Récemment, un jeune capitaine, commandant d’unité, sans doute victime de la déflation galopante des effectifs, a désigné quatre adjudants-chefs de plus de 30 ans de service (34 pour le plus ancien), pour être sur les rangs, en Famas, pour une prise d’armes.
Même le président des sous-officiers, médaillé militaire, avait déjà sa place réservée dans le dispositif, jusqu’à ce qu’un des anciens fasse remarquer au capitaine que les médaillés militaires formaient un bloc à part derrière le drapeau de leur section et que de toute façon c’était pousser le bouchon un peu loin.
Rien d’anormal, me direz-vous, ils sont sous-officiers et leur arme de dotation est le Famas. Le capitaine a besoin de monde, il puise donc dans le faible réservoir que lui fournit, encore, son DUO (nous sommes toujours en 2007, profitons en).
En fait, l’anomalie qui a choqué profondément ces adjudants-chefs, se situe ailleurs.
En effet, pour cette même prise d’armes, de jeunes sous-officiers du grade de sergent se trouvaient désignés pour être dans ce qu’on appelle « les cadres sans troupe ».
On peut donc tout à fait légitimement se poser la question de la considération que certains chefs accordent encore aux sous-officiers en général et aux anciens en particulier.
Serait-il venu, ne serait-ce qu’une seule seconde, à ce jeune capitaine, l’idée de désigner, dans les mêmes conditions, un jeune lieutenant fraîchement sorti de Saint Cyr ? On peut en douter.
Dans cette unité, comme partout ailleurs, on demande régulièrement aux adjudants-chefs de porter l’étendard, d’être chef de section de défilé, directeurs de tir, pour certains de tenir des postes d’officiers, de prendre bien évidemment la permanence en tant qu’officier et la liste n’est pas exhaustive.
Dès lors, il paraît maladroit, même si le règlement ne l’interdit pas, de désigner un adjudant-chef anciennement porteur de l’étendard du régiment, pour compléter les rangs d’un peloton de défilé lorsque dans le même temps on laisse de jeunes sergents rejoindre l’emplacement des cadres sans troupe. A vingt ans, en tant que sergent ça passe. A cinquante, en tant qu’adjudant-chef, médaillé militaire, ça casse.
On demande régulièrement aux anciens de « refaire leurs classes » sur le terrain pour montrer l’exemple, sans pour autant prendre réellement en compte le fait qu’au bout de 34 ans de service et à plus de 52 ans d’âge, même si on en a encore envie, on a ses petits problèmes de santé. Qu’à cela ne tienne, il faut y aller !
Il faudrait éviter la confusion entre serviable et servile et exploiter les compétences et non le personnel.
Même certains EVAT étaient choqués par cette décision. Comment voulez-vous qu’un jeune sous-officier ou un EVAT se motive pour accéder au sommet de la pyramide, si c’est pour être traité de la sorte en fin de carrière ? Du coup, j’en arrive à me dire : « vivement la fin » surtout lorsque j’en viens à comparer la considération qu’avait un adjudant-chef il y a 35 ans à celle qui lui est réservée aujourd’hui !
Le dénouement heureux de cette histoire, nous le devons à l’intervention d’un jeune major d’une autre unité. Outré par cette situation, il a désigné de jeunes sous-officiers de sa propre unité, pour permettre aux adjudants-chefs de rejoindre les rangs des cadres sans troupe.
Merci major et merci aux jeunes qui les ont remplacés.
Une vieille vertèbre