nucléaires lanceurs d’engins, mutations à l’opposé
des desiderata , refus d’attribution d’un diplôme accessible de plein
droit, punitions précédant l’arrivée dans la nouvelle affectation, notation
aussi fantaisiste qu’arbitraire, falsification des classements dans l’avancement,
refus de communication des documents administratifs, classification de dossier,etc.
Bref, ils m’ont donné un assez large éventail de leur savoir-faire en
quelque sorte…

Il m’a semblé que cette formation
« juridique », acquise bien malgré moi en défense des attaques
menées sous couvert du ministère, pouvaient être utiles à d’autres
camarades, d’autant que je savais, et que je sais plus encore aujourd’hui, n’avoir
été qu’une victime parmi d’autres.

Par ailleurs, les instances de concertations actuellement en
oeuvre au sein des armées sont totalement incapables d’assurer leur mission,
ne possédant ni la capacité juridique indispensable, ni les compétences
humaines en matière juridique.

Les différentes instances de concertation ont été mises en
place avec l’aval des hautes autorités militaires dans le seul but de
permettre au Ministre de la défense de contrer celles ou ceux qui prétendent
que les militaires n’ont pas les moyens de se faire entendre. Leur rôle
commence et s’arrête malheureusement à celui de l’alibi.

Des représentants tirés au sort n’auront jamais qu’une
légitimité de nature statistique, et les représentés n’ont pas eu le
loisir de leur accorder cette mission ou tout autre signe de confiance.

En toute justice, certains comptes-rendus témoignent de l’âpreté
des débats et de la volonté de quelques conseillers de sortir de ce rôle
convenu. Il serait pourtant illusoire de croire que les récentes avancées plus
ou moins significatives en matière de condition des militaires proviennent de
ces procédures policées où chaque mot du communiqué final doit être
arraché à un secrétaire général qui joue, deux semaines par an, sa
carrière à la roulette russe.

Les résultats les plus positifs, dont certains relativement
incompréhensibles (comme la prime mensuelle de 500 euros accordée aux
médecins en chef et aux médecins généraux), sont à mettre au crédit de
cette chose totalement surréaliste que fut la manifestation des militaires de
la gendarmerie.

l’ADEFDROMIL est née de ce double constat (arbitraire et
instances non crédibles), bien avant que la colère n’apparaisse au grand
jour.

Quel est son objet ?

L’Association de défense des droits des militaires a pour
objet, l’étude et la défense des droits, des intérêts matériels,
professionnels et moraux, collectifs ou individuels des militaires relevant de
la loi n°72-662 du 13 juillet 1972.

Comme vous avez pu le remarquer, elle a un rôle identique à
celui d’un syndicat, mais sans en avoir ni la possibilité de dérive, ni les
inconvénients

Bien que soutenue au moment de sa création par la CFDT et le
syndicat de la magistrature, l’ADEFDROMIL je le dis et le répète, n’a pas
vocation à rejoindre les syndicats de forme traditionnelle. Pourquoi ?

Parce que le mot syndicat est synonyme dans l’esprit des
militaires de désordre, de droit de grève et surtout de double hiérarchie.
Sur ces trois points, je suis d’accord avec ceux qui tiennent ce langage.

Dans ces conditions me direz-vous, comment voyez vous l’avenir
de notre association ?

L’idée générale qu’il faut retenir, c’est que l’évolution
normale de la société militaire, la perte de crédibilité des solutions
institutionnelles tout comme le cadre européen conduiront immanquablement notre
association à s’ériger à terme en un véritable groupement professionnel,
autonome, apolitique, indépendant de toute confession philosophique ou
religieuse, libre de toute sujétion hiérarchique.

L’appellation de groupement professionnel est
particulièrement bien choisie puisque le terme même de groupement
professionnel ne recouvre aucune définition juridique. Il suffit donc aujourd’hui
à nos parlementaires de lui donner un contenu juridique tout en réservant
cette appellation de groupement professionnel à une association composée de
militaires, totalement indépendante du système hiérarchique, mais travaillant
en collaboration et bonne intelligence avec lui au développement de la
condition des militaires et à la défense de leurs droits.

