Du fin fond de ma Bretagne, mercredi 22 février, j’ai vu sur nos étranges lucarnes Mr Séguin, président en exercice de la Cour des comptes, présenter le rapport annuel de ladite institution. Puis sur le site « Internet » du Monde j’ai appris qu’en présentant ce rapport, il aurait fait l’éloge du système démocratique britannique ; si l’on n’oublie pas le vieux proverbe qui recommande de ne pas cracher dans la soupe, c’est peut-être son droit de préférer le régime de sa Gracieuse Majesté et de son premier ministre. Puis en lisant les articles du Monde, j’ai aussi appris que la Cour remettrait en cause ou tout au moins critiquerait l’institution militaire française, trop coûteuse.

Sans avoir eu le temps de charger le précieux rapport annuel de la Cour des comptes, et de façon donc tout à fait a priori, je voudrais attirer l’attention des militaires, actifs ou retraités, sur les points suivants :

Le premier terme inscrit au fronton de nos édifices publics est « Egalité ». En partant de ce principe, nous pouvons et devons déjà formuler quelques mises au point (plutôt que des critiques qui exigent étude approfondie sur des textes et des données exactes).

1 – Toute critique du système en place doit veiller à inclure tous les systèmes ou sous-systèmes, tout au moins ceux des fonctions publiques, puisque, maintenant on reconnaît qu’il y a au moins trois fonctions publiques. Il ne faut pas montrer du doigt une seule catégorie.

2 – Comment se fait-il que pendant longtemps (je ne sais ce qu’il en est aujourd’hui) le ministère de la défense ait été le seul pour lequel le budget mentionnait le coût des pensions ? Quel est pour les autres ministères, ministère par ministère, le coût des pensions payées pour les personnels ?

3 – Sauf erreur, le ministère des armées (ou de la défense, vous m’avez compris), fut le premier à bénéficier d’une vraie loi de pensions pour ses agents, de même qu’il fut le premier en 1834 à doter les officiers de terre et de mer d’un statut dont, s’inspirèrent, dit-on, mais plus d’un siècle plus tard les auteurs du statut de la Fonction publique d’octobre 1946..

4 – Le système dont bénéficient les militaires est un héritage de l’histoire, des guerres du passé, mais comme l’a dit le Chef des armées, un pays doit assumer son histoire.

5 – Les agents militaires sont-ils mieux traités que les autres ? Nul ne peut le dire et surtout ne veut le dire. Depuis plusieurs mois, sur le site de l’Adefdromil, on peut lire des articles demandant à ce que le point soit fait sur ce fameux décret de juillet 1948, base de la rémunération des agents de l’Etat, qui aurait fait l’objet de plus de 500 modificatifs et servirait toujours de boussole, aveugle, semble-t-il.

6 – En ce qui concerne les pensions des militaires, il faut distinguer les pensions de retraite et les pensions d’invalidité ; ces dernières sont les séquelles de l’histoire.

7 – Quant aux pensions de retraite, le Service des Pensions des Armées produit des statistiques, mais celles-ci dorment sans doute au fond des tiroirs du SGA (secrétaire général pour l’administration) ; jusqu’à présent, on n’a pas beaucoup vu l’exploitation qui en est faite et les enseignements que l’on peut en tirer.

8 – D’une façon générale, les militaires ne demandent pas la lune : ils demandent seulement de connaître leur place dans la Fonction Publique (F.P), leur place dans les rémunérations de la Fonction Publique (primes comprises ou tout au moins clairement identifiées).
En ce qui concerne les retraites, ils ne demandent pas à être privilégiés par rapport à la F.P ; si le système du régime général de la sécurité sociale est appliqué aux autres agents de la Fonction Publique, pourquoi ne leur serait-il pas attribué, étant entendu que la réparation des accidents, des invalidités relèvent d’un système de réparation valables pour les autres agents des Fonctions Publiques.
Il est évident que toute comparaison avec le secteur privé est exclu de la présente réflexion ne serait-ce que parce que le régime dit « complémentaire » est très mal connu des militaires.

Critiquer est bien et indispensable dans une démocratie, mais ceci suppose une transparence qui n’est pas facile, exige du courage et n’est sans doute pas réalisée aujourd’hui ; il faut dire et redire que la fonction « Défense » est une fonction tout aussi honorable que les autres et aussi indispensable à la société que les autres fonctions publiques; les dispositions relatives aux militaires ne sont pas arbitraires, elles sont votées par un Parlement qui, seul pourra, si besoin, prendre les mesures pour corriger les dysfonctionnements relevés par la Cour des Comptes.

Jean Kerdréan

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