Après celle des feuilles mortes, voici venue la saison des feuilles mornes, celles des déclarations en vue de l’imposition sur le revenu des personnes physiques. Les militaires se sont généralement peu intéressés aux problèmes fiscaux jusqu’à ces dernières décennies du fait d’un certain détachement (relatif) à l’égard des problèmes d’argent. Mais les générations montantes sont plus attentives à ces questions, surtout lorsque la famille a « des fins de mois » difficiles .
Parmi les méthodes que certains militaires ignorent ou négligent et qui peuvent leur permettre de ne pas augmenter inutilement le montant de leur impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP), il y a celle qui consiste à opter pour la déduction des frais réels dans la déclaration des revenus. Ils n’imaginent pas toujours les avantages que l’on peut en espérer.
Au chapitre des sommes à déduire des traitements et salaires, il est prévu deux options. Soit une déduction forfaitaire de 10% (pour la majorité des cas), soit une déduction des frais professionnels réels. Il peut arriver que la déduction des frais réels soit « réellement » plus intéressante. Pour en juger, il convient d’effectuer une comparaison chiffrée entre les deux options. Notons que la déduction des frais professionnels réels suppose que soient déclarées le allocations compensatrices de frais d’emploi.
A la lettre, sinon dans les faits, l’indemnité de charges militaires est représentative de tels frais, et les puristes pourront toujours réintégrer le montant de l’indemnité pour charges militaires (ICM) dans les montants imposables, avant de faire leur calcul. Sur ce point, le commissariat de chaque armée devrait être en mesure d’apporter les précisions nécessaires sur le régime fiscal de l’ICM. Les commissariats ne constituent-ils pas des services de soutien des militaires eux-mêmes si le chef en est le « défenseur naturel » ?
Quoi qu’il en soit, et en cas de litige, le services du fisc le feront savoir.
Ensuite, il convient d’examiner les frais professionnels déductibles :
– les frais de séjour à l’étranger imposés par l’exercice de la profession (sauf indemnisation dans le cadre de la fonction publique) ;
– les frais de déménagement (idem) ;
– les frais de vêtements, dans la mesure où il s’agit de vêtements spécifiques à la profession Les militaires, notamment ceux qui ne perçoivent pas de prime d’habillement, ont des économies à espérer en ce domaine, même s’ils prennent soin de réintégrer l’ICM représentative également de tels frais ;
Pour les autres frais, il convient de voir les brochures diffusés par les services fiscaux.
On s’attardera sur les frais de transport du domicile au lieu de travail, déductibles sous certaines conditions, et qui doivent être justifiés. Car dans cette optique la notion même de domicile mérite examen pour de nombreux militaires, célibataires ou mariés. L’article 102 du code civil définit le domicile comme le lieu du principal établissement. Cette notion a donné lieu à de nombreuse jurisprudences.
Si la notion de domicile présente des intérêts certains (signification d’actes d’huissiers, tribunal compétent en cas de procès, ouverture de la succession au domicile du défunt, etc..) la résidence n’a pas de valeur juridique, et c’est une notion de fait plutôt que de droit. En cas de pluralité d’établissements (famille et lieu de travail séparés par exemple) la cour de cassation estime qu’il y a là une question de fait à trancher d’après les circonstances de la cause et l’intention de l’individu.
Quant au changement de domicile, la loi le définit avec simultanément un élément matériel (le changement d’habitation réelle) et un élément intentionnel (la volonté manifestée par double déclaration – article 104 du code civil – de fixer dans le lieu nouvellement choisi le principal établissement. Le tribunaux ont jugé que « le lieu d’exercice de la profession n’est pas nécessairement le lieu du principal établissement », que « le domicile d’un citoyen est au lieu où il paye la contribution personnelle et mobilière, que l’officier de marine conserve on domicile d’origine dans la commune où il est né, bien qu’il ait eu plusieurs résidences pour les nécessités de sa profession, alors qu’il n’a pas eu l’intention de renoncer à son domicile d’origine ».