Quel est le bilan de l’ADEFDROMIL après une année d’existence ?

Pour répondre à cette question, j’aborderai trois points
importants : les adhérents, les actions menées, le rôle joué au sein de
la défense.

Les adhérents :

L’ADEFDROMIL compte aujourd’hui dans ses rangs 310
adhérents dont trente cinq sont des retraités ou des réservistes.

Vous êtes mieux placés que moi pour savoir que d’énormes
pressions ont été exercées sur le personnel militaire pour l’empêcher d’adhérer.

Mais comme toujours, lorsque la cause est juste et noble, le
fait précède le droit et l’ADEFDROMIL, malgré ses éternels détracteurs,
fait et fera désormais partie du paysage. A cela deux preuves :

La première, c’est la reconnaissance implicite du
précédent Ministre de la Défense qui a laissé son porte-parole, Monsieur
Jean-François BUREAU, dialoguer avec le président de notre association d’une
manière très courtoise lors de l’émission « le téléphone sonne » sur RTL.

La deuxième, lors de la 25ème session du Conseil
de la Fonction Militaire Terre, le Général de Corps d’armée VINCENT,
général major général de l’armée de terre, a reconnu visiter de temps en
temps le site de l’ADEFDROMIL et s’est même retranché derrière mes
déclarations pour justifier le bien-fondé de la NBI des généraux. Ce en quoi
il a eu raison d’ailleurs car je le répète, la NBI des généraux n’est
pas de leur fait mais elle résulte de la transposition aux hauts fonctionnaires
militaires des avantages obtenus par les hauts fonctionnaires civils. C’est la
stricte application de l’article 19 du statut général des militaires.

Ce qui peut apparaître critiquable dans cette affaire, c’est
le moment choisi pour l’accorder : juste après les mesurettes du 28
févriers 2002.

Pour en revenir aux adhérents, à ma connaissance, aucun n’a
été inquiété à ce jour.

On peut se poser la question de savoir pourquoi ?

A mon avis plusieurs hypothèses peuvent être
avancées :

L’Association travaille en relation étroite avec des
cabinets d’avocats ;

L’Association a l’oeil bienveillant de certains
syndicats et de tous les médias ;

L’Association est reconnue comme crédible et
difficilement contournable dans le climat actuel.

Les actions menées :

Pour toucher et informer un maximum de militaires en temps
réel, seul le site Internet avait à mes yeux cette capacité. Nous avons donc
construit dans un premier temps un site de fortune auquel a succédé le site
actuel beaucoup plus performant. J’en profite pour remercier les deux
webmasters qui se sont dépensés sans compter pour que vive cette grande
aventure. Sans eux, l’ADEFDROMIL n’aurait pas vu le jour.

Quelques chiffres. Au cours de l’année 2001, nous avons eu
environ 25 000 visites. Pour 2002, nous en sommes à 67 502 visites soit environ
268 visites/jour. C’est dire si les nouvelles se propagent vite à l’intérieur
de la Communauté militaire. Mais nombreux sont ceux qui ignorent encore notre
existence du fait même que tout le monde n’a pas encore un abonnement à
Internet. Aussi une diffusion support papier me paraît souhaitable pour
compléter notre dispositif d’information. C’est une décision que nous
aurons à prendre au sein du conseil d’administration.

Comme vous devez vous en douter, je reçois chaque jour de
nombreux emails de personnes adhérentes ou non adhérentes. Je m’efforce, bien
sûr, de répondre dans des délais assez brefs à tout le monde. Depuis l’ouverture
du site, j’ai du adresser plus de 3000 réponses.

Indépendamment du site internet, l’ADEFDROMIL se fait
connaître par le traitement des dossiers de ses adhérents. Notre meilleure
propagande est faite par ceux qui ont réussi contre toute attente à obtenir
gain de cause dans un recours. J’ai personnellement traité 135 dossiers
d’adhérents. Cela représente une somme de travail importante et surtout des
connaissances interarmées indispensables car je vous le rappelle, l’ADEFDROMIL
a dans ses rangs du personnel de toutes les armées et de tous les services.
Internet, le journal officiel et le bulletin officiel des armées sont nos
principaux outils de travail.

