Extrait de l’intervention de Monsieur le député Jean DARDE

(groupe socialiste)

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Pour le reste, si l’on néglige quelques faux-semblants, votre texte, dans la partie qui concerne les droits civils et politiques, la responsabilité et les obligations des militaires, constitue un ensemble assez accablant de blocages et d’interdits rétrogrades.

Examinons d’abord les droits d’expression des militaires. Sous couleur d’une apparente libéralisation, vous maintenez les causes de ce que le général Alain Le Ray a appelé le « désert aride de la pensée militaire française actuelle ».

La situation est simple : avec la réglementation actuelle, le colonel de Gaulle, il y a quarante ans, n’aurait pu faire paraître ni le Fil de l’épée, ni encore moins – ce seul titre vous faisant horreur – Vers l’armée de métier.

Ce n’est pas moi qui le dis, c’est le général Beaufre, cité par M. le rapporteur. Vous me répondrez sans doute que le colonel de Gaulle à l’époque, n’a pas été écouté ; je vous répliquerai qu’aujourd’hui il ne pourrait même pas être lu.

Dans le domaine des droits politiques, vous restez dans l’ absurdité et l’hypocrisie de la situation actuelle, où les militaires, tout en étant éligibles, ne jouissent pas réellement de l’exercice du droit d’éligibilité, puisque l’adhésion à un parti politique n’est permise à un militaire que quinze jours avant l’ouverture de la campagne électorale.

Quel parti acceptera de donner son investiture à un militaire dans ces conditions ? Les statistiques prouvent que les militaires qui parviennent à franchir ce barrage se comptent sur les doigts de la main, sauf les médecins candidats aux élections municipales ; sur ce dernier point, le projet ne fait rien pour empêcher ce qui est incontestablement un abus.

Quant au droit d’association, à l’article 9, s’il est normal que vous refusiez le syndicalisme en raison de sa liaison, fréquente mais non nécessaire, avec la grève, il n’est pas normal que vous dissociez le droit d’association de toute défense d’intérêts professionnels.

Vous refusez un usage modéré du droit d’adhérer à des groupements de défense professionnelle, vous refusez d’accorder aux militaires un droit que la Constitution reconnaît à tous les Français. Craignez que la pression des événements ne vous conduise, vous ou votre successeur, à accorder en catastrophe beaucoup plus que ce que vous refusez aujourd’hui ! Ce ne serait d’ailleurs pas la première fois, dans votre longue carrière politique, que pareil phénomène se produirait.

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