Un ami, au courant de votre situation, vous l’a chaudement recommandé : c’est quelqu’un de connu dans le coin et en plus, c’est lui qui s’est occupé de son divorce.
Assez rapidement, l’auxiliaire de justice vous reçoit dans son cabinet, aborde avec vous l’affaire qui vous amène devant lui.
Profitez bien de l’instant car vous ne reverrez peut-être pas de sitôt cette personne. Elle va refiler le dossier à l’un de ses collaborateurs. En revanche, elle pourra réapparaître au moment de la fixation des honoraires ; plus précisément, elle pourra faire jouer sa notoriété afin de faire très facilement grimper le montant dont vous devrez vous acquitter.
En effet, l’article 10 de la loi du 31 juillet 1971 rappelle que, par principe, « les honoraires de consultation, d’assistance, de conseil, de rédaction d’actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client. »
Le législateur a tout de même pris le soin d’énumérer, à défaut de convention entre les parties, quelques critères pour fixer au mieux le montant dû : les usages, la situation de fortune du client, la difficulté de l’affaire, les frais exposés, les dilligences accomplies et la notoriété de l’avocat.
Ajoutons à cela que la somme à verser ne peut pas n’être établie qu’en fonction du résultat judiciaire.
D’ailleurs, fuyez au plus vite celui ou celle qui vous promet que, vu l’affaire, pas de souci c’est déjà gagné, qui vous annonce que vous ne lui devait rien pour le moment et qu’il prendra son pourcentage sur votre gain final ; et ce d’autant plus que ces beaux mots ne resteront sans doute que des paroles.
En revanche, rien n’interdit de prévoir, en plus du prix des prestations, un petit complément en raison du résultat judiciaire ou du service rendu.
Oui mais voilà, la décision rendue le 9 février dernier par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation vient apporter une précision importante concernant l’application des critères de fixation des honoraires d’avocat ; en particulier en ce qui concerne la prise en compte de la notoriété.
En l’espèce, pour faire simple, il s’agissait d’une femme qui avait confié à un avocat la défense de ses intérêts dans le cadre d’un litige administratif.
Jugeant toutefois le montant des honoraires beaucoup trop élevé au regard du travail accompli et tenant compte du fait que les diligences avaient été effectuées non pas par l’avocat choisi mais par l’une de ses collaboratrices, la cliente refusa de s’en acquitter. Précisons tout de même à ce stade que, bien que n’étant pas intervenu personnellement, l’avocat avait tout de même mis en avant sa notoriété dans la fixation des honoraires.
Sans plus attendre, son conseil saisit alors le bâtonnier de son ordre afin qu’il statue ; ce dernier confirmant la somme demandée.
Loin de se résigner à suivre gentiment cette première décision, la femme décida de soumettre le litige au premier président de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence.
Bonne idée. En effet, dans son ordonnance, le magistrat diminua de manière très significative le montant des honoraires.
Un point de vue confirmé par les membres de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, amenés à se prononcer à la demande de l’avocat.
La raison de tout cela tient en fait à la manière dont on interprète la notion de notoriété.
Pour l’avocat et son bâtonnier, le critère doit être recherché aussi bien dans la personne même de l’avocat que dans celui de « son cabinet dont il assume la responsabilité. »
Pour le premier président de la Cour d’appel et, plus encore, les magistrats de la haute juridiction, « l’absence d’intervention personnelle de l’avocat » l’empêche de se prévaloir de sa propre notoriété pour fixer les honoraires.
Ajoutons que, dans le cadre de son interprétation souveraine, le premier président de la cour d’appel avait également en vérifiant les autres critères à prendre en compte mis en avant notamment que « l’affaire ne comportait pas de difficulté particulière, étant relevé que l’avocat s’est très largement inspiré pour rédiger son mémoire d’appel du travail effectué par son prédécesseur en première instance » et que, concernant « la situation de fortune du client », l’avocat ayant été informé du dépôt d’une demande d’aide juridictionnelle, il ne pouvait ignorer l’état de celle-ci.
Juriste droit privé – droit pénal