Actuellement l’ADEFDROMIL est en charge de dossiers
importants et médiatisés ou susceptibles de l’être. Tout le monde a
présent à l’esprit le dossier du Docteur LEWDEN toujours au point mort,
celui du Sergent NOEL qui a choqué la collectivité militaire, celui du
gendarme CORVINO en instance de jugement ou encore le dernier en date, celui de
Tamara ODDOUX. D’autres dossiers sensibles sont en attente d’une décision
de la commission des recours.

Lorsque les dossiers sont importants et nécessitent une
instance devant les tribunaux administratifs ou judiciaires les adhérents sont
orientés à leur demande :

soit vers le Cabinet de Maître Pierre BLANDINO avocat
généraliste, très au fait des pensions militaires d’invalidité de par
ses anciennes fonctions de Directeur des pensions militaires en qualité de
contrôleur des armées,

soit vers le cabinet de Maître Gérard DUCREY, ancien
auditeur de l’IHEDN, et plus spécialisé quant à lui dans les libertés
publiques et le droit à l’image.

Il est bien évident que ces avocats ne travaillent pas
bénévolement et qu’il appartient à chaque adhérent de négocier les
honoraires ou les modalités de paiement. L’ADEFDROMIL n’interfère pas dans
le travail des avocats qui sont totalement indépendants.

Par contre, ces deux avocats interviennent gratuitement à
mes côtés lorsque l’Association en tant que telle a besoin d’une aide
juridique. C’est par exemple avec le concours de Maître DUCREY que l’ADEFDROMIL
a été créée et c’est avec le concours de Maître BLANDINO que l’ADEFDROMIL
a déposé un recours devant le Conseil d’Etat pour faire annuler le décret
instituant un recours préalable au recours contentieux devant la commission des
recours. Cette affaire est toujours pendante devant le Conseil d’Etat.

Au nom de l’ADEFDROMIL et en mon nom personnel, je tiens à
remercier très chaleureusement ces deux grands avocats parisiens, ici
présents, pour l’intérêt qu’ils portent à notre association et aux
droits des militaires.

Enfin, l’ADEFDROMIL intervient auprès des députés qu’elle
a jugé performant et ce quelque soit leur couleur politique. C’est Annie
ROMERIO, Major à la retraite qui s’occupe de ce genre d’intervention. Annie
ROMERIO a travaillé au cabinet du Ministre et connaît très bien tous les
rouages et les subtilités du cabinet ministériel. Je tiens à la remercier
pour le travail accompli et j’espère qu’elle fera partie du prochain
conseil d’Administration de l’ADEFDROMIL que vous élirez en fin de
matinée.

Le rôle joué par l’ADEFDROMIL au sein de la défense :

Après avoir créé l’ADEFDROMIL, j’ai rendu compte de sa
création au Président de la République dans une longue lettre où
je lui ai fait part des dysfonctionnements dans les armées. Cette lettre était
prémonitoire puisque je lui écrivais textuellement : « En poursuivant dans
cette voie, par idéologie ou au nom d’une conception absolutiste désuète de
la discipline militaire, il est à craindre à très court terme une fronde dans
les armées. La haute hiérarchie militaire, entourée de conseillers
inamovibles, sectaires et plus soucieux de leur carrière que de celle des
autres, se coupe de plus en plus des réalités de la base. »

Ce courrier n’a jamais été porté à la connaissance du
Président de la République. Il a été intercepté, comme toutes les
correspondances concernant la défense qui lui sont adressées, par le Cabinet
militaire. Mais cela importe peu.

Ce qui importe, c’est que l’analyse faite par l’ADEFDROMIL
se soit révélée exacte puisque au mois de décembre 2001, les gendarmes sont
descendus dans la rue et la grogne a gagné les casernes. Ce fut l’occasion
pour notre association de jouer un rôle éminent durant trois mois puisqu’elle
a servi à canaliser le mécontentement des nombreux personnels d’active.

