Dans le cadre de la formation de ses parachutistes, l’adjudant X. chef de section à la Compagnie d’éclairage et d’appui (CEA) du 3ème Régiment de parachutistes d’infanterie de marine en garnison à Carcassonne se rend au champ de tir de Vilmaury avec sa section pour y effectuer une séance de tir au FAMAS version lance grenade. Cette séance régulièrement programmée a pour but de faire tirer par chaque parachutiste une grenade anti-personnel réelle.
Ce type de tir doit être effectué à partir d’une alvéole de tir règlementaire et tous les hommes, casque sur la tête, doivent être à l’abri derrière un mur de protection. Ne doivent rester auprès du tireur, que le directeur de tir et le sous-officier pourvoyeur chargé de donner la grenade anti-personnel et la cartouche feuillette (1).
Que se passe-t-il au champ de tir de Vilmaury ?
Vers 12h30 le chef de section met en position de tir un jeune parachutiste sortant tout juste de l’instruction non pas dans l’alvéole règlementaire prévue à cet effet mais sur un petit monticule de terre d’où l’on voit beaucoup mieux l’objectif à atteindre. Ce changement de position pour ce type de tir est devenu une pratique tolérée.
Concentré sur son premier tir, le jeune parachutiste met en place la grenade anti-personnel au bout du canon de son Famas et s’apprête à prendre la cartouche feuillette tendue par le sous-officier pourvoyeur lorsque ce dernier laisse tomber de son oreille l’une des deux cartouches 5,56… réelles qu’il a subtilisée la veille lors d’une séance de tir de nuit pour faire office de casque antibruit.
Fatale méprise !
Après avoir ramassé la cartouche tombée à terre, le sous-officier pourvoyeur se retrouve avec la cartouche réelle et la cartouche feuillette dans la main. Par inadvertance c’est la cartouche réelle qui est donnée au tireur inexpérimenté. Lorsque celui-ci appuie sur la queue de détente du famas, la grenade explose au bout du canon.
Tragique bilan
Les milliers de petits éclats de ferraille épargnent le tireur et le pourvoyeur mais polycriblent cinq parachutistes que les petits gradés ont omis de placer derrière le mur de protection. Ils crèvent un œil au chef de section et tuent un jeune parachutiste qui aurait dû, lui aussi, se trouver à l’abri derrière le mur.
Ce tragique bilan en reste là grâce au chef de section qui, malgré ses blessures, a eu le réflexe d’alerter le SAMU de Carcassonne et non l’infirmerie du 3ème RPIMa.
Dissimulation de la vérité
Se rendant compte de son erreur, le sous-officier pourvoyeur récupère l’étui de la cartouche réelle éjectée et le dissimule dans sa poche. Cette dissimulation a pour effet de jeter le discrédit uniquement sur le lot de grenades anti-personnel qui est immédiatement suspendu d’emploi.
Cette supercherie dure le temps que l’arme revienne de l’expertise balistique dont le rapport confirme la présence de poudre de cartouche réelle sur l’arme. Entendu par la brigade de gendarmerie de Carcassonne, le jeune tireur dessine aux gendarmes une cartouche avec balle et non une cartouche à l’extrémité étoilée, caractéristique de la cartouche feuillette !
Les aveux
Très rapidement confondus par les gendarmes, les auteurs de ce tir mortel passent aux aveux et sont sanctionnés disciplinairement. Parallèlement une information judiciaire est ouverte par le Procureur de la République.
Dénouement
Ces faits se sont déroulés à Carcassonne il y a tout juste vingt ans ! Déjà des cartouches réelles circulaient par laxisme entre les mains d’irresponsables.
Ni le Président de la République ni le Ministre de la Défense se déplacèrent pour réconforter les parents du soldat tué accidentellement ou pour apporter leur soutien aux blessés. Aucun parachutiste ne fut suspendu d’emploi.
Dommage qu’on n’ait pas su retenir la leçon !
Un ancien du 3
- (1) La cartouche feuillette est une munition bourrée de poudre, dépourvue de balle à son extrémité étoilée et conçue pour propulser une grenade à fusil (antipersonnel, mixte, antichars…).
Cet article a 4 commentaires
Le rappel de cet ancien du 3 montre assez le sérieux avec lequel doivent se dérouler les séances de tir en métropole, à l’entrainement, à l’exercice, en démonstration.
Nos anciens, aussi souples et manoeuvriers que nous, ont un avantage, l’expérience!…
Cette leçon est toute aussi valable pour tous les soldats de FRANCE quelle que soit leur armée d’appartenance.
La vie de nos camarades et de nos compatriotes est sacrée.
Olearius
Juste une question: de quand date cet incident ?
Ancien du 3, j’ai du mal à affirmer vos commentaires, ou alors l’armée n’est plus ce qu’elle est ou vos commentaires sont « fabuleux ».
J’ai fait mon « PEG » au 3, en 76, et les pratiques étaient très sécurisées, en particulier à « Vilmaury » où on pa
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