Le contrôleur général des armées considère que la fin des opérations en Afghanistan conduira à réduire le volume de l’armée de terre. Explications.
Auteur récent du livre Quelle défense pour la France (Economica), André Yché est un ancien élève de l’École de l’air et de l’US Air Force Academy. Il fut le délégué aux restructurations du ministère de la Défense avant d’être directeur adjoint du cabinet civil et militaire du ministre de la Défense Alain Richard. Il est aujourd’hui membre du comité de direction du groupe de la Caisse des dépôts et président du directoire du groupe SNI (Société nationale immobilière), filiale immobilière de la Caisse des dépôts.
Le Point.fr : Les Français entament un nouveau cycle stratégique : ils rentrent d’Afghanistan, un nouveau livre blanc se prépare. Des évolutions suivront. Quelles doivent-elles être, à vos yeux ?
André Yché : Je crois effectivement que la fin des opérations en Afghanistan est aussi celle d’une époque. D’abord pour des raisons de psychologie collective et de politique des États occidentaux. Les opinions publiques occidentales n’accepteront plus des engagements de plusieurs dizaines de milliers d’hommes sur des théâtres extérieurs, sans limite de durée. Les orientations prises aux États-Unis à l’initiative de Barack Obama soulignent cette évolution en indiquant très clairement que des opérations extérieures de maintien de la paix ne sont plus envisageables à des échelles comparables à ce qui s’est fait en Afghanistan et en Irak. La prise de conscience porte sur le fait que, pour l’essentiel, les opérations de ce type doivent avoir pour but de régler une crise rapidement, pour rétablir une situation dégradée et les flux d’échanges. Mais de multiples expériences en ce sens nous apprennent qu’on ne saurait utiliser les armées de façon durable pour « conquérir les esprits et les coeurs ». La promotion de valeurs occidentales, comme le respect des droits de l’homme, appartient à ce qu’il est convenu d’appeler le soft power, théorisé par Joseph Nye. Ce n’est pas avec des troupes au sol, avec les moyens militaires appartenant au hard power, qu’on fait progresser un modèle de civilisation.
J’entends vos arguments sur les opinions publiques, mais nous n’avons pas connu dans notre pays des protestations de masse contre la présence en Afghanistan. En plus de dix années de présence, les intellectuels, les partis politiques ou les organisations syndicales ne se sont que très peu exprimés sur le sujet. Le retour des soldats n’a pas été décidé par François Hollande sous la pression populaire…
Sur le constat, vous avez raison. Mais cette absence de débat repose à mes yeux sur un consensus entre la droite et la gauche, d’accord pour estimer que les missions longues sont une idée révolue. Dans la culture militaire française, la priorité est donnée à la défense du territoire national. C’est très clair à toutes les époques de notre histoire. Si on compare notre posture à celle de nos amis britanniques, elle est l’inverse de la nôtre. William Pitt disait : « Dès qu’il s’agit de commerce, nous sommes sur notre dernière ligne de défense ; il faut vaincre ou mourir. » Aucun homme politique français n’a jamais pris une telle posture ! Mais lorsqu’il s’agit de défendre le territoire national, nous sommes prêts à tous les sacrifices comme durant la Première Guerre mondiale, quand le sens du sacrifice des combattants a atteint un niveau inimaginable !
Quelles conséquences en tirez-vous pour la période de réflexion qui s’ouvre actuellement ?
Les rédacteurs des deux précédents livres blancs ont été confrontés à une profonde rupture avec nos fondements….
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