J’ai reçu au siège de l’ADEFDROMIL, une avalanche de
messages de mécontentement et des tracts. Certains voulaient adresser des
lettres anonymes, d’autres voulaient faire une grève du zèle aux portes de
la caserne mais du côté cour, d’autres envisageaient de saboter le 14
juillet en se portant malade le matin même, etc.

Il faut bien le reconnaître, l’ADEFDROMIL a joué un rôle
d’apaisement quand tout aurait pu dégénérer devant d’évidentes
provocations.

Tout ce que demandaient les militaires, c’est d’avoir la
certitude d’être entendu, ce que nous leur avons magistralement apporté.

L’Association a, en quelque sorte, joué les rôles
simultanés de haut-parleur et de soupape ! A ce titre je suis intervenu
plusieurs fois sur France2, TF1, M6, Canal Plus, RTL, RFI, France info, RMC,
etc. sans oublier bien sûr la presse écrite.

Il faut savoir également que c’est l’ADEFDROMIL qui a
permis à certains militaires de s’exprimer à la Télé, à visage caché, et
à la radio.

En fait, l’ADEFDROMIL a maîtrisé le mécontentement d’une
grande partie des militaires en leur offrant une Tribune sur le site et un
relais vers les médias.

Je pense sincèrement que cet aspect des choses a
parfaitement été saisi par le ministère de la défense, qu’il devra très
vraisemblablement en tenir compte et qu’il nous en est, en quelque sorte,
redevable.

Cette période mouvementée a été également pour nous, l’occasion
de constater la totale inefficacité des associations traditionnelles d’anciens
militaires, qu’elles soient d’officiers ou de sous-officiers !

Aucun des présidents de ces associations n’a levé le
petit doigt de la couture du pantalon pour monter au créneau ! Aucun
général en 2ème section n’a haussé le ton ! Seul l’Amiral
LANXADE avec beaucoup de courage a tenu dans la presse le langage de vérité
que beaucoup de nos amis marins lui connaissent et appréciaient.

L’ADEFDROMIL joue un autre rôle non négligeable :
elle permet de porter très rapidement à la connaissance du Haut commandement,
des affaires graves ou très graves plus ou moins dissimulées.

Nous savons par exemple, à l’ADEFDROMIL, qu’actuellement
deux enquêtes de commandement sont en cours.

Je tiens absolument à ce que l’Association conserve cette
crédibilité. Il n’est pas question pour nous de défendre tout et n’importe
quoi ! C’est pourquoi chaque dossier est vérifié attentivement et nous
ne publions sur le site que des informations sûres.

D’ailleurs, pour en revenir à la crise de décembre 2001,
j’ai absolument refusé d’être l’un des relais des sites de gendarmes au
même titre que j’ai refusé de diffuser ou de transmettre les tracts reçus
au siège. Je n’ai pas voulu que l’on dise de l’ADEFDROMIL :
« C’est une entreprise de démoralisation de l’armée ».

Dans le même ordre d’idée, il est exclu pour nous de
jeter en pâture des noms d’officiers , de sous-officiers ou de militaires du
rang, sur le site. C’est la raison essentielle pour laquelle nous n’avons
pas ouvert de forum. Il suffit de se rendre sur d’autres sites pour voir l’injure
côtoyer la vulgarité.

La règle déontologique appliquée à l’ADEFDROMIL est
claire : un article est publié avec l’aval du président. Toute personne
qui souhaite critiquer cet article adresse sa mouture au siège avec
autorisation ou non de publier sa réflexion.

L’Association de défense des droits des militaires n’est
pas et ne sera jamais une entreprise de démoralisation ou de déstabilisation
de l’armée. Je tenais à vous le redire.

Quels sont nos objectifs ?

L’ADEFDROMIL se propose d’aider ses adhérents à se
défendre dans le cadre des lois et du respect du service public et de
représenter les militaires en général dans les instances de concertation.

L’ADEFDROMIL est donc une force de propositions qui assure
la promotion d’idées nouvelles et de solutions possibles aux différents
problèmes posés par la professionnalisation.