L’article 104 indique que la preuve de l’intention résulte d’une déclaration expresse, faite tant à la municipalité du lieu que l’on quittera, qu’à celle du lieu où l’on aura transféré son domicile. Et l’article 106 d’ajouter : « le citoyen appelé à une fonction publique temporaire ou révocable, conservera le domicile qu’il avait auparavant, s’il n’a pas manifesté d’intention contraire ». Enfin, le lieu du principal établissement est le lieu où le citoyen vit avec sa famille, et en cas de pluralité de résidences , celui où il a son principal intérêt (c’est à dire sa famille : conjoint et enfants s’il est marié ou en concubinage, ses parents s’il est célibataire).
On voit tout l’intérêt qui s’attache pour les militaires célibataires non preneurs à bail ou non propriétaires d’un logement dans leur garnison, ou célibataires géographiques, ou affectés dans un lieu éloigné de leur résidence (un grand camp de manoeuvres par exemple), à se domicilier juridiquement en un lieu (chez leurs parents, chez leur épouse) où ils vont pouvoir faire jouer en matière fiscale le calcul des frais de transport domicile-travail.
Comme nous l’avons déjà dit dans un autre article, les bâtiments pour cadres célibataires ne sont pas considérés comme ayant un usage exclusivement privatif. Ils ne font pas l’objet d’un bail. Ils ne peuvent être considérés comme un domicile.
Pour la déduction des frais de transport domicile-lieu de travail, les frais doivent être justifiés. Seul un aller et retour quotidien est autorisé, sauf cas particuliers. L’administration fiscale peut exiger que soit justifié l’emploi d’une voiture personnelle lorsqu’il existe des moyens de transport collectifs fréquents et rapides. Pour les transports en commun, il faut en indiquer les tarifs et, s’ils existent, en conserver les justificatifs. Pour la voiture, on doit, si on (ou le conjoint) en est le propriétaire, utiliser un barème administratif. Si elle appartient à un membre de la famille (ascendant, descendant ou collatéral), on peut utiliser le barème administratif du prix de revient kilométrique.
Enfin, et ce sont les plus connus, il existe des barèmes forfaitaires pour d’une part les automobiles, d’autre part les motos, enfin les vélomoteurs et les scooters, qui épargnent de savants calculs.
La distance entre le domicile et le lieu de travail est limitée à 40 kms sans justificatif. Au delà, il faut justifier sur papier libre les contrainte particulières (raisons médicales, etc).
Les frais de repas pris à l’extérieur du domicile (non couverts par une indemnité qui leur serait attachée) doivent être justifiés également, par des notes de restaurant par exemple.
Lorsque les conjoints ont une double résidence par nécessité professionnelle de chacun d’entre eux, et si le citoyen ne peut fixer son domicile sur le lieu de son activité, ou encore au cas où il est contraint d’occuper un logement (de fonction par exemple) à l’écart de sa famille, certains frais sont déductibles (acquisition d’un logement distinct, repas pris au restaurant midi et soir, etc).
De nombreux militaires, en étudiant le détail de la réglementation dans les documents diffusés par les services fiscaux et dans les brochures spécialisées, peuvent valablement se pencher plus en avant sur cette réglementation (le présent article n’est pas exhaustif et n’engage pas l’Adefdromil) et faire marcher leurs calculettes. Certains d’entre eux pourraient ne pas le regretter.
Comme ce lieutenant célibataire servant au camp de Suippes, domicilié chez sa mère en banlieue sud de Paris, qui usa de cette méthode en décomptant les frais kilométriques à raison d’un aller et retour par semaine (410 kms, non plafonnés à l’époque) et fit chuter substantiellement ses impôts. Au point que les capitaines célibataires géographiques en raison de leur temps de commandement le demandèrent en consultation. Il cessa de pouvoir opérer les déductions afférentes lors de son mariage et de son établissement à Châlons-sur-Marne. Mais entre ces deux lieux il y a néanmoins 26 kms …
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