En ce sens, l’ADEFDROMIL doit être regardée comme un
contrepoids « professionnel » légitime et non un contre-pouvoir, le
premier visant à l’équilibre alors que le second conduirait à l’anarchie
par multiplication des « instances » et leurs surenchères
revendicatives.

Bloquer cette évolution « sociale », c’est-à-dire l’émergence de moyens d’expression libres dans un cadre légal
associatif reviendrait à s’asseoir sur une soupape (le mot
« expression » veut d’ailleurs dire « vider la
pression » ). C’est aussi mener les réformes indispensables sans réel
débat contradictoire entre ceux qui prennent les décisions et ceux qui
pâtissent de leurs effets secondaires, pas toujours intuitifs.

C’est donc dans ce cadre général que se situe notre
domaine d’action.

Quelques-uns de nos objectifs les plus importants :

Notre premier objectif est de faire en sorte que les
militaires finissent enfin par découvrir qu’ils sont des citoyens comme les
autres. Les militaires doivent cesser de vivre dans une
« bulle » !

A partir du moment où le Président de la République, Chef
des armées, a décidé de se doter d’une armée professionnelle, négligeant
ainsi la Nation, il faut que les militaires d’ancien temps ou d’ancien moule
sachent enfin se considérer comme des citoyens.

Et pour nous, à l’ADEFDROMIL, il y a un point extrêmement
important que nous souhaitons voir éclaircir, c’est celui de la
rémunération des fonctionnaires. Nous voulons savoir officiellement si oui ou
non le décret de 1948 constitue toujours le fondement de la rémunération des
fonctionnaires civils ou militaires. Il nous paraît indispensable aujourd’hui
qu’une commission d’études constituée au sein du Conseil Supérieur de la
Fonction Militaire se penche sur ce décret modifié plus de 150 fois. Il y a
eu, en effet, des prises de position de la DFMP dans des réponses qui nous
paraissent inadmissibles.

A partir de ce décret, nous voulons connaître exactement la
position des militaires au regard de la grille indiciaire des fonctionnaires de
grade correspondant.

Notre deuxième objectif est la refonte partielle du Statut
général des militaires et notamment de ses articles 7, 9 et 10.

L’article 7 limite le droit d’expression des militaires.

S’il nous paraît normal que les militaires obtiennent l’autorisation
du ministre pour évoquer publiquement des questions mettant en cause une
puissance étrangère ou une organisation internationale, il nous paraît
anachronique, dans le monde actuel, de laisser subsister une instruction
ministérielle encadrant le droit d’expression du citoyen militaire.

Nous demandons à ce que dans un premier temps, les
présidents de catégories élus par leurs pairs, les membres des différents
conseils de la fonction militaire et du Conseil supérieur de la fonction
militaire puissent s’exprimer librement dans tous les médias sur leur
condition militaire. Il faut en finir avec ces images dégradantes de militaires
s’exprimant à visage caché.

Lors d’une crise comme celle de décembre 2001, les
journalistes doivent pouvoir interviewer en toute sérénité un minimum de
militaires responsables.

La seule limite au droit d’expression des militaires, c’est
le Code pénal !

En ce qui concerne le domaine opérationnel, seules les
autorités désignées par le Ministre de la défense peuvent s’exprimer.

En dehors des opérations militaires, la pensée militaire
doit pouvoir s’épanouir à travers des écrits individuels critiques et
constructifs. Là aussi, les seules limites au droit d’expression des
militaires doivent être celles du Code pénal et des rares exigences du secret.

Enfin, dans le cas où le général chef d’Etat-major des
armées viendrait à estimer que la situation au sein des armées était grave, la
loi doit lui donner le pouvoir de se présenter devant le parlement afin d’y
faire une déclaration solennelle.

De même s’impose la modification de l’article 9 en ce
qui concerne une candidature aux élections municipales.

Il ne suffit pas d’affirmer que les militaires peuvent
être candidats à toutes fonctions publiques électives si, une fois élus, ils
sont obligés de démissionner car ils n’ont plus du fait de leur mise en
service détaché, aucun moyen de subsistance ! Ceci concerne tout
particulièrement le mandat municipal puisqu’il n’est pratiquement jamais
rémunéré à hauteur des besoins.

Nous proposons donc que, dans le cadre des relations
armées-nation, le militaire élu conseiller municipal conserve son mandat et sa
solde et que lui soit accordé en plus de ses droits à permissions, un certains
nombres de jours ou d’heures pour honorer son mandat. Durant ce mandat, le
militaire doit respecter la neutralité des armées.

Pour ce qui concerne l’article 10, celui ci nous touche
directement puisqu’il interdit aux militaires en activité de service d’adhérer
à des groupements professionnels. Or, nous savons que les juristes sont
unanimes à reconnaître qu’il n’existe pas de définition juridique du
groupement professionnel. Pour l’heure, c’est donc le ministre de la
défense lui-même qui apprécie souverainement si telle ou telle association a
le caractère ou non d’un groupement professionnel.

C’est dire si le champ de la bataille juridique est
largement ouvert. Nous savons par exemple que la Direction de la Gendarmerie
considère l’ADEFDROMIL comme un groupement professionnel.

Compte tenu des pressions exercées sur les uns et sur les
autres, nous pensons qu’il en est de même pour la Marine, l’Armée de l’air
et peut être l’Armée de terre, quoique, en ce qui concerne l’Armée de
terre, certains généraux nous soient favorables.

Sur ce point, la bataille juridique n’est pas sûre d’être
remportée par nos détracteurs car nous avons le Droit européen pour nous,
même si l’on se complaît à nous dire : « C’est une
directive, elle n’est pas contraignante ! »

En effet, la Résolution 903, adoptée le 30 juin 1988 par la
commission permanente de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, a
« invité tous les Etats membres du Conseil de l’Europe qui ne l’ont
pas encore fait à accorder, dans des circonstances normales, aux membres
professionnels des forces armées de tous grades, le droit de créer des
associations spécifiques formées pour protéger leurs intérêts
professionnels dans le cadre des institutions démocratiques, d’y adhérer et
d’y jouer un rôle actif ».

Nous savons que cette résolution est en cours de réexamen
au Conseil de l’Europe de façon à la rendre contraignante pour les Etats
membres.

En ce qui concerne notre droit interne, il faut savoir que la
loi 72-662 du 13 juillet 1972 n’a jamais été soumise au contrôle de
constitutionnalité.

Néanmoins, nous possédons la réponse du Doyen VEDEL à la
question posée sur la limitation du droit d’association des militaires en
1972, je le cite :

« Le législateur peut interdire aux militaires de
former des groupements qui, sous couvert de la forme empruntée à la loi du 1er
juillet 1901, équivaudraient à des syndicats avec leurs traits spécifiques
– droit de grève, manifestations de masse, discipline syndicale substituée
en cas de crise à la discipline de fonction. Mais si ce législateur
interdisait aux militaires de former des associations sous des formes ne
comportant aucun péril pour la discipline, cette conception semblerait
contraire à l’esprit de la Constitution car il s’agirait alors de la
suppression totale de l’exercice du droit d’association et non de sa
réglementation ».

Comme vous pouvez le constater, le refus de reconnaître le
droit d’association aux militaires ne devrait plus tenir très longtemps et je
crois que le Gouvernement en est conscient. Je vous rappelle d’ailleurs que
Monsieur le Député UMP Jean Jacques GUILLET a déposé sur le Bureau de l’Assemblée
Nationale une proposition de loi tendant à créer un Groupement professionnel
au sein des armées.

En tout cas, si elle y est contrainte, l’Association de
défense des droits des militaire n’hésitera pas, si ses adhérents ou ses
intérêts sont menacés, à demander la démission de tous les militaires d’active
qui sont adhérents dans des associations comportant dans leurs statuts la
défense d’intérêts moraux ou matériels ou professionnels.

En 1972, lors de l’élaboration du statut général des
militaires, Monsieur Michel Debré , Ministre d’Etat chargé de la défense
nationale avait été très claire : toute association qui inscrit dans ses
statuts la défense d’intérêts professionnels, alors c’est l’interdiction
qui est la règle !

Nous détenons au siège de l’Association un grand nombre
de statuts d’associations dont l’objectif est la défense d’intérêts
moraux ou sociaux ou matériels.

Il est hors de question que ces associations dirigées par
des généraux en 2ème Section soient tolérées et bénéficient
même de subventions du Ministère de la défense et que l’ADEFDROMIL soit
interdite.

Nous faisons confiance sur ce point à Madame ALLIOT-MARIE,
ministre de la défense, mais surtout avocate de formation, pour que le principe
d’égalité de traitement soit respecté.

L’ADEFDROMIL je le répète, n’est pas une association
subversive, et ses portes sont grandes ouvertes.

Notre troisième objectif, est de faire en sorte que les lois
de la République soient respectées.

Le titre de mon livre «  Pour que l’armée respecte
enfin la loi » a fait bondir plus d’un officier général ! Vous n’y
pensez pas ! l’armée respecte la loi.

Et bien nous persistons !

l’ADEFDROMIL prétend que les lois de la République ne
sont pas toujours appliquées par la hiérarchie.

Un exemple parmi tant d’autres : la communication des
documents administratifs.

Nous nous heurtons sans cesse à des difficultés pour
obtenir la communication des documents administratifs ! Soit l’administration
militaire s’abstient purement et simplement de les fournir, soit ils sont
communiqués vierges, tronqués, falsifiés voir classifiés pour les
dossiers les plus sensibles. Nous avons tous en mémoire les dossiers CAILLET/JODET/LEWDEN
et bien d’autres…

Nous demandons donc la stricte application de la loi 78-753
du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations
entre l’administration et le public.

l’ADEFDROMIL considère toute obstruction à la
communication des documents administratifs comme une atteinte aux droits de la
défense.

Notre quatrième objectif  est de faire en sorte que les
femmes prennent toute leur place au sein des armées, que leurs droits sociaux
soient définitivement reconnus et que cesse toute forme de harcèlement moral
ou sexuel. Sur ce dernier point, nous demandons que soit systématiquement
apportée une aide psychologique aux victimes et qu’il soit procédé aux
enquêtes d’usage avant poursuite devant les Tribunaux.

Notre cinquième objectif est de lutter contre la précarité
au sein des armées. A ce titre, il nous paraîtrait normal que soit remise en
cause la retraite proportionnelle à 15 ans de service si celle ci devait être
un obstacle à une carrière normale des militaires du rang. Une étude
sérieuse doit être menée sur ce point.

Notre sixième et dernier objectif est de contraindre l’administration
militaire à la transparence dans tous les domaines où elle intervient :
avancement, décorations, sanctions, mutations, etc.

Comme vous pouvez le constater, l’Association de défense
des droits des militaires est devenue une réalité dans le monde de la
Défense.

Le nombre croissant de ses adhérents, la fréquentation
régulière de son site aussi bien par la haute hiérarchie militaire que par
les militaires de la base, l’intérêt porté par les médias à son
évolution , les nombreuses interviews sollicitées par les étudiants s’intéressant
à la défense, l’avalanche de messages et de dossiers traités, l’éminent
rôle joué durant les événements de décembre 2001, montrent à l’évidence
qu’elle répond à un besoin. Il nous appartient de nous conduire en
hommes et femmes responsables en ne prêtant pas le flanc à la critique. Nous
sommes certainement aujourd’hui un laboratoire d’expérimentation sous haute
surveillance et je reste persuadé que les plus hautes autorités militaires
savent qu’elles n’ont rien à craindre de l’ADEFDROMIL car elles
connaissent ma droiture et ma fidélité à l’Institution même si parfois je
ne suis pas tendre avec elle.

Mesdames, Messieurs, mes chers amis, je vous remercie de
votre attention et je déclare ouvert le débat sur le rapport moral avant de
passer à son vote d’approbation.

Merci.

Lire également :
Témoignage d’un adhérent de l’ADEFDROMIL

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